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12/11/2023
« Images... »
Claude Debussy : Images (Première et Seconde Séries)
Olivier Messiaen : Catalogue d’oiseaux : 12. « Le Traquet rieur » & 8.« L’Alouette calandrelle »
Tristan Murail : La Mandragore
Philippe Manoury : Deuxième livre d’études : « Dérèglements » & « Réseaux »
George Benjamin : Piano Figures
Lorenzo Soulès (piano)
Enregistré en public salle Barrault du Théâtre d’Orléans (15 février 2023) – 78’
b·records LBM055 (distribué par Outhere) – Notice en français et en anglais
 Must de ConcertoNet
b·records, jeune label créé en 2015, s’est spécialisé courageusement dans l’exercice difficile de l’enregistrement et la diffusion de concerts live. Il suit notamment à cette fin depuis plusieurs années les festivals de Pâques et d’Août musical de Deauville, véritables pépinières de jeunes talents dont ConcertoNet rend régulièrement compte depuis de nombreuses années, et en publie dans la mesure du possible les plus belles prestations. Le plus souvent, ce sont de jeunes artistes qui sont mis à l’honneur. Ici, les micros ont été posés lors d’un concert donné en 2023 au Théâtre d’Orléans autour de Lorenzo Soulès, pianiste d’origine lyonnaise d’un peu plus de 30 ans et auréolé de nombreux prix internationaux, notamment justement lors du concours international de piano d’Orléans de l’année d’avant, en 2022.
Le programme de ce cinquante‑cinquième disque de l’éditeur ne manque ni d’audace ni d’intérêt. A côté d’Images (1905‑1907) de Claude Debussy (1862‑1918), on trouve en effet deux extraits du Catalogue d’oiseaux (1956) d’Olivier Messiaen (1908‑1992), La Mandragore (1993), pièce de Tristan Murail (né en 1947) inspirée par la légende de cette plante méditerranéenne réputée pousser sous les gibets, deux Etudes (2021) commandées par le concours d’Orléans à Philippe Manoury (né en 1952) et enfin dix Figures pour piano (2004) du Britannique George Benjamin (né en 1960), l’ensemble de compositeurs représentés s’inscrivant indéniablement dans une même filiation, française peut‑on dire, la transparence leur étant essentielle.
Relevons d’emblée que les scories habituelles de l’enregistrement public ne sont ici pas perceptibles. Avec le public orléanais à l’écoute du pianiste ce soir de février dernier, manifestement peu nombreux mais fort sage, l’enregistrement mérite d’ailleurs la note maximale. La vitalité de l’interprétation, face positive souvent liée à la présence du public, saute quant à elle aux oreilles. Et on ne s’ennuie à aucun moment.
Les Images sont abordées avec énergie, sans impressionnisme vaporeux et sans alanguissements excessifs par un Lorenzo Soulès faisant toutefois preuve de moins d’imagination qu’un Samson François notamment. Le chant des deux oiseaux retenus parmi les treize ayant inspiré Messiaen pour son Catalogue est marqué quant à lui par de forts contrastes qui nuisent peut‑être à leur naturel et leur charme. Le traquet rieur ne rit guère mais sait assurément se faire entendre tandis que l’alouette paraît sans pitié. Les pièces suivantes sont autrement plus captivantes même si La Mandragore de Murail relève un peu de la même veine. Grâce à Lorenzo Soulès, on voit presque le pendu osciller dans cette œuvre d’un mystère fascinant. Le pianiste surmonte ensuite dans une lecture idéale à nos oreilles la complexité des Etudes de Manoury, prenant semble‑t‑il plaisir à jouer avec les résonnances impliquées par ces pages infiniment colorées et d’une folle inventivité. Quel beau travail ! Celui qui entoure les dix pièces de Benjamin qui achèvent le disque n’est pas en reste. Les déphasages de « Hammers » lorgnent du côté de John Adams, « Song » fait clairement penser aux oiseaux de Messiaen mais toutes ces miniatures sont constamment passionnantes. « Around the Corner » par exemple est ainsi une sorte de berceuse qui finit par être secouée comme par surprise... juste derrière le coin, là.
Il s’agit au total d’un disque généreux à tous égards qui constitue un vrai livre d’images sonores propre à ravir les curieux.
Stéphane Guy
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