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07/14/2016
«Evensong Live 2015»
Thomas Tallis : Loquebantur variis linguis – Videte miraculum
Robert Parsons : Ave Maria
Giles Swayne : Magnificat I, opus 33
Henryk Górecki : Totus tuus, opus 60
Francis Poulenc : Quatre Motets pour le temps de Noël, FP 152
Felix Mendelssohn : Hear my prayer, WoO 15
C. Hubert Parry : Hear my words, ye people
Ralph Vaughan Williams : Five Mystical Songs: 5. «Antiphon» (*)
Jehan Alain : Litanies, pour orgue, AWV 100, opus 79 (*)

Tom Pickard (soprano), Daniel D’Souza (baryton), Choir of King’s College, Cambridge, Douglas Tang, Tom Etheridge (*) (orgue), Stephen Cleobury (direction)
Enregistré en la chapelle de King’s College, Cambridge (mai 2013 et mars 2014) – 78’26
King’s College KGS0011 (distribué par Harmonia mundi) – Notice en anglais de Henry Hawkesworth (textes inclus)





«Evensong Live 2016»
C. Hubert Parry : Six Songs of Farewell: 5. «At the round earth’s imagined corners»
Charles Villiers Stanford : Services in G major, opus 81: Evening Service: Magnificat [1]
Ralph Vaughan Williams : Valiant for Truth
William Walton : Jubilate Deo [2]
Henry Purcell : Jehova, quam multi sunt hostes mei, Z. 135 [3]
Orlando Gibbons : This is the record of John [3]
Christopher Tye : Laudate nomen Domini
Kenneth Leighton : Crucifixus pro nobis, opus 38: 6. «Drop, drop, slow tears»
Michael Tippett : Magnificat and Nunc dimittis «Collegium sancti Johannis Cantabrigiense»
Olivier Messiaen : O sacrum convivium
Herbert Howells : Magnificat and Nunc dimittis «Gloucester»: Magnificat – Te Deum and Jubilate «Collegium regale»: Te Deum
George Benjamin : ‘Twas in the year that King Uzziah died [4]
Francis Grier : Lit by holy fire: 6. «Magnificamus»
Judith Weir : Vertue

Tom Hopkins [1], Tom Pickard [2] (sopranos), Benjamin Sheen (alto), Daniel Lewis [2], Toby Ward [4], Joel Williams [3] (ténors), Henry Hawkesworth (basse-baryton), Choir of King’s College, Cambridge, Tom Etheridge (orgue), Douglas Tang [3] (orgue), Stephen Cleobury, Tom Etheridge [3] (direction)
Enregistré en la chapelle de King’s College, Cambridge (mai 2014 et mai 2015) – 73’02
King’s College KGS0015 (distribué par Harmonia mundi)





Pour la première fois en 2015, l’Ecole des choristes de King’s College a édité sous son propre label une sélection de morceaux interprétés au cours de l’office des vêpres (evensong) au fil des douze mois précédents, tous captés grâce à un système d’enregistrement sophistiqué et discret installé en permanence en la chapelle, qui rend compte des offices et des concerts, dont certains sont destinés à une diffusion en direct par la BBC. Stephen Cleobury, directeur musical, fit le choix final qu’il estime représentatif du travail d’excellence des quatre pupitres sur toute une année. Les styles se divisent entre la tradition chorale du XVIe siècle et son écho en évolution au siècle dernier avec entre les deux le célèbre Seigneur, écoute ma prière de Mendelssohn. Créée à Londres en 1845 sur le Psaume LV dans l’adaptation versifiée de son ami William Bartholomew, l’œuvre reste très prisée Outre-Manche, le solo de soprano échéant très souvent à la voix séraphique d’un jeune choriste, comme c’est ici le cas.


Thomas Tallis (c. 1505-1585) et Robert Parsons (1535-1572), choristes à la Chapelle royale dès leur jeune âge, font partie de ceux qui ont contribué à asseoir la tradition chorale anglaise au XVIe siècle malgré les dissensions d’ordre religieux. Les compositeurs alternaient alors un sobre plain-chant et des textures complexes aux pupitres divisés. Loquebantur variis linguis sans soprano est à sept parties au contrepoint dense mais lumineux. Videte miraculum, à six parties hormis le plain-chant, s’écoule plus posément, le chœur d’hommes formant un riche socle irisé qui porte haut les voix flûtées des garçons. Le chœur de King’s, nettement rompu au genre, défend les deux œuvres avec rigueur et souplesse avant de filer le délicat Ave Maria à cinq parties de Parsons, créant un merveilleux sentiment d’espace aéré.


Les chœurs britanniques ont souvent à leur répertoire des pages de Hubert Parry (1848-1918) et de Ralph Vaughan Williams (1872-1958). Un chœur d’amateurs expérimentés peut aborder Hear my words, ye people (1894), splendeur idiomatique dans un style encore en partie germanique à laquelle les interprètes de King’s rendent pleinement justice, la seule entorse minime à la partition étant que tous les soprani chantent la partie destinée à un(e) soliste. Capté dans l’espace des lieux, l’orgue de Douglas Tang sonne dans toute sa plénitude pour Parry comme pour le cinquième des Chants mystiques que Vaughan Williams composa entre 1906 et 1911 sur des vers de George Herbert, poète élisabéthain. «Antiphon» est un chant de louange éclatant, véritable hymne à la joie dans un style très personnel, harmoniquement fluctuant et nuancé, qui fait fréquemment appel au registre élevé de chaque pupitre. Le chœur de King’s en relève le défi avec aplomb.


Francis Poulenc (1899-1966) et Jehan Alain (1911-1940) lancent le XXe siècle, Poulenc par ses limpides Motets pour le temps de Noël (1951) si touchants, interprétés ici avec beaucoup de fraîcheur, et Alain par les Litanies de 1937 qui, sous les doigts de Tom Etheridge, gagnent progressivement le statut de «conjuration ardente»» sinon de la «bourrasque irrésistible» préconisées par le compositeur. Au cœur de ce programme, les compositions de Henryk Górecki (1933-2010) et de Giles Swayne (né en 1946) frappent par leur différence. La beauté diaphane de Totus tuus (1987) aux harmonies rapprochées convient bien à la pureté des timbres des quatre pupitres en homophonie, cette forme sublime de minimalisme sacré satinant jusques au registre aigu des jeunes soprani. Swayne avoue avoir composé son premier Magnificat sous influence africaine: celle des Diola du Sénégal pour les attaques abruptes et les syllabes détachées et celle des Pygmées pour les strates polyrythmiques. La mise en place délicate des huit parties exige certainement beaucoup des choristes mais ils s’y donnent avec enthousiasme et le résultat est étonnant de précision et d’originalité.


Pour Stephen Cleobury, directeur musical depuis 1982, la seconde édition d’«Evensong Live» est un nouvel instantané du chœur à un moment précis. Effectivement, les voix aiguës sont pour la plupart celles de jeunes boursiers de l’école des choristes de King’s College et les voix graves celles d’étudiants à l’université, comme le sont les deux organistes. Si le niveau d’excellence est toujours atteint, les membres du chœur se renouvellent en partie tous les ans, ce qui est particulièrement sensible au niveau des jeunes solistes toujours sortis des rangs. Le répertoire du chœur est universel mais à dominance britannique, comme le démontrent les prestations retenues pour l’édition 2016. Olivier Messiaen représente le seul trait extérieur, avec son unique œuvre directement liturgique, O sacrum convivium (1937). Le chœur en épouse bien la fine homophonie et en révèlent la douce force limpide.


Les œuvres de la sélection, principalement composées pour la liturgie anglicane, comprennent six pièces directement destinées à l’office des vêpres et écrites à l’intention de l’une des chapelles des universités d’Oxford et de Cambridge où la plupart de compositeurs, hormis les anciens, ont suivi une formation musicale de choriste, d’organiste ou de compositeur. C’est notamment le cas de George Benjamin (né en 1960), dont le remarquable ‘Twas in the year that King Uzziah died fut écrit pour King’s pendant ses études à Cambridge. L’hymne laisse deviner toute l’originalité du compositeur à venir, le beau solo de ténor annonçant certaines pages de ses opéras. Un vent nouveau souffle selon les époques et les fortes empreintes personnelles, mais ces pièces liturgiques gardent des points communs qu’elles soient les Magnificat, Nunc dimittis ou Te Deum de Charles Villiers Stanford (1852-1924) en 1904, de Herbert Howells (1892-1983) en 1946 et 1944, ou de l’aventureux Michael Tippett (1905-1998) en 1962, ou encore le Jubilate (1972) éclatant de William Walton (1902-1958) et jusques au «Magnificamus» syllabique de Francis Grier (né en 1955). «Magnificamus», au large ambitus finement coloré, est en fait le dernier volet, de l’office de vêpres, Lit by holy fire (2014) composée pour King’s College où Grier fut étudiant et organiste (organ scholar).


Sur des textes bibliques, dramatisés entre chœur, solistes et contrechants, viennent les motets de Christopher Tye (1505-1572) en 1553, d’Orlando Gibbons (1583-1625) en 1612 et la splendeur de l’hymne Jehova, quam multi sunt (vers 1680) de Henry Purcell (1659-1695), qui annonce le baroque naissant. Les deux premiers, versés dans l’art de la polyphonie, privilégient ici l’harmonie à quatre parties alors que Purcell inclut des passages polyphoniques harmoniquement audacieux. Hubert Parry, Kenneth Leighton (1929-1988) et Judith Weir (née en 1954) les rejoignent par un choix de poèmes élisabéthains touchés par la mélancolie. «At the round earth’s imagined corners» (1916-1918) est riche en harmonies et en contrepoint, la beauté sombre de «Drop, drop, slow tears» (1961) plus largement homophonique comme le tendre Vertue (2005) aux pupitres divisés. Valiant for Truth (1940) reste à part par le choix de texte: Vaughan Williams reprend une tirade de Pilgrim’s Progress de John Bunyan, le prélude et les liaisons alloués à de touchantes voix d’altos avant les subtiles harmonies modales du chœur.


Sous la direction rigoureusement précise de Stephen Cleobury, les prestations soignées du chœur de King’s College, a cappella ou avec orgue, allient l’intelligence à la sensibilité. Le chœur et les solistes s’adaptent avec adresse aux climats changeants de ces pages limpides ou tumultueuses. Il s’agit de musique sacrée destinée à la liturgie, merveilleusement interprétée au cours des offices par un chœur jeune, mais en majorité, les pièces trouveraient leur place au concert.


Le site de Stephen Cleobury
Le site du Chœur de King’s College


Christine Labroche

 

 

 

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