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12/30/2014
Wolfgang Amadeus Mozart : Symphonies n° 29 en la majeur, K. 186a [201], et n° 35 en ré majeur «Haffner», K. 385 – Concerto pour piano et orchestre n° 19 en fa majeur K. 459
Maurizio Pollini (piano), Wiener Philharmoniker, Karl Böhm (direction)
Enregistré en public au Kleines Festspielhaus de Salzbourg (30 août 1980) – 79’07
Orfeo C 891 141 B – Notice bilingue de Gottfried Kraus (allemand et anglais)





Ludwig van Beethoven : Die Geschöpfe des Prometheus, opus 43: Ouverture
Arnold Schönberg : A Survivor from Warsaw, opus 46
Igor Stravinsky : L’Oiseau de feu: Suite n° 2
Serge Prokofiev : Roméo et Juliette, Suite n° 1, opus 64 bis: La Mort de Tybalt
Modeste Moussorgski : Une nuit sur le Mont chauve (*)

Maximilian Schell (récitant), Jeunesse-Chor Wien, Gustav Mahler Jugendorchester (*), European Community Youth Orchestra, Claudio Abbado (direction)
Enregistré en public à la Felsenreitschule, Salzbourg (13 août 1979 et 29 juillet 1994 [*]) – 53’41
Orfeo C 892 141 B – Notice bilingue de Gottfried Kraus (allemand et anglais)





Le festival de Salzbourg continue, grâce à plusieurs éditeurs, de distiller ses archives, permettant ainsi à l’auditeur d’aujourd’hui de revivre les grandes heures passées où officiaient quelques noms devenus légendaires. C’est bien sûr le cas de Karl Böhm (1894-1981), qui a débuté au festival lors d’un concert donné le 17 juillet 1940 à la tête des Wiener Philharmoniker, où figuraient au programme Jerger, Mozart et Tchaïkovski.


De 1940 à 1981, Böhm aura été l’un des piliers du festival, y apparaissant même sans discontinuer de 1953 à 1980, année précédant celle de son décès, y donnant de nombreux opéras (R. Strauss, Mozart et Berg, pour Wozzeck, se taillant la part du lion) ainsi que pas moins de 53 concerts (dont 41 à la tête de ses chers Wiener Philharmoniker!), les autres ayant permis au grand chef de diriger les Berliner Philharmoniker (quatre fois), la Staatskapelle de Dresde (quatre fois), la Philharmonie tchèque (deux fois) et le London Symphony (deux fois également). Au sein des programmations ainsi données, les œuvres de Mozart figuraient en bonne place, de l’Ouverture du Directeur de théâtre à la Serenata notturna, de la Symphonie n° 10 au Concerto pour deux pianos... S’il conduisit notamment la Trente-quatrième Symphonie à quatre reprises, il ne dirigea la Vingt-neuvième que deux fois (le 15 août 1972 et lors du présent concert) et, en revanche, la Haffner à cinq reprises: le 21 août 1942, le 31 juillet 1955, le 21 août 1956, le 5 août 1973 et lors du concert du présent disque, la toute dernière apparition de Böhm au festival de Salzbourg (au cours de l’édition 1980, outre Idoménée, Böhm avait dirigé une première fois le Philharmonique de Vienne, le 17 août, dans un concert associant les Deuxième et Septième Symphonies de Beethoven).


Caractéristique que l’on peut percevoir chez de nombreux grands chefs au soir de leur vie, Böhm dirige là avec une évidente liberté, se laissant porter par le seul discours musical et retrouvant une forme de spontanéité qu’il n’avait pas forcément toujours eue par le passé. Si l’Allegro moderato de la Vingt-neuvième frappe par sa lenteur et laisse augurer d’une interprétation plus que poussive, c’est ensuite surtout la finesse des cordes viennoises qui surprend, cette fois-ci dans le meilleur sens du terme. Il suffit d’écouter leur jeu à 4’15 ou l’entrée des cors à 7’25 dans l’Andante pour se rendre à l’évidence que Vienne est décidément insurpassable dans ce répertoire. Quant à l’Allegro con spirito conclusif, on n’y entend ni bondissement, ni excès mais bien davantage une légèreté souveraine, caractéristique d’un grand style aujourd’hui en partie révolu. Il en va de même pour la Trente-cinquième dont l’Allegro con spirito inaugural se caractérise par un magnifique sens de l’articulation et un tempo assez allant. On remarquera néanmoins que, alors qu’à la même époque Böhm et les Wiener gravaient ces deux symphonies pour Deutsche Grammophon, l’Andante dure ici 1’46 de plus qu’au disque, les tempi étant en revanche, et pour chaque autre mouvement, les mêmes à quelques secondes près. Quant au Finale (Presto), il bénéficie d’une belle énergie, l’orchestre étant impérial dans la finition.


Lorsqu’il dirige le Dix-neuvième Concerto de Mozart, ce n’est que la deuxième fois (et ce sera donc la dernière) que Böhm rencontre Maurizio Pollini au festival de Salzbourg, leur premier concert remontant au 1er août 1977, au cours duquel ils avaient donné ensemble le Vingt-troisième. Le pianiste italien faisait déjà figure d’habitué du festival, lui qui y avait débuté en août 1973 par un concert le 19 (le Second Concerto de Chopin, Claudio Abbado dirigeant alors le Philharmonique de Vienne) et un récital consacré à Beethoven, le 20. Ici, on est tout de suite entraîné par une atmosphère résolument chambriste (là encore, quelle finesse chez les cordes viennoises!) où toute virtuosité a disparu: tout n’est que simplicité du discours, fluidité du jeu de Pollini, évidence du dialogue entre le soliste et l’orchestre. Dans l’Allegro assai, le jeu se veut plus espiègle et, rendons-nous à l’évidence, cela fonctionne idéalement entre le pianiste et le chef, de presque cinquante ans son aîné.


Le second disque d’archives du festival de Salzbourg nous permet de saluer une nouvelle fois la mémoire de Claudio Abbado, disparu voilà près d’un an (voir ici). Lui aussi fut un participant assidu au festival depuis ses débuts, le 14 août 1965, à l’invitation de Herbert von Karajan, où il avait donné la Deuxième Symphonie de Mahler. Ayant dirigé 7 opéras et 65 concerts (dont 24 à la tête des Wiener Philharmoniker et 18 des Berliner) jusqu’à sa dernière apparition en 2012 pour un concert dédié à Mozart et Schubert, Abbado aura lui aussi, sans conteste, marqué le festival de son empreinte. Ce disque nous permet d’entendre des extraits de deux concerts donnés à la tête de l’Orchestre de jeunes de la Communauté européenne (qui joua de nouveau au festival de Salzbourg l’année suivante, le 12 août 1980, sous la direction de Karajan, et le 17 août 1994, cette fois-ci sous la baguette de Carlo Maria Giulini dans un concert entièrement consacré à Johannes Brahms, avec les Deuxième et Quatrième Symphonies) puis de l’Orchestre des jeunes Gustav Mahler, phalange qu’Abbado avait dirigée pour la première fois à Salzbourg le 12 août 1988 dans la Troisième Symphonie de Mahler avec Jessye Norman en soliste.


Ce disque nous offre un programme typiquement «abbadien», pourrait-on dire, tant les compositeurs au programme sont attachés au nom du grand chef italien. On ne pourra d’ailleurs que regretter de ne pas trouver l’intégralité du programme du concert de 1979, où était également donné le Quatrième Concerto de Beethoven avec... Pollini en soliste! Pour autant, on ne boudera pas son plaisir en écoutant Beethoven puis Stravinsky en passant par Schönberg et Prokofiev. Sans doute galvanisé par son chef, l’orchestre de jeunes musiciens ne souffre aucun reproche du point de vue technique; tout au plus peut-on trouver son jeu parfois un peu impersonnel comme dans la Deuxième Suite de L’Oiseau de feu, qui n’en remporte pas moins les suffrages enthousiastes du public, à l’instar d’une fracassante «Mort de Tybalt». La déception de ce disque viendra davantage d’Une nuit sur le Mont chauve, qui manque de folie, contrairement à ce que l’on a pu entendre dans un mémorable concert des Berliner donné au Japon en 1992. Ce concert, qui associait plusieurs extraits de l’œuvre du compositeur russe à L’Empereur (Evgueni Kissin en soliste), n’en demeure pas moins emblématique de l’attachement qu’Abbado éprouvait à son égard: si besoin était, ce disque vient opportunément nous le rappeler.


Sébastien Gauthier

 

 

 

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