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11/18/2019
«1717: Memories of a Journey to Italy»
Tomaso Albinoni: Sonata a Violino solo di me Tomaso Albinoni Composta per il Sig: Pisendel: Sonate pour violon et basse continue en si bémol majeur, TalAl So32
Giuseppe Maria Fanfani: Sonate pour violon et basse continue en ré majeur
Giuseppe Valentini: La Montanari. Sonata per Camera a Violino solo, Dedicato al merito impareggiabile del Sig:re Antonio Montanari insigne Sonatore di Violino, Da un suo divato servo ammiratore della sua virtù: Sonate pour violon et basse continue en la majeur
Antonio Montanari: Sonate pour violon et basse continue en mi mineur
Johann Georg Pisendel/Antonio Montanari: Sonate pour violon et basse continue en solmi majeur
Antonio Vivaldi/Johann Georg Pisendel: Sonate pour violon et basse continue en sol majeur, RV 25

Scaramuccia, Javier Lupiánez (violon et direction)
Enregistré en la Oude Dorpskerk de Bunnik, Pays-Bas (5-8 février 2018) – 62’19
Snakewood Editions SCD201801 – Notice (en anglais et en espagnol) de Javier Lupiánez





«Under the Shade of Vivaldi. Venetian Cello Sonatas»
Girolam Bassani: Sonate III en la mineur
Benedetto Marcello: Sonate VI en sol majeur, opus 1 n° 6
Giovanni Benedetto Platti: Sonate I en sol majeur
Antonio Vivaldi: Sonate pour violoncelle solo en si bémol majeur, RV 46
Diogenio Bigaglia: Sonate pour violoncelle en sol majeur
Antonio Vandini: Sonate en la mineur
Antonio Martinelli: Sonate pour violoncelle en ré majeur
Michele Stratico: Sonate pour violoncelle et basse continue en la majeur

Gaetano Nasillo (violoncelle), Anna Fontana (clavecin), Sara Bennici (violoncelle), Evangelina Mascardi (théorbe)
Enregistré au Vereinshaus Peter Mayr Saal de Lengmoos-Klobenstein, Italie (19-22 septembre 2018) – 77’24
Arcana A 465 (distribué par Outhere) – Notice (en anglais, français et italien) de Michael Talbot





«Quattro violini a Venezia»
Marco Uccellini: Sinfonia decima settima a quatro violini – Canzon a 3, 2 violini e violoncino
Giovanni Gabrieli: Canzon II a 6 – Sonata XXI con tre violini
Biagio Marini: Sonata quarta per sonar con due corde – Sonata in Ecco con tre violini – Canzon prima per quattro violini – Capriccio per sonare il violino
Salomone Rossi: Sinfonia a 5 & a 3 si placet – Sonata a quattro violini e doi chitarroni
Giovanni Buonamente: Sonata prima a quatro violini
Giovanni B. Fontana: Sonata 16 a tre violini
Dario Castello: Sonata decima settima in Ecco per due violini et due violin in ecco

Clematis, Stéphanie de Failly et Brice Sailly (direction)
Enregistré en l’église Notre-Dame de Centeilles, Siran (octobre 2018) – 64’35
Ricercar RIC 404 – Notice (en anglais, français et allemand) de Jérôme Lejeune


Sélectionné par la rédaction





La musique vénitienne des XVIIe et XVIIIe siècles ne doit pas être occultée par la seule profusion des concertos et des opéras, même si La Sérénissime offrit un foyer créatif de choix pour tout compositeur un tant soit peu talentueux, les meilleurs ensembles pouvant y jouer à satiété 365 jours par an. Voilà donc trois disques qui viennent fort opportunément illustrer la musique de chambre qui pouvait se donner dans quelque palais ducal, bordant la mer ou quelque canal: une vraie redécouverte!


Le premier disque se distingue immédiatement des deux autres dans la mesure où, même s’il fait escale à Venise, c’est plus largement à un voyage au travers de l’Italie musicale du début du XVIIIe siècle que l’ensemble Scaramuccia nous invite. Et, soyons encore plus précis, plus qu’à un voyage (même si le programme du disque et son titre peuvent le laisser entendre), c’est bien davantage à un hommage à Pisendel qu’il est ici question. Exact contemporain de Bach, Händel et Telemann, Johann Georg Pisendel (1687-1755) est surtout connu pour avoir rejoint l’orchestre de la Cour de Dresde en 1712 et dont il contribua à faire, certes avec d’autres, le meilleur orchestre d’Europe durant une bonne partie du XVIIIe siècle. Comme c’était souvent le cas depuis la redécouverte de la Rome antique et ce qu’on appelait alors «Le grand tour», musiciens, sculpteurs, peintres devaient effectuer un voyage en Italie, généralement d’un an au moins, afin d’y découvrir les maîtres de l’Antiquité et de la Renaissance italienne. Pisendel ne fit pas exception et passa donc une année en Italie, en 1717, au cours de laquelle il rencontra tous les grands musiciens de la péninsule et, surtout, au cours de laquelle il recopia et amassa quantité de partitions qu’il rapporta à Dresde. C’est principalement par ce biais que Dresde détient aujourd’hui le plus important fonds de partitions de Vivaldi avec la Bibliothèque de Turin! Ce disque rassemble donc, outre une composition de Pisendel lui-même, cinq sonates pour violon, violoncelle et clavecin, dues aux vénitiens Albinoni et Vivaldi, au florentin Fanfani ainsi qu’aux romains Montanari et Valentini: le résultat est enthousiasmant. Javier Lupiánez, également auteur de la notice (extrêmement riche), fait montre de qualités au violon qui sont à même de rappeler que Pisendel fut un des plus grands violonistes de son temps, ce qui contribua sans aucun doute à ce qu’il soit le dédicataire de plusieurs œuvres de la part de maints compositeurs. Tel est par exemple le cas de cette sonate d’Albinoni, très rythmée, qui bénéficie notamment d’un premier Allegro assez imaginatif, l’accélération couplée à une hausse du volume de l’ensemble (à partir de 1’28) produisant un effet assez saisissant. Même si les noms des compositeurs présents sur ce disque sont assez peu connus, ne négligeons là ni Fanfani (le Tempo giusto concluant sa sonate étant facétieux à souhait grâce tant au beau jeu piqué du violon qu’aux originalités du clavecin), ni Valentini (écoutez ce deuxième mouvement, Allemanda, Allegro, aux véritables dégoulinures violonistiques...!), et encore moins Antonio Maria Montanari, dont le Largo inaugurant sa sonate débute lui-même par un très étrange unisson entre le violon et le clavecin de nouveau. Pisendel était réputé pour être un virtuose au violon: sa sonate, et plus particulièrement son Allegro ma non tanto témoigne effectivement de ce qu’il était capable de composer et de jouer! Si l’on peine quelque peu (hormis peut-être dans le troisième mouvement) à reconnaître le style de Vivaldi dans la Sonate RV 25, il aurait été injuste de ne pas conclure ce tour d’horizon par ce proche ami de Pisendel, à qui il dédia un certain nombre de concertos (voir ici). Inès Salinas au violoncelle et Patrícia Vintém au clavecin participent pleinement de la réussite de ce disque emmené par Javier Lupiánez, dont le jeu violonistique appelle évidemment les plus vifs éloges.


Le disque suivant met cette fois-ci à l’honneur le violoncelle dont, nous rappelle Michael Talbot dans la notice (toujours instructive lorsqu’elle est de sa plume), l’essor au XVIIIe siècle vient de ce que les compositeurs ont alors pleinement pris conscience des potentialités de cet instrument qui se cantonnait, jusque-là, à son rôle de basse continue. Gaetano Nasillo, sans doute l’un des meilleurs violoncellistes baroques du moment (jouant régulièrement avec des ensembles tels que Zefiro ou Gli Incogniti), a souhaité illustrer cet engouement au fil de huit sonates de compositeurs dont les noms, pour la plupart d’entre eux, restent aujourd’hui confidentiels: qui connaît Diogenio Bigaglia (pleinement vénitien puisque né à Murano et mort à Venise)? Qui a entendu parler de Michele Stratico? Lequel d’entre nous possède un disque d’œuvres d’Antonio Vandini? Le jeu extrêmement varié de Nasillo s’adapte à chaque œuvre avec une vraie délectation alliant finesse et, parfois, côté râpeux (le premier Allegro de la sonate de Martinelli). Ne vous fiez donc pas à la peinture de Longhi qui illustre la couverture du disque: tout n’est pas que finesse diaphane ici! Passant ainsi du dialogue avec le second violoncelle (très bel Allegro de la sonate de Bassani à partir notamment de 1’14 et non moins agréable premier Allegro chez Marcello, qui ne doit évidemment pas être réduit à son seul Concerto pour hautbois alors qu’il a laissé notamment deux recueils de sonates pour violoncelle vers 1732 et 1734) à un rôle de pur soliste (Platti), le violoncelle chante à qui mieux mieux, explorant toutes les potentialités de l’instrument avec une évidente gourmandise. Il est ainsi très intéressant de voir comment certains compositeurs ont exploité à fond le registre grave du violoncelle (troisième mouvement de la sonate de Vivaldi) alors que d’autres, peu ou prou à la même époque, ont poussé ce nouvel instrument dans ses retranchements les plus aigus (l’Allegro de la sonate de Vandini), l’archet de Nasillo œuvrant avec la même souplesse et un soin égal. Ne passons pas sous silence ses trois acolytes, bien connus, au moins pour la géniale claveciniste Anna Fontana, un des piliers de l’ensemble Gli Incogniti. L’imagination de son jeu, la puissance de son inspiration et la fougue de son toucher (quel volontarisme dans l’Allegro précité de Bassani!) témoignent une fois encore de toute l’étendue de sa sensibilité musicale. Sara Bennici pourrait s’en tenir à un rôle de simple faire-valoir, puisque jouant également du violoncelle et donc, étant forcément reléguée au second plan derrière Gaetano Nasillo: il n’en est rien. Outre le fait, comme on l’a vu, que le second violoncelle est souvent requis pour dialoguer au premier plan avec le soliste, ses sonorités contribuent grandement à soutenir l’ensemble. Idem bien entendu pour le théorbe d’Evangelina Mascardi qui, lui aussi, sait chanter lorsque cela s’avère nécessaire (l’Allegro conclusif de la sonate de Platti).


Passons enfin du violoncelle au violon ou, pour être plus exact, aux violons avec ce disque de l’Ensemble Clematis, qui a choisi d’explorer le répertoire vénitien dévolu aux ensembles de violons durant la première moitié du XVIIe siècle. Léger retour chronologique donc, à une époque où le violon commença à apparaître en tant que tel et dont l’étoile allait s’imposer jusqu’à nos jours: nous renvoyons à ce titre à l’exhaustif travail de Jérôme Lejeune, auteur d’une notice d’accompagnement là encore tout à fait remarquable. Sous la houlette de la violoniste Stéphanie de Failly et du claveciniste Brice Sailly, Clematis nous plonge dans cette période charnière (fin XVIe-début XVIIe) où les sonorités empruntent encore au siècle précédent à l’image de cette Canzon II a 6 du célèbre Gabrieli, l’introduction dévolue à l’orgue lui conférant un petit côté archaïque où la polyphonie, bien présente dans ses accents et son côté vertical, se mêle au style légèrement concertant du violon. Plusieurs autres pièces, dues là aussi à des compositeurs dont les noms nous sont peu familiers (Biagio Marini, Marco Uccellini, Dario Castello ou Salomone Rossi), font éclore de nouvelles sonorités que l’on connaît en revanche pour les avoir entendues chez Monteverdi ou chez Locatelli (les deux Allegro de la première pièce d’Uccellini). Les formes, avec le temps, sont moins figées, le violon prend ses aises, le jeu entre les solistes et le reste de l’orchestre se fait plus imaginatif et l’ensemble gagne en liberté. C’est ce que l’on ressent en écoutant par exemple ce magnifique jeu d’échos entre le violon solo et deux autres violons (les trois accompagnés par une basse continue extrêmement présente) dans la Sonata in Ecco de Biagio Marini ou, à partir de 5’35, dans la sonate de Giovanni Buonamente où les instruments deviennent tout d’un coup dansants et chatoyants, rompant ainsi avec la réserve qui s’était précédemment instaurée. Si plusieurs pièces sont dignes d’intérêt (prêtez par exemple attention à la basse continue, notamment au duo harpe-théorbe, dans la Sonata XXI con tre violini de Gabrieli, qui prend le premier rôle au détriment des solistes), c’est peut-être cette sonate de Dario Castello qui nous aura le plus marqué par son originalité, son foisonnement et la perfection de son interprétation: à n’en pas douter, voici un disque important pour comprendre une époque charnière dont les effets se ressentiront sur tout le reste de la période baroque.


Le site de l’ensemble Scaramuccia
Le site de Javier Lupiánez
Le site de Gaetano Nasillo
Le site de l’Ensemble Clematis


Sébastien Gauthier

 

 

 

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