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07/25/2012 Dimitri Chostakovitch : Quatuors à cordes n° 3, opus 73, n° 4, opus 83, et n° 7, opus 108
Quatuor Meta4 : Antti Tikkanen, Minna Pensola (violon), Atte Kilpeläinen (alto), Tomas Djupsjöbacka (violoncelle)
Enregistré à la salle Sello, Espoo, Finlande (5-8 janvier 2012) – 71’40
Hänssler Classic CD 98.644 – Notice de présentation en anglais et allemand
Sélectionné par la rédaction
Les Finlandais du Quatuor Meta4 – dont on a déjà salué les nombreuses qualités (lire ici) – frappent un grand coup avec ce disque réunissant trois quatuors de Chostakovitch. Au milieu d’une discographie pléthorique et pas avare en références, cette interprétation se détache par la technique épatante des instrumentistes – qui n’hésitent pas à dynamiter certains passages – et se distingue par son esthétique toute personnelle, regorgeant d’inventivité dans la souplesse infinie des sonorités – comme dans leur brûlante suavité. Ce n’est pas pour rien qu’en 2004, cette formation remporta non seulement le premier prix du Concours international de quatuors de Moscou, mais également le prix spécial pour la meilleure interprétation d’un quatuor de Chostakovitch – la formation ayant de toute évidence beaucoup de choses à dire dans ces partitions.
L’originalité de l’approche frappe d’emblée dans le Troisième Quatuor (1946), dont l’Allegretto initial déroute par l’instabilité permanente de son tempo – paraissant presque minauder avec ses traits surinterprétés. Cette entame n’en met que plus en valeur le Moderato con moto – débordant de plasticité et de richesse acoustique – et surtout l’Allegro non troppo, qui réussit l’exploit de claquer sans sécheresse, de grincer sans angoisse sous-jacente... emporté dans une absurde orgie sonore. La perfection objective et neutre de l’Adagio introduit au Moderato, dont la tranquillité inquiète et dont le caractère implacable asphyxie, semblant jeter un regard inexorable vers les confins de la folie.
D’une concentration extrême, ne sacrifiant jamais à l’opulence des sonorités, les Meta4 transforment l’Allegretto du Quatrième Quatuor (1949) en une fertile rhapsodie et l’Andantino en une déroutante prière (comme dénuée de sentiments et de foi), alors que les deux Allegretto sont plongés dans une apparente nonchalance – qui n’est pas indifférence mais autarcie mentale – et balancent sans cesse entre parodie et désespoir, élégie et solitude.
Le Septième Quatuor (1960) relève de la prouesse technique: l’Allegretto introductif épate par son degré de finition dans l’étagement des plans sonores, alors qu’en six minutes – c’est-à-dire sans battre des records de vitesse – l’Allegro conclusif parvient à concilier l’absence de répit (par l’acharnement des Finlandais à attaquer les boyaux de leurs cordes) et l’absence de raucités dans les passages les plus endiablés. Quant au Lento, il se présente sous la forme d’une curieuse pantomime de voix solitaires et indépendantes, se déplaçant dans un climat angoissant parce que volontairement doucereux. Le disque ne précise pas s’il s’agit du début d’une nouvelle intégrale. Mais on l’espère ardemment!
Le site du Quatuor Meta4
Gilles d’Heyres
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