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09/06/2015
«The Sound of the 20s»
Ernest Bloch : Sonate pour violon et piano n° 1
Maurice Ravel : Sonate pour violon et piano n° 2, en sol majeur
Jacques-Alphonse De Zeegant : Duo pour violon et piano «Souvenirs d’Espagne»
Georges Enesco : Sonate pour violon et piano n° 3, en la mineur, «Dans le caractère populaire roumain», opus 25

Stefan Tarara (violon), Lora Vakova-Tarara (piano)
Enregistré à Wuppertal (10-12 mars 2015) – 78’46
Hybrid SACD Ars Produktion Ars 38 179 – Notice (propos de Stefan Tarara recueillis par Sarah Grossert) en allemand et en anglais


 Sélectionné par la rédaction





Pour représenter «le son des années 1920», Stefan Tarara (né en 1986) et Lora Vakova-Tarara (née en 1990) ont choisi trois sonates pour violon et piano parmi les plus belles de l’entre-deux-guerres, les trois d’une profonde originalité. La Première Sonate d’Ernest Bloch (1880-1859) date de 1920. Maurice Ravel (1875-1937) composa sa Seconde Sonate entre 1922 et 1927 et Georges Enesco (1881-1955) sa Troisième Sonate en 1926. Les trois renouent avec la forme classique en trois mouvements, celles de Bloch et d’Enesco marquées par un fort caractère rhapsodique aux teintes hébraïques ou roumaines, celle de Ravel parfois aux accents de jazz, les trois, dans un sens, novatrices et pionnières. Malgré une difficulté d’exécution redoutable, le jeune duo bulgaro-allemand s’y lance avec passion, ce qui convient en particulier à la rage concentrée et intense de la Sonate de Bloch, tandis que leur entente évidente permet un phrasé parfaitement orchestré créant à l’occasion une impression d’improvisation spontanée souhaitable lors de certains passages des sonates d’Enesco et de Ravel.


Lors de la composition de l’impressionnante Première Sonate en 1920, Bloch était directeur de l’Institut musical de Cleveland aux Etats-Unis. Il annonça une «œuvre tourmentée, écrite peu après la terrible guerre et la terrible paix». La révolte noire du premier mouvement déferle avec une violence âpre et dure ouvrant sur l’amertume et l’agitation sous-jacente du deuxième mouvement qui transforment son expressivité Molto quieto en un idéal inaccessible. Une marche implacable en crescendo de puissance lance le finale qui revient sur la rage noire initiale avant d’esquisser un semblant de paix ou de résignation intime. Portés par un piano ombrageux, fortement coloré et souvent percussif, le timbre charnu du violon de Tarara, la souplesse de sa variété d’archet et le quasi-legato naturel de son style développent à bon escient la noirceur rhapsodique aux accents hébraïques de cette partition visionnaire.


Georges Enesco et Ravel lui-même créèrent en 1927 la Seconde Sonate si justement célèbre. Le piano de Vakova comme le violon de Tarara traduisent avec art la fine délicatesse transparente de l’éloquent premier mouvement. Sensibles à l’esprit et à la poésie syncopée du Blues, naturel et spontané sous leurs doigts même aux instants les plus contrastés, ils évitent le caractère heurté de certaines interprétations, les timbres du violon assumant dans le flux des allures de banjo ou plus lyriquement de saxophone fantasque. Tarara se lance ensuite dans un Perpetuum mobile léger, élégant et éblouissant. Lora Vakova suit son envol en faisant vivre au diapason les camaïeux plus terrestres d’un paysage fragmenté, pur génie ravélien.


Après la perfection de la prestation de Georges Enesco et de Dinu Lipatti, la conviction de celle de Yehudi Menuhin et de sa sœur Hephzibah et l’éclairage d’une vingtaine d’interprétations au fil des ans, la jeune génération s’intéresse à son tour à la fertile Troisième Sonate d’Enesco, qui présente un alliage subtil entre une structure classique et le «caractère populaire roumain» dans un langage richement harmonique qui invite l’hétérophonie, la microtonalité et les traits instrumentaux tziganes jusqu’à l’évocation d’un taraf. Nurit Stark et Cédric Pescia en donnent une interprétation d’une généreuse souplesse, Lorenzo Gatto et Milos Popovic en accusent l’inspiration populaire à deux visages. Dans les deux premiers mouvements, la prestation sensible de Stefan Tarara et Lora Vakova se teinte d’un romantisme délicat, les traits rapides ou langoureux en dessinant avec finesse la mélancolie douloureuse. Le troisième mouvement, vital et intense, vient en brûlant contraste, les couleurs vibrantes, les rythmes vertigineux, le violon ensorceleur et le piano brillant. Leur interprétation sonde la profondeur de cette œuvre d’exception.


Loin des années 1920, comme un supplément en clin d’œil à un ami, les deux jeunes musiciens proposent le bref Duo pour violon et piano (2007) de Jacques-Alphonse de Zeegant (né en 1955). C’est une évocation des hauts-plateaux espagnols dans un style classique solide et discrètement hispanisant.


La prise de son ample, chambriste et claire respecte l’équilibre entre les deux instruments. C’est un atout car les différentes versions de ces trois prodigieuses sonates abondent et les mélomanes auront leur préférence pour chacune. Toutefois, la valeur de ce riche programme, c’est de les avoir réunies avec succès dans une interprétation intense, virtuose et ressentie.


Le site de Stefan Tarara

Christine Labroche

 

 

 

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