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01/21/2024
« Fastes de la Grande Ecurie »
Concert des Grand[s] hautbois pour les Chevaliers fait[s] par Henry III – Pavane La Petitte Guaire fait[e] pour les Cornets en 1601 – Pavane faite pour le mariage de Henry le Grand en 1600 – Pavane pour les hautbois fait[e] au sacre du Roy le 17e Octobre 1610 – Pavane du mariage du Roy [Louis XIII] – Ballet à Cheval fait pour le grand Carouselle fait à la Place Royal[e] pour le mariage de Louis XIII – Autre Suitte faite pour Mr le Compte [sic] Darcours par Mr Degrinis pour les Cromornes, l’an 1660 – Marche du Régiment du Prince Charles de Brandebourg & Marche Allemande
Lorenzo Allegri : Primo Ballo della Notte d’Amore
Michael Praetorius : Bourée d’Avignon* & La Bourrée
Eustache Du Caurroy : Dixiesme Fantasie, sur Requiem æternam, à 4
Luigi Rossi : Les Pleurs d’Orfée ayant perdu sa femme
Louis Couperin : Fantaisie [à 5] sur le jeu des hautbois – Fantaisie sur le mesme jeu « Couperin 1654 »
François Roberday : 8e Caprice
André Danican Philidor : Bruit de Guerre – Marche Liégeoise (attr.) – La Retraitte (attr.) – Marche de timbales (attr.) – La Marche Royalle (attr.) – Pièce à double trompette et de différent ton et le gros basson – Marche Royalle à 3 dessus de hautbois pour la marche françoise – Menuet pour les Trompettes – Marche des pompes funèbres
Jean-Baptiste Lully : Carrousel de Monseigneur en 1686 – Les Folies d’Espagne – Marche des Fusilliez – Marche du regiments [sic] du Roy
Charles Desmazures : Pièces de Symphonie à quatre parties – Chaconne à 4
Syntagma Amici & Giourdina, Jérémie Papasergio (direction)
Enregistré au Conservatoire de Caen (juin 2021) – 69’20
Ricercar RIC 439 (distribué par Outhere) – Notice (en anglais et en français) de Thomas Leconte et Jérôme Lejeune
On n’a pas attendu les chevaux de la Garde Républicaine lors du défilé du 14 Juillet (entre autres..) pour entendre des musiciens d’apparat escorter le chef de l’Etat en France ! En effet, comme le détaille l’excellente et fort instructive notice de Thomas Leconte, le corps de musique rattaché à l’Ecurie du Roi est une institution ancienne dont l’éclat a notamment brillé sous les règnes de Henri III et, bien sûr, Louis XIV. Au sein de cet ensemble de musiciens figurait notamment la bande des douze « Grands Hautbois » dont le présent disque se propose de retracer en quelque sorte le répertoire au fil de plusieurs décennies.
Son premier mérite, et non des moindres, est de faire fi d’une idée reçue suivant laquelle cet ensemble n’aurait joué que des marches et des musiques solennelles ; on passe ainsi certes d’inévitables et attendues marches ou autres musiques de guerre – Carrousel de Monseigneur en 1686, Bruit de Guerre, Marche Liégeoise, La Retraitte (sic) – à des pièces beaucoup plus surprenantes comme ces chaconnes, fantaisies, pavanes où timbales et cuivres laissent tout d’un coup la place à quelques anches doubles ou même à des flûtes à bec qui interprètent alors des pièces au caractère beaucoup plus intimiste (le 8e Caprice d’un certain François Roberday ou le fameux thème des Folies d’Espagne, ici par le grand Lully), voire arcadien (l’extrait du Primo Ballo della Notte d’Amore de Lorenzo Allegri).
Le deuxième mérite réside bien entendu dans l’interprétation des deux ensembles Syntagma Amici et Giourdina, placés sous la direction de Jérémie Papasergio, dont on connaît les multiples talents. Ce dernier a réuni autour de lui pour l’occasion des musiciens rompus à ce répertoire (signalons, pour ne citer que les noms les plus connus, les frères Madeuf et Marie‑Ange Petit dont le numéro de duettiste avec Laurent Sauron dans la Marche de timbales, peut‑être de Philidor, est des plus impressionnants) qui nous font ainsi découvrir de nombreuses pièces anonymes mais également des morceaux parfaitement attestés, signés principalement Philidor et Lully. Certains nous étaient déjà connus – on pense notamment à la Bourrée d’Avignon, pièce connue également sous le nom de Bourrée d’Avignonez, ou à la Pavane la Petite Guaire faite pour les cornets en 1601 que Jordi Savall et les siens avaient gravées dans leur superbe disque « L’Orchestre de Louis XIII » (Alia Vox, 2002) – mais ici les musiciens se font également musicologues et l’enthousiasme lié à cette esprit de découverte éclate à chaque instant. Les bassons sont truculents (dans la Marche des Fusilliez de Lully), les hautbois et bassons rivalisent aux côtés des tambours (la Marche Liégeoise), les trompettes nous font revivre tout ce dont la pompe royale était alors capable (dans les 20 secondes à peine du Bruits de Guerre de Philidor ou dans l’à peine plus long Menuet pour les Trompettes du même) : par‑delà la diversité des occasions dans lesquelles ces pièces devaient sans doute être jouées, l’ensemble des musiciens interprètent cette musique avec une conviction et une variété de timbres extrêmement appréciables.
Le troisième mérite de ce disque réside enfin dans la très large variété de timbres grâce à des effectifs différents qui requièrent parfois des instruments un peu rustiques (les cromornes ou même les hautbois des premières pièces, aux sonorités assez nasillardes ou vertes comme dans la Pavane faite pour le mariage de Henry le Grand en 1600) mais dont la facture a su évoluer avec le temps (soulignons là aussi l’excellence de la notice sur ce point, signée cette fois‑ci Jérôme Lejeune), permettant ainsi aux compositeurs de la Cour d’explorer de nouveaux horizons artistiques. Un disque réalisé sans nul doute avec panache !
Sébastien Gauthier
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