About us / Contact

The Classical Music Network

CD

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

10/12/2020
Johann Sebastian Bach : Variations Goldberg, BWV 988
Lang Lang (piano)
Enregistré en public à Leipzig et en studio à Berlin (mars 2020) – 184’33
Album de quatre disques Deutsche Grammophon 4819701


Sélectionné par la rédaction






Retour à la scène et aux studios après un éloignement forcé du pianiste chinois Lang Lang avec l’«Everest du clavier», les Variations Goldberg.


Depuis que l’on suit la carrière de ce pianiste qui ne laisse pas indifférent, on est passé par tous les stades: depuis l’admiration dans ses années d’apprentissage dont des vidéos nous le montrent dans des classes de maître avec Daniel Barenboim, Christoph Eschenbach et Nikolaus Harnoncourt, excellent musicien à l’intelligence et à la concentration redoutables, jusqu’à l’exaspération la plus complète dans des prestations relevant du chien savant à la virtuosité débridée, jetant allégrement son bonnet de fin musicien par-dessus les moulins du marketing et du succès. Puis l’effet désastreux de ce marketing effréné sur ses apparitions, les produits enregistrés, filmés, les publicités pour Rolex... Est-ce une forme de surmenage ou de culpabilité de tout ce dévoiement qui sont à l’origine de son arrêt forcé de quasiment deux années pour une «tendinite» du bras? Ces problèmes moteurs n’arrivent jamais aux pianistes par hasard...


Mais voici que nous revient reposé et apparemment calmé (pas ses conseillers de marketing cependant) un pianiste de 38 ans paraissant avoir mûri, marié et vivant entre la Chine, Paris et New York, s’attaquant aux Variations Goldberg, le premier grand livre qu’il enregistre, n’ayant gravé jusqu’alors que des pièces isolées dans des anthologies. Et, simplicité oblige, l’édition deluxe à tirage limité en quatre disques que publie Deutsche Grammophon avec une surabondance de photos, certaines plutôt plaisantes, d’autres ridicules dans la tradition du show off de sa première phase, comporte deux jeux de ces ineffables trente variations enregistrées en «studio» mi-mars 2020 dans la Jesus-Christus-Kirche de Berlin et en public lors d’un concert donné dix jours plus tôt dans rien moins que la Thomaskirche de Leipzig, l’église même où le compositeur exerça pendant un quart de siècle la fonction de cantor, la plus importante de sa carrière, et dans laquelle il repose.


Disons d’emblée – on détaillera ensuite pourquoi – que c’est la version en public qui nous paraît la plus intéressante, le pianiste, sans y renoncer à certaines prises de risque, s’y montrant plus spontané quoique prudent et certainement très inspiré par l’acoustique et la symbolique du lieu.


La version de studio a bénéficié de nombreuses prises qui ont ensuite été choisies pour constituer une version «idéale» pour son interprète. L’Aria fait craindre le pire par son parti pris de lenteur, son manque de ressort et la surabondance des ornements qui ralentit sérieusement sa progression. Mais cela s’arrête là, car les variations se déroulent avec des tempi tout à fait disciplinés quoique parfois un peu trop complaisamment ralentis. La splendide captation offre une sonorité constamment brillante, les basses étant parfois un peu surexposées et la virtuosité tout à fait superlative. A certaines variations on pourra trouver un peu de narcissisme dans la recherche de l’effet esthétique («Fughetta», «Canone alla quinta»), à d’autres reprocher d’être un peu trop contemplatives («Canone alla settima») mais à partir de la vingt-septième variation, il revient à des tempi raisonnables. L’Aria finale, totalement déstructurée par la lenteur et les ornements, déséquilibre cet ensemble qui alterne moments de grâce et déceptions.


La version de concert a plongé le pianiste dans un contexte émotionnel intense. Le récit en est beaucoup plus fluide, l’interprète prenant l’Aria avec beaucoup moins de complaisance dans les détails, certes aussi lentement qu’au studio, mais moins encombrée d’ornements. Les tempi sont dans l’ensemble plus allants, plus nobles, et dans certaines («Canone alla terza»), le rythme est quasi ludique. On note constamment beaucoup plus de lisibilité des basses et des notes pointées, moins de rubato et un son plus brillant qu’en studio. La prise de son est miraculeuse compte tenu de la taille de l’édifice et le piano beaucoup moins cliniquement analysé par les micros qu’au studio. Certaines variations («Canone alla settima») sont franchement jubilatoires et il atteint au sublime dans l’Adagio de la vingt-cinquième alors qu’en studio, avec ses plus de 10 minutes de durée, il semblait parfois y perdre le rythme. L’Aria finale est moins distordue qu’en studio mais reste aussi le maillon faible de cet ensemble. A Leipzig, contrairement à Berlin, le musicien a primé sur le pianiste, au grand bénéfice de l’œuvre.


Le site de Lang Lang


Olivier Brunel

 

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com