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11/02/2013 Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 9 en ré mineur, opus 125
Tilla Briem (soprano), Elisabeth Höngen (alto), Peter Anders (ténor), Rudolf Watzke (basse), Bruno-Kittel-Chor, Bruno Kittel (direction), Berliner Philharmoniker, Wilhelm Furtwängler (direction)
Enregistré en public dans la salle de l’ancienne Philharmonie, Berlin (22 mars 1942) – 73’12
Music and Arts CD 1276 – Notice en anglais de John Ardoin
Les noms de Beethoven et Furtwängler sont depuis longtemps accolés de façon indissociable. Le grand chef allemand a toujours fait de Beethoven l’un de ses chevaux de bataille, notamment en ce qui concerne ses symphonies, qu’il a constamment dirigées au fil de sa carrière, et ce jusqu’à son dernier souffle comme en témoigne une récente Neuvième captée à Bayreuth quelques semaines avant sa mort.
Voici donc, sous l’étiquette Music and Arts la réédition d’une Neuvième Symphonie que l’on connaissait déjà pour l’avoir vue circuler sous plusieurs étiquettes, qu’il s’agisse de Tahra (TAH 4006), d’Opus Kura (OPK 7003), d’un disque Archipel consacré au ténor Peter Anders dans la collection «Desert Island Collection», de Guild (GHCD 2345-46), de Melodia (MEL CD 10 020 14, une édition récente datant seulement de 2012) ou, enfin, déjà de Music and Arts, dans un disque n° 653 édité en 1990 et dont le minutage était alors de... 73’48. Bref, n’attendons pas de l’inédit avec ce disque qui témoigne d’un concert donné le 22 mars 1942 pour fêter les quarante ans du Chœur Bruno Kittel, dirigé ici par son fondateur (1870-1948), qui ne doit pas être confondu avec son homonyme, as de la Luftwaffe, tué au combat en 1945... Précisions enfin que ce concert ne doit pas davantage être confondu avec un autre témoignage live de Furtwängler dans la Neuvième, toujours à la tête des forces de Berlin et du Chœur Bruno Kittel, mais qui a été enregistré le 19 avril 1942 avec, comme solistes, Erna Berger, Gertrude Pitzinger, Helge Rosvaenge et, de nouveau, Rudolf Watzke (disque Archipel dans la collection «Desert Island Collection»)!
On connaît le Beethoven de Furtwängler et, en dépit d’une prise de son où certains tutti saturent rapidement, on est emporté par cette houle musicale qui garde toute sa modernité et toute sa grandeur. Les timbales, dans le premier mouvement, instaurent un véritable cataclysme à 9’, qui, dans une période troublée tant pour le chef que pour l’Europe tout entière, prend une extraordinaire dimension dramatique. Quant à la fin de cet Allegro, ma non troppo, un poco maestoso, elle revêt une inexorable majesté qui ne peut que faire frémir l’auditeur. On connaît également la battue parfois assez peu rigoureuse de Furtwängler, les phrases subissant de ce fait quelques accélérations ou ralentis pour le moins intempestifs; c’est ce que l’on retrouve dans le deuxième mouvement, là encore d’un élan fantastique à compter de 3’10, témoignant d’une liberté à laquelle les musiciens du Philharmonique de Berlin répondent sans problème. Mais c’est certainement dans le troisième mouvement Adagio e molto cantabile que Furtwängler se montre ici sous son meilleur jour même s’il fait preuve d’une lenteur (certes devenue légendaire) qui pourrait parfois lasser; or, il n’en est rien. La seule introduction, dans les trente premières secondes, de la clarinette et des cordes impose un recueillement où la tenue des phrases le dispute à la beauté de l’appréhension globale. C’est tout simplement magnifique. Le dernier mouvement bénéficie d’un quatuor de solistes de très bon niveau (notamment Peter Anders) mais, surtout, d’une fin incroyable où, saturation du son aidant, les dernières secondes sont jouées dans un embrouillamini de tous les diables où surnagent essentiellement les cymbales.
Encore une fois, rien de neuf sous le soleil donc mais quel chef, qui plus est dans cette symphonie!
Sébastien Gauthier
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