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11/11/2020
«A Ceremony of Carols»
Benjamin Britten : Venite exultemus Domino [1] – Te Deum en ut majeur [2] – Jubilate Deo en ut majeur [1] – Deus in adjutorium meum intendeA Hymn to the VirginA Hymn of St Columba [2] – Hymn to St Peter, opus 56a [2] – The Sycamore TreeChrist’s Nativity: 2. «Sweet was the song the Virgin sung» – A Ceremony of Carols, opus 28 (arrangement Julius Harrison) – Friday Afternoons, opus 7: 5. «A New Year Carol»
John Ireland : The Holy Boy
Frank Bridge : Music, when soft voices die, H. 37
Gustav Holst : Four Songs, opus 34: 1. «This I have done for my true love», H. 128
Folk Carol (anonyme) : The Holly and the Ivy (arrangement Britten)

Tanya Houghton (harpe), Ashley Chow [1], Eleanor Carter [2] (orgue), Choir of Clare College, Cambridge, Graham Ross (direction)
Enregistré en les églises de All Hallows, Gospel Oak et de St Michael, Highgate, Londres (juin 2019) – 74’
Harmonia Mundi HMM905329 – Notice (en anglais et en français, textes inclus) de Graham Ross





«A Ceremony of Carols»
Judith Weir : Drop down, ye heavens from above
Michael Praetorius : Es ist ein Ros entsprungenResonet in laudibusIn dulci jubiloGeborn ist Gottes SöhnerleinWie schön leuchtet der MorgensternPuer natus in Bethlehem
David Blackwell : Lo, how a rose e’er blooming
Jonathan Dove : The Three Kings
Benjamin Britten : A Ceremony of Carols, opus 28
Dobrinka Tabakova : Good-will to men, and peace on earth
Hildegard von Bingen : O virga ac diadema
TobyYoung : The Owl
Cecilia McDowall : Now may we singen

Lucy Wakeford (harpe) [1], Laurence John (orgue de salon), Choir of the Queen’s College, Oxford, Owen Rees (direction)
Enregistré en l’église de St Michael and All Angels, Oxford (1er-3 juillet 2019) – 62’28
Signum Classics SIGCD627 – Notice (en anglais, textes inclus) d’Owen Rees





Les excellents chœurs de Clare College, Cambridge, et de The Queen’s College, Oxford, présentent chacun un programme de chants de Noël bâti autour du cycle A Ceremony of Carols (1942) de Benjamin Britten (1913-1976). Les deux programmes sont pour chœur a cappella, avec orgue, ou avec harpe, mais ils sont de nature tout à fait différente. Graham Ross reste avec Britten et propose en prélude sept pièces sacrées composées entre 1934 et 1967, trois airs des maîtres admirés du compositeur, Frank Bridge, John Ireland et Gustav Holst, trois noëls, et, en coda, «A New Year Carol», composé à l’origine pour enfants en 1934. Owen Rees propose des noëls de six compositeurs actifs aujourd’hui en alternance avec six chants sacrés de Michael Praetorius (1571-1621) et un seul de Hildegard von Bingen (1098-1179) Ils entourent le cycle de Britten, cinq en ouverture et huit en final. Les deux programmes se justifient parfaitement mais se différencient encore sur le plan de l’expression, les voix d’Oxford tout en finesse épanouie, l’orgue, un orgue de salon, et celles de Cambridge au beau son plus plein, l’orgue, celui de l’une ou l’autre des deux églises, lieux d’enregistrement.



A Ceremony of Carols doit son existence à un recueil de poèmes anciens (XIVe, XVe et XVIe siècles), trouvé au hasard d’un voyage, qui inspira aussitôt à Britten sept des onze chants dans la pure tradition chorale anglaise, relevée de sa touche personnelle. La harpe, instrument accompagnateur d’une ancienne tradition anglaise, les soutient. A la création, la partition, achevée en 1942, se destinait à un chœur de voix de femmes (SSA), mais avant publication, Britten la déclara pour voix de garçons. Le succès fut tel au fil des ans que les éditeurs (Boosey and Hawkes) crurent bon commander à Julius Harrison (1885-1963) une version pour chœur mixte (1955), l’ouvrant ainsi aux nombreuses formations chorales britanniques. Si le chœur oxfordien respecte le souhait du compositeur, quoiqu’avec des voix de femmes peu vibrées, Clare College opte pour la version pour chœur mixte.


Cette version étoffe l’originale sans toucher à l’essentiel de l’écriture de Britten. Les hommes chantent à trois parties, chacune ombrant l’un des trois pupitres aigus sans que ce soit systématiquement le même. Si on prend comme exemple «Balulalow» (Lullaby, 4b), la berceuse couplée à «That yongë child» (4a), l’effet en est tout à fait heureux. Une voix de soprano soliste est suivie puis soutenue tantôt par les ténors et les basses à pupitres divisés, tantôt par les voix élevées, tantôt par le tutti. Les deux chœurs sonnent bien et la préférence entre la pureté cristalline des jeunes étudiantes de The Queen’s College et le son plein et plus fortement coloré du chœur mixte de Clare College ne peut être qu’affaire de goût. Le style de chant s’adapte à la teneur des chaque poème et se fait puissant, allègre, coloré, délicat, fragile ou tendre. Graham Ross tire pleinement partie des couleurs de son chœur mixte pour varier les effets. Owen Rees joue entre intensité et douceur et tire des seules voix élevées des nuances d’une infinie délicatesse.


Britten atteint un merveilleux équilibre entre une écriture résolument moderne, aux fines dissonances et aux frottements harmoniques, une écriture canonique serrée, et de subtils renvois aux sonorités de la musique ancienne accentués par l’ajout en plain-chant a cappella d’une Procession et d’une Recession sur le texte liturgique «Hodie Christus natus est». Ross les confie aux seules voix féminines. Comme prévu par Britten, Rees mobilise ses choristes et leurs voix s’intensifient en Procession et s’évanouissent en Recession. L’écriture du jeune compositeur pour la harpe est un délice de raffinement. La harpe accompagne ou orne les chants (hormis les «Hodie») et assure en solo l’interlude féérique qui vient en septième position. La prestation de Tanya Houghton est peut-être plus incisive que celle de Lucy Wakeford mais les deux interprétations tombent comme des gouttes de pluie d’été sur une forêt fantasque.


Pour les sept pièces sacrées, deux a cappella, cinq avec orgue, Britten manie l’ostinato et le contretemps et met à profit ses connaissances en contrepoint, en écriture canonique et antiphonique, et, dans les compositions plus tardives, ses notions d’hétérophonie. Il varie les effets vocaux en passant d’un chœur à deux, du soliste au quatuor au tutti, et de l’unisson aux pupitres divisés. Le chœur mixte de Clare College rend tout autant justice à l’ampleur de certaines partitions telles Jubilate Deo et St Columba, qu’à la finesse tout en retenue de d’autres telle A Hymn to the Virgin. L’orgue sonne tout au service du chœur, offrant à l’occasion un entraînant ostinato au pédalier. Les trois noëls, aux textes profanes chantés a cappella, «Sweet was the song» par les seules voix de femmes, forment un ensemble mélodique haut en couleur et plein de charme, préparé dans un même esprit par les trois airs de Bridge, Holst et Ireland, bien que Music, when soft voices die ne soit pas à thème christique.


Owen Rees et son chœur s’attaquent à un programme de complément autrement plus complexe mais curieusement, à travers les siècles, de Praetorius (1571-1621) à six compositeurs nés entre 1951 et 1990, les styles des œuvres sélectionnées se rejoignent sans contraste flagrant peut-être grâce à un sujet partagé et à certaines traditions chorales qui se perpétuent, tels le double chœur, certaines techniques d’harmonisation, le canon, l’ostinato, le bourdon harmonique ou les mesures alternées au travers des strates. Seule tranche la tradition des battements de main qui accompagnent Good-will to men de Dobrinka Tabakova (née en 1980). Tous sont pour chœur mixte, certains avec orgue de salon, et la belle puissance épanouie du chœur mixte de The Queen’s College s’élève en un contraste heureux avec l’éthéré des voix féminines avec harpe de la Ceremony of Carols. Les six chants de Noël de Praetorius, si touchants, viennent de ses Musae Sioniae (1605-1610), le plus connu étant sans nul doute «Es ist ein Ros entsprungen» harmonisé en choral pour chœur mixte sur un air populaire, et magnifique dans sa simplicité. Rees propose aussitôt en parallèle le travail ciselé sur le même air de David Blackwell (né en 1961), Lo, how a rose e’er blooming, qui commence et se termine en contrechant harmonisé, sans teneur.


Les deux prestations étant d’un bon niveau, comment choisir entre deux programmes si différents qui s’offrent en même temps? Ensemble ils regorgent de richesses et donnent deux éclairages opposés mais fertiles de la Ceremony of Carols dont on n’épuisera jamais les ressources. Les amateurs de Britten seront les premiers à s’en réjouir.


Le site du Chœur de Clare College
Le site du Chœur de The Queen’s College


Christine Labroche

 

 

 

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