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03/19/2022
Johann Sebastian Bach : Variations Goldberg, BWV 988
Fanny Vicens (accordéon)
Enregistré à Sepmes (décembre 2020) – 79’58
Paraty 1421.110 – Brève présentation en anglais





Les Variations Goldberg (1740) de Johann Sebastian Bach (1685-1750) ont suscité, presque parallèlement au mouvement des baroqueux, un nombre impressionnant d’interprétations sur d’autres instruments que celui pour lequel elles ont été conçues, à savoir le clavecin à deux claviers. Le clavecin puis le piano, notamment à la suite des gravures de Glenn Gould, sont de très loin les instruments privilégiés dans les multiples enregistrements disponibles. Mais on trouve des captations de transpositions ou d’arrangements pour petit orchestre, orgue, harpe, trio à cordes, koto (cithare japonaise), quatuor de saxophones, trio de violon, guitare et violoncelle, vibraphone et piano, ensemble de bassons, quintette de flûtes à bec, quintette à cordes, quintette de cuivres, marimbas, ensemble de bois (hautbois, clarinette, cor de basset et basson), pianoforte, duo de guitares, et voix naturellement. La liste n’est probablement pas complète. Comme on peut collectionner les traductions du Petit Livre rouge, du Petit Prince ou de Tintin en recherchant de préférence les versions en langues rares, on peut courir après les interprétations des Variations Goldberg. Cela peut ressembler à une course assez amusante à l’instrument le plus incongru, certains arrangements conduisant par force à de la perte en ligne, des notes passant inévitablement à la trappe en raison des limites inhérentes aux instruments retenus lorsque la voie soliste est retenue. Par exemple, au koto, on ne dispose que de trois doigts pour treize cordes ; il faut donc faire des choix, faire illusion et ne garder que l’ossature.


Le disque de Fanny Vicens vient de proposer une lecture de l’œuvre à l’accordéon. Ce n’est pas la première fois qu’on tente l’expérience. Lena Rist‑Larsen, Mika Väyrynen, Janne Rättya et Samuel Telari sont déjà passés par là. C’est que le piano à bretelles, qui dispose de deux claviers comme le clavecin originel, permet au travers d’une transposition rigoureuse de conserver toutes les notes et, pour un accordéoniste virtuose, le défi technique, de taille, reste forcément attirant. Il constitue au passage une occasion d’illustrer les potentialités de l’instrument, un peu mal aimé. Déjà repérées par Luciano Berio (Sequenza XIII), elles sont plus grandes qu’on ne croit même si personne n’ose plus affirmer que l’instrument doit rester cantonné au bal musette. L’intérêt réside dans la faculté de moduler la puissance d’émission du son, contrairement au clavecin ou à l’orgue, mais c’est aussi un risque, la boursouflure pouvant ne pas être loin. De ce point de vue, la prestation de Fanny Vicens est indéniablement réussie. Son jeu est tout de retenue. Distinction et pudeur sont ses atouts. La maîtrise instrumentale est indéniable. Il ne s’agit donc en rien d’une interprétation caricaturale ; une fois la surprise passée, elle ne prête pas à sourire comme d’autres versions passablement iconoclastes. On est cependant plus ou moins convaincu selon les pièces. C’est parfois du branle‑poumons, le son paraissant avoir du mal à s’extirper de l’instrument, et les fins de phrase peuvent paraître poussives. Le mélange des voix n’est en outre pas du meilleur effet, la clarté des polyphonies n’étant pas toujours au rendez‑vous. L’aria initiale ou finale, les troisième ou neuvième variations sont à cet égard symptomatiques. Les aigus s’en sortent mieux que les médiums ou les graves, souvent noyés dans une sorte de brouillard sonore comme dans la première variation. A l’inverse, les fugues les plus polyphoniques et rapides emportent plus facilement l’adhésion.


Au total, on ne peut pas demander à l’accordéon plus qu’il ne peut donner dans ce type de répertoire et il faut évidemment éviter de comparer un tel disque à une belle version historiquement informée, au clavecin, ou jouée au piano ; il y a le choix. Mais, d’un autre côté, on ne peut s’en abstraire non plus et il faut reconnaître que l’impression n’est quand même pas identique. Le son reste globalement étriqué, aigrelet voire pleurnichard comme s’il s’agissait des Variations Goldberg du pauvre. Surtout, l’accordéon ne révèle rien de l’œuvre qui fût ignoré. Et on n’a pas attendu l’accordéon et le présent enregistrement pour prendre la mesure du caractère universel du chef‑d’œuvre de Bach. Bref, il s’agit d’un CD plutôt réservé aux collectionneurs compulsifs.


Le site de Fanny Vicens


Stéphane Guy

 

 

 

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