Back
07/20/2012 Richard Wagner : Lohengrin
Klaus Florian Vogt (Lohengrin), Annette Dasch (Elsa), Susanne Resmark (Ortrud), Gerd Grochowski (Friedrich), Günther Groissböck (Heinrich), Markus Brück (Der Heerrufer), Robert Franke, Holger Marks, Sascha Glintenkamp, Thomas Pfützner (Vier brabantische Edle), Christine Bischoff, Isabelle Vosskühler, Judith Löser, Bettina Pieck (Vier Edelknaben), Rundfunkchor Berlin, Rundfunk-Sinfonie, Marek Janowski (direction)
Enregistré en public à la Philharmonie de Berlin (12 novembre 2011) – 201’04
Coffret de 3 SACD hybrides PentaTone Classics PTC 5186 403 – Notice de présentation en français, anglais et allemand
Remettant son Wagner sur le métier chez PentaTone (qui publie ainsi – après Le Vaisseau fantôme, Parsifal et Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg – le quatrième des dix volumes de son intégrale des opéras du compositeur, dont on fêtera le bicentenaire l’an prochain), Marek Janowski propose un Lohengrin enregistré lors d’un concert à la Philharmonie de Berlin fin 2011.
Le chef allemand, dont il est inutile de rappeler les anciennes et incontestables affinités wagnériennes, est l’atout principal de cet enregistrement. Par sa direction très attentive, il fouille le texte en permanence, faisant frémir les cordes comme les ailes d’un cygne au déchaînement frétillant, travaillant chaque phrase sans passivité ni emphase. Du grand art wagnérien, rendu possible par la discipline et la souplesse de l’Orchestre symphonique de la Radio de Berlin (dans ce qui semble pourtant provenir d’une unique prise de concert) – même si les cordes impressionnent davantage que les cuivres. Préparé par Eberhard Friedrich, le Chœur de la Radio de Berlin est à la fois attentif et souple et se plie avec virtuosité au travail passionnant du chef, dont la discipline sur les scènes de foule est assez épatante.
Déjà salué pour son investissement dans ce rôle (lire ici), Klaus Florian Vogt est un Lohengrin exceptionnel au sens premier du terme: incongru avec sa voix au timbre reconnaissable entre mille, spectaculaire par sa projection hétérodoxe – comme venue d’une autre planète (vocale) lorsqu’il entre en scène au premier acte –, hors du commun par la clarté – la nudité, oserait-on dire – de son timbre. On manque certainement de recul pour en juger, mais on tient là une incarnation majeure du chevalier au cygne, même si ce Lohengrin déconcertant – inouï même, par moments, avec ses aigus cristallins et sa candide délicatesse – est peut-être trop insolite justement, pour rejoindre tout à fait le panthéon des grands titulaires du rôle (de Lauritz Melchior à Gösta Winbergh, en passant par Sándor Kónya, Jess Thomas ou René Kollo).
En comparaison, le reste de la distribution est plus conventionnel – mais de haute tenue. L’Elsa d’Annette Dasch sent l’effort avec sa voix un peu étranglée et légère (rappelant par instants celle de Karita Mattila), mais la coloration dont elle teinte ses interventions empreintes de fragilité et de pureté est bien celle du rôle. Susanne Resmark est plus à l’aise avec la couleur d’Ortrud qu’avec celle de Venus et possède ce poison dans le timbre qui convient au personnage: la technique est très solide et l’interprétation impeccable – sans que le grand frisson soit tout à fait au rendez-vous. Malgré des moyens vocaux moins souverains et un timbre plutôt ordinaire, Gerd Grochowski trouve la juste caractérisation psychologique de Friedrich von Telramund dans son irréprochable prestation du deuxième acte. Günther Groissböck est un Henri l’Oiseleur bien chantant, même si un léger effort dans la projection ôte un peu de stabilité à son vibrato (lorsqu’il est poussé dans l’aigu). Signalons enfin que Markus Brück a fière allure en Héraut du Roi, bien qu’il se fatigue assez vite. Ce nouveau Lohengrin n’en constitue pas moins une publication digne de louanges.
Le site du cycle Wagner du Rundfunk-Sinfonieorchester Berlin
Gilles d’Heyres
|