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05/18/2023
« La Montagne magique »
Aaron Copland : Lento molto pour quatuor – Rondino sur le nom de Fauré
Maurice Ravel : Le Tombeau de Couperin (transcription Antonin Rey)
Igor Stravinsky : Concertino pour quatuor – L’Oiseau de feu : Berceuse [*] – Petrouchka : Danse russe [*] (transcriptions Samuel Dushkin) – Double canon dodécaphonique – Trois pièces pour quatuor
Paul Novak : a string quartet is like a flock of birds
Luciano Berio : Folk Songs [#]

Amaya Dominguez (mezzo-soprano), Samuel Bricault (flûte), Sylvain Devaux (hautbois, percussions), Antoine Cambruzzi (clarinette), Constance Luzzati (harpe), Quentin Dubreuil (percussions), Violaine Debever [*] (piano), Antonin Rey (direction) [#], Quatuor Lontano : Pauline Klaus [*], Florent Billy (violon), Loïc Abdelfettah (alto), Camille Renault (violoncelle)
Enregistré en l’église Notre‑Dame de Toute Grâce, Passy (août 2022 [Ravel, Novak]) et à La Seine musicale, Boulogne-Billancourt (mars, juin et octobre 2022) – 83’25
Cascavelle VEL 1672 – Notice en français et en anglais


Sélectionné par la rédaction





Le titre du disque – « La Montagne magique » – paraît tiré du roman éponyme de Thomas Mann mais aucun des auteurs des œuvres qui nous sont proposées par le Quatuor Lontano (fondé en 2015) et quelques amis n’est en vérité allemand et ces œuvres n’ont aucun rapport avec le monde du grand écrivain de Lübeck.


C’est que le deuxième disque des Lontano est surtout le résultat de plus de sept participations au festival des « Musicales d’Assy » se déroulant en juillet de chaque année sur le plateau d’Assy au milieu des montagnes inspirantes, « magiques » donc, de Haute‑Savoie, au pied du Mont‑Blanc. Le sanatorium de Sancellemoz, sur le plateau, ferait aussi le lien avec le roman de Thomas Mann dans la mesure où son personnage principal rend visite à son cousin dans ce type d’établissement sanitaire (en Suisse) ; il est quand même bien ténu. Les lieux sont aussi un prétexte pour insérer des œuvres d’Igor Stravinsky car il aurait séjourné à Assy entre 1935 et 1939. Les autres compositeurs, américains avec Aaron Copland et Paul Novak, français avec Maurice Ravel et italien avec Luciano Berio, n’ont quant à eux guère de rapports entre eux et avec les lieux. Jugeons donc chaque œuvre indépendamment des autres.


Des deux pièces d’Aaron Copland (1900‑1990), hommages à la musique française peu originaux, le Quatuor Lontano livre une lecture d’une belle intensité. La réduction si l’on part de la version orchestrale ou l’augmentation si l’on prend la version pour piano du Tombeau de Couperin de Maurice Ravel (1875‑1937), pour huit instruments, n’en entame pas la ductilité. Les plans sonores, captés d’assez près, sont d’une parfaite clarté sans nuire à une sorte de douce énergie, teintée d’ironie. On ne peut que louer les phrasés, la musicalité et l’excellence instrumentale de tous les artistes convoqués pour cette interprétation inspirée.


On change d’univers avec les œuvres suivantes, d’Igor Stravinsky (1882‑1971). Le Quatuor Lontano s’est réservé les quatuors originaux tandis qu’une de ses violonistes s’est associée à la pianiste Violaine Debever pour des transcriptions de Samuel Dushkin préservant l’essentiel des extraits de L’Oiseau de feu et de Petrouchka si ce n’est leur luxuriance orchestrale. Le duo piano/violon déçoit un peu et l’on est plus convaincu par les quatuors purs, sorte de concessions au genre, de Stravinsky : les Lontano en offrent une lecture âpre voire grinçante. Dans leurs mains, les Trois pièces, peut‑être pas très bien écrites pour quatuor, flottent parfois un peu (« Cantique ») mais sont plutôt réussies.


Encore plus intéressante est la pièce composée à la mémoire de Raoul Dufy. Ce dernier fut un des rares peintres de l’époque moderne avec Gustav Klimt, Paul Klee, Marc Chagall, Nicolas de Staël et Serge Charchoune à apprécier et surtout connaître la musique et s’en être inspiré. Il fréquentait beaucoup les salles de concert comme en témoignent ses nombreuses toiles les représentant. Stravinsky ne l’a pas connu semble‑t‑il mais lui a dédié cette courte pièce pour quatuor, de moins de deux minutes, curieuse et désolée. Elle est bien mise en valeur par les Lontano.


De Paul Novak, compositeur américain né en 1998, il y a une belle pièce écrite pour quatuor (2021), animée par de nombreux et brefs coups d’archets comme autant de coups d’ailes, ou par des pizzicatos passant d’un instrument à l’autre. Ca virevolte dans tous les sens et ça piaille comme une volée de moineaux, sans imitations de chants d’oiseaux pour autant. Les Lontano savent faire rebondir leurs archets sur les cordes, donner l’impression de vitesse et garder un rythme qui fait avancer la pièce sans faillir.


Les trop connues Chansons folkloriques de Luciano Berio ont trouvé avec les interprètes rassemblés par le Quatuor Lontano des passeurs engagés et de qualité. Leur perspective est clairement chambriste mais l’énergie ne manque une nouvelle fois pas. La voix de la mezzo‑soprano franco-espagnole n’est pas puissante ; elle paraît même presque fragile du côté des aigus. L’on sent toutefois qu’elle est habituée aux changements de style et d’univers musicaux. Il y a de beaux graves et de la nuance mais le tout ne fait toujours pas oublier l’imagination et la fantaisie de Cathy Berberian et paraît même un cran en dessous de l’interprétation plus récente et commentée dans ces colonnes de Sarah Maria Sun avec l’Ensemble SONGS.


Au total, nonobstant quelques réserves, ce disque, au minutage généreux, est parfaitement recommandable. Les Lontano peuvent aller loin.


Le site du Quatuor Lontano


Stéphane Guy

 

 

 

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