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12/11/2021
Anton Bruckner : Symphonie n° 2 en ut mineur (version de 1872, éd. Carragan)
Altomonte Orchester St. Florian, Rémy Ballot (direction)
Enregistré en public en la Stiftsbasilika de Saint-Florian (23 août 2019) – 83’55
Gramola 99211 – Notice (en allemand et en anglais) de Klaus Laczika et Rémy Ballot





Anton Bruckner : Symphonie n° 3 en ré mineur (version de 1877, éd. Nowak)
Wiener Philharmoniker, Christian Thielemann (direction)
Enregistré au Musikverein, Vienne (27-29 novembre 2020) – 61’13
Sony Classical G010004526180X – Notice (en allemand et en anglais) de Wolfgang Stähr


Sélectionné par la rédaction





Anton Bruckner : Symphonie n° 9 en ré mineur
Orchestre symphonique de Pittsburgh, Manfred Honeck (direction)
Enregistré en public au Heinz Hall for the Performing Arts, Pittsburgh (23 et 25 février 2018) – 63’12
SACD Reference Recordings FR-733SACD – Notice (en anglais) de Manfred Honeck





Nouveau volume dans l’intégrale en cours dirigée par Rémy Ballot en la basilique de Saint-Florian, la Deuxième Symphonie est la plus « légère », la plus « insouciante » des symphonies de Bruckner. Choisissant l’édition de William Carragan, Rémy Ballot nous livre malheureusement une version fort décevante de cette symphonie, nouvel échec à nos yeux dans cette intégrale qui se poursuit après de fort médiocres Huitième, Neuvième et Sixième. Le premier mouvement, Allegro, ziemlich schnell, compte certes de beaux moments (le superbe passage à partir de 8’45 par exemple) mais la pâte orchestrale est globalement très lourde et ne bénéficie d’aucun allant à l’image d’une fin de mouvement d’une pesanteur rédhibitoire. Ajoutons à cela des problèmes récurrents d’équilibre entre pupitres, peut-être la faute aux micros mal placés qui, de temps à autre, nous donnent à entendre des éclairages un peu surprenants sur tel ou tel groupe d’instruments (la clarinette à 10’58). Ayant choisi la version originale de 1872, où le Scherzo : Schnell. Trio : Gleiches Tempo vient en deuxième et non en troisième position comme habituellement, Rémy Ballot nous déroute avec un Scherzo stricto sensu d’assez belle facture mais handicapé tout d’un coup par un Trio ennuyeux, poussif, sans aucune dynamique. Notre déception connaît tout de même un certain répit avec l’Adagio, fort bien mené, bénéficiant par ailleurs de très belles cordes, guidées par le geste ample du chef et la large respiration qu’il sait à l’évidence insuffler à ses musiciens de l’Orchestre Altomonte de Saint-Florian. Le mouvement conclusif retombe néanmoins dans un surplace qui génère de nouveau l’ennui chez l’auditeur, la fin tragique (nous avons déjà parlé à ce propos de véritable «  course à l’abîme ») de la symphonie étant ici totalement gommée. On reviendra donc bien vite aux références bien connues, et notamment aux lectures beaucoup plus solaires signées notamment par les Italiens Riccardo Muti (voir ici) et surtout Carlo Maria Giulini (chez Testament), tous deux avec Vienne, le Philharmonique pour le premier, le Symphonique pour le second.


On ne présente plus Christian Thielemann dans Bruckner, le compositeur faisant partie depuis des années des chevaux de bataille du chef berlinois, dont les réussites chez le maître de Saint-Florian sont patentes à la tête des plus grands orchestres du monde. Pour autant, lorsqu’on associe la Troisième Symphonie au Philharmonique de Vienne, la version légendaire de Karl Böhm (Decca) s’impose à l’esprit avec évidence ; le défi consistant à marcher ainsi sur les terres du grand chef dont on célèbre cette année les quarante ans de la disparition n’était donc pas à la portée du premier venu. Et pourtant, force est de constater que Thielemann relève le gant avec maestria en nous livrant ici une version tout à fait admirable de cette Wagner-Symphonie, dont il a choisi l’édition Nowak de 1877. Inutile d’en rajouter mais Vienne dans Bruckner, quel miracle ! Ici, la célèbre phalange avance avec une puissance et une efficacité tout à fait admirables. Le rouleau compresseur orchestral joue à plein dans le premier mouvement (à partir de 5’55 ou dans le passage qui commence à 10’52). Mais la musique de Bruckner requiert également une certaine finesse ; Vienne, comme peu d’orchestres, parvient sans aucune difficulté à faire ressortir la dentelle de ce Gemässigt, mehr bewegt, misterioso où se surpassent des élans de violoncelles à la suavité légendaire (à partir de 12’35) ou un hautbois solo enjôleur. En dépit de certains détails un peu étonnants dans la prise de son (des micros peut-être parfois un peu trop proches des instruments comme ceux postés près des clarinettes à 16’03 ?), l’orchestre nous séduit de bout en bout : peut-être trop ! Car, dans le deuxième mouvement par exemple (Andante. Bewegt, feierlich, quasi Adagio), la rondeur des cuivres et la richesse pleine et entière des cordes nous enveloppent presque avec excès, nous distrayant ainsi de l’imagination harmonique dont Bruckner a su faire preuve dans cette page assez étonnante. Le Scherzo est en revanche parfait : à la pulsation inexorable du mouvement, Thielemann ajoute une légèreté, voire une fraîcheur plutôt rares dans la section centrale du Trio, l’alliance entre ces deux faces d’une même médaille fonctionnant à merveille. Car le maître d’œuvre de tout cela reste bien entendu le chef allemand qui, à la tête de « son » orchestre de la Staatskapelle de Dresde nous a déjà laissé un superbe témoignage filmé de cette symphonie. La liberté interprétative de Christian Thielemann est ici patente, ayant depuis plusieurs années maintenant remplacé ses gesticulations parfois brutales par une ampleur du geste et une hauteur de vue qui nous renvoient aux grands maîtres du passé. Les relances de l’orchestre et la poigne inflexible du chef sont certes bel et bien présentes mais, en fin de compte, c’est surtout un orchestre auquel Thielemann voue une totale confiance qui s’illustre sous nos yeux et ce pour notre plus grand bonheur.


Anton Bruckner, voilà bien un compositeur avec lequel Manfred Honeck a tissé des liens privilégiés moins en tant que chef qu’en sa qualité d’ancien membre du pupitre des premiers violons de l’Orchestre philharmonique de Vienne ! Il a ainsi pu jouer ces symphonies sous la direction des plus grands : outre ses racines autrichiennes, est-ce là la raison de sa réussite dans l’ultime symphonie de Bruckner qu’est la Neuvième ? Certes, et ce n’est pas lui faire injure que de l’écrire, on n’est pas là sur les sommets atteints par d’autres baguettes mais ce disque mérite largement l’écoute. Dans le premier mouvement, Feierlich, misterioso, Honeck joue sur du velours grâce à un orchestre d’excellence, celui de Pittsburgh dont il est le directeur musical, orchestre pourtant peu familier de cette musique. Mais les cordes répondent avec un legato digne de tous les éloges, les vents sachant également intervenir à bon escient même si le chef a tendance à parfois un peu trop user du rubato (le passage de témoin entre vents et cordes à partir de 7’10) alors que, à notre sens, c’est au contraire ce caractère presque métronomique qui rend le plus justice aux masses orchestrales requises par Bruckner. S’appuyant sur un solide pupitre de contrebasses, Manfred Honeck n’évite pas toujours le danger de la grandiloquence (à partir de 22’35) mais sans jamais tomber dans le mauvais goût ; par ailleurs, soyons honnête : difficile d’y rester insensible... Il en va de même pour un Scherzo mené tambour battant, notamment dans le Trio qui, pour une fois, respecte à la lettre l’indication schnell donnée par le compositeur, là où tant d’autres chefs retiennent au contraire leur battue. On peut néanmoins regretter une allure à notre sens (ou à notre goût ?) peut-être tout de même un rien trop rapide dans le reste du mouvement, notamment après les pizzicati des cordes annonçant le tutti avec ce redoutable martellement de timbales que l’on aimerait plus retenu et donc, sans doute, plus inquiétant. Honeck s’avère sans doute plus convaincant dans l’ultime mouvement, se laissant porter par des pupitres de cordes de tout premier ordre (au début, on les croirait presque doublées par des orgues tant elles irradient !), quitte parfois à faire un peu de surplace. Mais le discours s’avère là aussi convaincant et, même si l’on ne ressent pas la spiritualité que certains chefs savaient y insuffler, on ne peut manquer de saluer cette version qui se hisse à un très haut niveau au sein d’une discographie où les références se bousculent.


Le site de l’Orchestre Altomonte de Saint-Florian
Le site de l’Orchestre philharmonique de Vienne
Le site de l’Orchestre symphonique de Pittsburgh


Sébastien Gauthier

 

 

 

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