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03/22/2014
Johann Sebastian Bach : Die Kunst der Fuge, BWV 1080

Cédric Pescia (piano)
Enregistré au Studio Teldex, Berlin (18-19 juin 2013) – 99’16
Double album Aeon AECD 13333 (distribué par Outhere) – Notice de présentation en français et anglais





Sélectionné par la rédaction


Que ce soit avec Schumann, Beethoven, Cage, Busoni ou Enescu, les albums de Cédric Pescia (né en 1976) ont toujours intéressé. Son dernier disque, consacré à L’Art de la fugue, est un coup de maître. Bien épaulé par la beauté de la prise de son qui rehausse la richesse de toucher et la profondeur de frappe du pianiste franco-suisse, ce dernier réalise la quadrature du cercle entre perfection formelle et influx émotionnel, authenticité et modernité.


Dans la notice, Philippe Albèra en fournit une explication: «les versions pour piano de L’Art de la fugue sont évidemment anachroniques. Mais telle est la force de l’écriture chez Bach qu’elle révèle à travers elles un nouveau visage sans rien perdre de sa signification profonde. Dans l’esprit des tempéraments plus proches de ceux encore très variables de l’époque, où l’on cherchait un compromis entre intervalles purs et tempérament égal, Cédric Pescia a choisi de faire accorder son piano [...] d’une façon particulière, qui modifie les rapports d’intervalles et rend le chromatisme plus éloquent».


Et ce réglage du tempérament inégal est certainement l’une des clefs de la réussite de cette lecture de L’Art de la fugue, dans laquelle le piano sonne parfois comme un clavecin sans jamais amoindrir l’opulence du Steinway de 1901: riche en nuances, profond en résonnances, volubile dans le jeu des pédales, exaltant une polyphonie respectueuse de l’indépendance des voix et des mains. Par la variété des climats que son toucher parvient à instaurer, Cédric Pescia prouve ainsi – dans le tourbillon du «Canon II alla Ottava» ou la riche ornementation du «Contrapunctus VI a 4 in Stylo Francese» – qu’il a assimilé les enseignements des clavecinistes.


Une autre explication du sentiment d’évidence qui se dégage de l’écoute de cet album réside dans l’ordonnancement des pièces, avec des canons placés dans un ordre destiné à apporter légèreté et variété à la structure de l’ensemble. Ouvrant une séquence de plus de vingt minutes de musique, le choix d’intercaler le canon construit par augmentation et mouvement contraire («Canon I per Augmentationem in Contrario Motu») – et ses dix minutes conduisant vers des horizons infinis de tristesse et de calme – juste avant l’immense et inachevée «Fuga a 3 Soggetti» donne le sentiment qu’une cathédrale de notes a été édifiée, au terme du parcours de ces cent minutes de musique fuguée.


Aucun ennui ne vient mettre son grain de sable dans cette belle mécanique, et si le recueillement du «Canon III alla Decima in Contrapunto alla Terza» paraît d’abord trop sage, ses dernières mesures s’animent d’une lumière obsédante qui s’éteint dans un geste d’une lenteur dramatique – qui semble ne jamais vouloir s’arrêter. Superbe contraste avec l’emballement du «Contrapunctus VIII a 3» ou du «Canon IV alla Duodecima in Contrapunto alla Quinta», avec la folle animation du «Contrapunctus IX a 4 alla Duodecima». Mais le sommet de cet Art de la fugue réside probablement dans l’inéluctable «Contrapunctus X a 4 alla Decima» – comme porté par une foi baignée d’espérance, de ferveur lumineuse et aussi de certitude – et dans l’édifice de l’ultime «Contrapunctus XIV», dont même les dernières notes interrompues ne brisent pas l’hypnotisme qu’il façonne.


Le site de Cédric Pescia


Gilles d’Heyres

 

 

 

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