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02/25/2023
Edward Elgar : Concerto pour violoncelle en mi mineur, opus 85 (transcription Lionel Tertis)
Ernest Bloch : Suite pour alto et orchestre, B. 41

Timothy Ridout (alto), BBC Symphony Orchestra, Martyn Brabbins (direction)
Enregistré au Studio 1 de Maida Vale, Londres (avril 2022) – 58’58
harmonia mundi HMM 902618 – Notice (en français et en anglais) de Stephen Pettitt


Sélectionné par la rédaction





Timothy Ridout et Martyn Brabbins proposent un programme consacré à deux pièces assez rarement entendues : la version pour alto (1930) du Concerto pour violoncelle (1919) d’Edward Elgar (1857‑1934) et, d’une savoureuse originalité, la Suite pour alto et orchestre (1919) d’Ernest Bloch (1880‑1959). L’excellente qualité de l’interprétation en fait deux versions d’exception.


Bien que ce soit dans un tout premier temps difficile de faire abstraction du son du violoncelle ancré dans les mémoires, la transcription que le célèbre altiste Lionel Tertis (1876‑1975) fit pour son instrument du Concerto d’Elgar s’impose rapidement, donnant l’illusion d’une œuvre originale. Tout à fait convaincu, Elgar lui‑même en dirigea la création en 1930, le transcripteur à l’alto. L’orchestre y est souvent relativement diaphane et, grâce à la fine discrétion de la direction de Brabbins, rarement à son plein potentiel sonore. De plus, l’alto sonne parfois à l’octave par rapport au violoncelle selon les registres d’ensemble. La transcription surmonte ainsi la difficulté majeure en trouvant un équilibre souvent parfait entre l’alto et l’orchestre, bien qu’il faille certainement un jeu d’alto ample et chaleureux pour en tenir la gageure. Ridout est largement à la hauteur.


Elgar ne s’affranchissait pas encore des effets durables d’une guerre désastreuse et ce sont des couleurs à la fois sombres et lumineuses à l’oblique qui dominent. Il n’y a guère que la seconde partie du deuxième mouvement, un Allegro molto pointilliste, qui permet quelque détente grâce à son caractère de scherzo aux sortilèges mendelssohniens captés ici avec une finesse virtuose. Les thèmes, exprimés sans emphase, soulignent le génie mélodique du compositeur. Ils permettent des essors ailés aux exécutants et l’excellent Ridout, au diapason avec l’orchestre, y fait encore preuve d’une expressivité retenue qui s’adapte avec souplesse aux flux et reflux des humeurs finement changeantes.


A l’origine pour alto et piano, l’envergure de la Suite B. 41 appelle l’orchestre. Bloch ne tarda pas à l’entendre et se mit à la réalisation d’une version orchestrale avant même la création de la version avec piano. C’est un conte fantasque et picaresque sans histoire et sans paroles et, pour en soutenir le potentiel, Bloch abandonna les titres, trop évocateurs, prévus pour chaque mouvement. Sans « Dans la jungle », « Grotesques », « Nocturne » et « Le Pays du soleil », trop restrictifs, la pièce ouvre, sans images imposées, les vastes horizons exotiques d’un imaginaire ressenti.


Bloch était très attiré par les cultures indonésiennes telles qu’il les apprenait d’amis voyageurs et il avait le désir de les faire vivre à travers la Suite. L’exotique, la magie, le fantasque envahissent la composition mais les quelques touches densément colorées évoquent plutôt des fragrances hébraïques à l’exception du dernier mouvement qui grâce à la gamme pentatonique et à quelques effets de percussions inattendues fait vivre un orient convenu.


Toutefois ce n’est pas cet orient‑là qui donne un souffle extraordinaire à la composition mais les techniques de jeu, les rythmes, les danses effrénées et les mystères chuchotés d’un ailleurs ensorcelé. L’alto y est souvent lumineux et lyrique sur les miroitements de timbres féeriques de l’orchestre ou ivre de rythmes rapides et acrobatiques transcendant une pareille ivresse à l’orchestre, ou encore, il s’élève à tire d’aile des brèves et vibrantes proclamations du tutti. La grande force reste cependant l’animation des strates. Un foisonnement de rythmes, de couleurs et de timbres inouïs se déchaîne à la verticale. C’est un frisson sismique permanent qui contribue à déjouer toutes les attentes à l’horizontale en faveur de richesses insoupçonnées. On n’oublie pas le jaillissement inattendu de l’intrigant motif initial qui lance l’œuvre en annonçant le caractère insolite des aventures à venir.


Timothy Ridout s’est formé à l’Académie royale de musique de Londres avant d’avoir le privilège de se perfectionner auprès de Nobuko Imai à l’Académie Kronberg mais c’est à son talent qu’il doit son actuelle place au soleil. Il est en parfaite symbiose avec Martyn Brabbins et l’Orchestre symphonique de la BBC et leur prestation en est hautement recommandable.


Le site de Timothy Ridout


Christine Labroche

 

 

 

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