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06/01/1999
Frédéric Chopin : Polonaise en Do bémol mineur, Impromptu en Sol bémol, Barcarolle, Nocturnes op. 27, Trois Valses, Dix Mazurkas ; Alexander Scriabine : Sonate n°3, 4 et 9, Second mouvement de la Sonate n°2, Trois préludes, Poèmes op. 32 et 72 (" Vers la flamme "), Etude n°3, Danses op. 73

Vladimir Sofronitsky (piano)
Philips 456 970-2 (2 CD) (Collection " Grands pianistes du XXe siècle ")

"J'ai toujours été intéressé par les fous". Le jeu de Sofronitsky évoque toujours cette étonnante entrée en matière du médecin, lorsqu'il rencontre le Consul dans Au-dessus du volcan, le chef d'oeuvre de Malcom Lowry. Sofronitsky est un pianiste excessif et prodigieusement inspiré, qui semble bien pouvoir aspirer à être sur la short list des plus grands pianistes de ce siècle. D'un point de vue purement pianistique, le jeu de Sofronitsky se caractérise par une patte plutôt aérienne, une sonorité de velours, et pourtant une grande âpreté des attaques, souvent très directes et très rudes. Ses interprétations sont d'une grande rugosité. C'est parfois très sec, d'autres fois très suave, et en tout cas jamais comme on s'y attend. La qualité des enregistrements n'est pas extraordinaire, ni les pianos joués, mais cela ne gâche en rien l'immense plaisir que l'on a à l'écouter. Le répertoire choisi ici se limite à Scriabine et Chopin, ses deux compositeurs de prédilection. On peut regretter l'absence de Schumann, dont il est aussi un interprète génial et intense (ses Kreisleriana !). Sofronitsky rend la musique complexe et parfois statique de Scriabine évidente et poétique. Sa Troisième Sonate est une merveille. Maître de la tension émotionnelle, il joue avec une intériorité que possèdent peu de pianistes. Il n'est pas très étonnant qu'il fût attiré par Scriabine, qui était un compositeur mystique, ou par Chopin, qui s'exprimait avec une extrême pudeur. Etant considéré comme une référence absolue dans Scriabine, il est presque inutile de faire la publicité de ses interprétations. L'excellence de son Chopin est peut-être moins connue. Le Nocturne en do mineur de Chopin est joué avec une intériorité inouïe. Ses Mazurkas semblent également un must absolu dans ce répertoire. Sofronitsly semble véritablement en être le compositeur, ce qui lui permet de les jouer comme s'il les improvisait, en prenant toutes les libertés. C'est extraordinaire. Vraiment. Un indispensable de la collection.


Stéphan Vincent-Lancrin

 

 

 

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