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12/04/2020
Anna Clyne : Dance
Edward Elgar : Concerto pour violoncelle en mi mineur, opus 85

Inbal Segev (violoncelle), London Philharmonic Orchestra, Marin Alsop (direction)
Enregistré dans les studios AIR, Lyndhurst Hall, Londres (3-5 septembre 2019) – 54’13
Avie Records AV2419 – Notice (en anglais, allemand et français) de Julian Haylock, Inbal Segev et Anna Clyne


Sélectionné par la rédaction






Actuellement directrice musicale des orchestres symphoniques de Baltimore, de São Paulo et de la Radio de Vienne ainsi que chef principal et programmatrice du Festival de Ravinia (Chicago), Marin Alsop a néanmoins souvent dirigé les grands orchestres anglais, dont l’Orchestre philharmonique de Londres. Elle a eu, ainsi, plusieurs fois l’occasion de travailler en étroite collaboration avec la violoncelliste israélo-américaine Inbal Segev, et, par ailleurs, avec la compositrice britannique Anna Clyne (née en 1980), et c’est elle qui a fini par provoquer la fertile rencontre entre les deux musiciennes. Une entente à deux puis à trois a abouti à la création de Danse (2019) à Santa Cruz en août 2019, très exactement cent ans après la composition du Concerto pour violoncelle d’Edward Elgar (1857-1934), qui, pour cette raison parmi d’autres plus personnelles, se trouve au programme du présent enregistrement. Révélatrice de la complicité fructueuse qui existe entre les trois femmes et les musiciens de l’orchestre, l’interprétation des deux œuvres, intense, chaleureuse et investie, s’avère tout à fait engageante.


Bien que sa célébrité n’atteigne pas encore celle d’une Saariaho, Anna Clyne n’est inconnue ni en Europe ni aux Etats-Unis grâce à son travail en association avec des orchestres tels les orchestres symphoniques de Chicago ou de Baltimore ou encore l’Orchestre national d’Ile-de-France, pour lequel elle a composé This Midnight Hour (2015), pièce énergique et haute en couleur. Elle a gagné le cœur de ses compatriotes en honorant une commande de l’Orchestre symphonique de la BBC pour le concert de clôture des Proms en 2013, et c’est Marin Alsop qui dirigeait le bref Masquerade en ouverture. Commande d’Inbal Segev, Danse est une œuvre d’une autre envergure. Inspirée du poème éponyme du poète Rumi (1207-1273), la structure en cinq parties et leur caractère expressif correspondent aux cinq vers et à leur sens ressenti. D’entrée, le terme «néo-romantique» s’imposerait mais ce serait aller trop vite en besogne, quand bien même la dissonance ne règne pas, car la voix riche et originale qui s’élève dénote une volonté, une maîtrise et une personnalité d’esprit romantique, certes, mais sans nostalgie pour un style ancien.


Danse ne relève pas de la danse proprement dite mais d’élans contenus ou mouvementés qui, suivant le poème, expriment la blessure, la révolte, la désolation, un esprit de rébellion et un apaisement libérateur. S’y entendent quelques réminiscences celtes, mais, écrite pour Segev, Clyne dédie la pièce à son père juif, et des fragrances hébraïques transcendent les thèmes principaux. Les cinq volets contrastés, souvent rhapsodiques, passent d’instants douloureux ou contemplatifs, hymniques ou lyriquement exaltants à des passages trépidants, fougueux, parfois rugueux, où toutes les strates sont en ébullition. Porteur principal des motifs et des phrases mélodiques qui s’épanouissent ou se fragmentent, le violoncelle, actif sur toute sa tessiture, déploie son beau son intense sous l’archet expressif d’Inbal Segev, investie. L’orchestre ornemente à l’occasion les lignes du violoncelle, danse en spirale autour de son chant, procède par blocs d’accords mouvants, joue en quasi-répons avec la soliste ou adopte un rôle de continuo facilité en particulier par le curieux pupitre des bois où dominent les instruments graves: deux piccolos, deux cors anglais, deux clarinettes basses et deux contrebassons.


Composé durant l’été 1919, quand Elgar était encore sous le coup des désastres à répétition de la Première Guerre mondiale, son célèbre Concerto pour violoncelle, à la fois urgent et intime, mélodique et crépusculaire, prend tout son sens sous l’archet d’Inbal Segev qui considère qu’il est, en quelque sorte, un «requiem pour l’humanité». Elle en donne une interprétation puissamment expressive, intériorisée au plus profond, et soutenue en force par l’orchestre, tenu et dirigé de main de maître par Marin Alsop. Cette version trouve bien sa place au cœur d’une discographie pourtant pléthorique qui, en plus de la version maintenant mythique de Jacqueline du Pré, réunit les noms de violoncellistes illustres de Casals, Piatigorsky, Starker, Rostropovitch à Yo-Yo Ma et Truls Mørk – Fournier, Tortelier, Queyras et la jeune Nadège Rochat pour la France. Parue récemment, peu après celle de Segev, la version de Sheku Kanneh-Mason, plus jeune encore et actuellement très en vue, noblesse oblige, pourrait, par conséquent, lui faire de l’ombre, mais l’approche du jeune homme, moins intense, plus mélancolique, et son choix de neuf courtes pièces, sans lien manifeste hormis leur séduction, en complément de programme. devraient donner l’avantage à la version profondément ressentie de Segev, le Philharmonique de Londres au diapason, et à l’attrait, toujours prometteur, d’une partition toute nouvelle d’Anna Clyne.


Une excellente entente à trois avec un orchestre éloquent en soutien fait de la prestation un événement inspiré qui ne peut que convaincre, ce d’autant plus que la prise de son proche capte les sonorités chaleureuses du violoncelle sans nuire à la présence orchestrale.



Le site d’Anna Clyne
Le site d’Inbal Segev
Le site de Marin Alsop


Christine Labroche

 

 

 

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