About us / Contact

The Classical Music Network

CD

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

07/02/2012
Aaron Copland : Appalachian Spring (Suite) – Symphonic Ode
Paul Creston : Symphonie n°3 «Three Mysteries», opus 48

Seattle Symphony, Gerard Schwarz (direction)
Enregistré au Seattle Center Opera House (6-7 janvier 1992 ([Symphonie], 2 juin 1993 [Ode] et 22 novembre 1994 [Suite]) – 70’26
Naxos 8.571203 – Notice en anglais de Viola Roth, Paul Schiavo et Joshua Cheek





La réputation internationale du Symphonique de Seattle doit beaucoup à Gerard Schwarz, qui en fut pendant trois ans le chef principal avant d’en devenir le directeur musical de 1987 à 2011 et qui en est maintenant le chef honoraire. Pour marquer cette riche collaboration sur bientôt trois décennies, Naxos leur consacre cette année une collection entière – «Seattle Symphony Collection» – au répertoire très varié, qui à son terme doit comprendre cinquante-deux disques composés d’enregistrements issus principalement des archives de Delos (le premier label du Symphonique), Naxos («American Composers»), Artek et Brilliance Audio (voir par ailleurs ici et ici).


Depuis sa création en 1903, l’orchestre n’a jamais négligé la musique américaine et Gerard Schwarz, sensible à la remarquable floraison de symphonistes de qualité en son pays tout au long du siècle dernier, a beaucoup contribué à les porter à l’attention d’un vaste public. Le programme de ce disque, à mi-chemin de la collection, en témoigne en associant un compositeur connu dans le monde entier à un second qui l’est un peu moins, et deux œuvres peu souvent enregistrées à la Suite extraite d’Appalachian Spring, célébrissime. Aaron Copland (1900-1990) composa le ballet pour Martha Graham en 1944. Ecrite à l’origine pour un petit ensemble de treize instruments, la partition donna lieu en 1945 à la superbe Suite qui valut à Copland le prix Pulitzer de la même année. C’est une musique américaine par excellence, un véritable poème symphonique dédié à une certaine idée de l’Amérique, qui évoque avec fraîcheur et spontanéité des épisodes aux climats délicats ou colorés de la vie des communautés rurales de tradition, sans pittoresque indue. Schwarz en offre l’une des meilleures interprétations, avec un relief instrumental digne d’un concerto pour orchestre. Alerte, expressive, plus noble que rustique, toute sentimentalité écartée, les attaques nettes, jamais appuyées, les demi-teintes tout en finesse, on peut la comparer à celles de Copland lui-même, voire à celles de Bernstein, quoique moins aérienne et peut-être moins espiègle.


L’Ode symphonique (1929) est d’un Copland beaucoup plus jeune dont les qualités étaient déjà reconnues par Serge Koussetvitzky, commanditaire de l’œuvre pour le cinquantième anniversaire (1931) de l’Orchestre symphonique de Boston. Copland la révisa en 1956 pour le soixante-quinzième anniversaire de la même formation. L’ode est à la musique. La composition pour grand orchestre se fonde sur un motif mélodique emprunté au Nocturne (1926) pour violon et piano, auquel Copland confère un caractère expressionniste, le taillant à même le roc. La partition se structure en une forme ABCBD sans pause. Grandiose et presque solennel lors des mouvements lents (ACD), elle touche au monumental lors de la conclusion (D), alors que les deux vifs mouvements intermédiaires, brièvement plus confidentiels, se font plus urgents, plus impératifs. Schwarz fait ressortir avec finesse un sentiment d’allégresse contenue, une exultation secrète qui se devine plus qu’elle ne s’exprime et qui sous-tend pourtant l’ensemble. Œuvre rare au disque comme au concert, c’est sans doute Copland lui-même qui en impose la prégnance le plus subtilement, Tilson Thomas demeurant le plus hymnique, mais Seattle, les cuivres rutilants, propose une interprétation burinée, pesante mais avec une respiration ample qui sait se faire souffle léger lors des bruissements mystérieux des passages plus discrets.


Paul Creston (1906-1985), pianiste, organiste, compositeur autodidacte et théoricien, composa «Three Mysteries», la troisième de ses six Symphonies, en 1950. Pour grand orchestre, elle débute sur un sublime nocturne surgi de la nuit des temps pour tracer la vie du Christ, du Messie attendu à la Résurrection. Les trois mouvements, dont le matériau thématique vient du chant grégorien, s’intitulent «Nativity», «Crucifixion» et «Resurrection». Cependant, il ne s’agit nullement de description ou de récit psychologique mais plutôt d’une suite d’impressions ou de climats intimement ressentis peut-être par un témoin fidèle – son espoir, sa joie, la violence de sa révolte, sa peine et son espoir renouvelé. Le beau deuxième mouvement, construit en arche, débute sur un émouvant solo de violoncelle et ce sont peut-être les différents solos (hautbois, basson, cor, trompette, alto, violoncelle) qui surviennent tout au long de l’œuvre qui sont les plus emblématiques du mystère du Christ et de sa solitude extrême. Les solistes de l’Orchestre symphonique s’y prêtent avec toute la sensibilité nécessaire. Schwarz fut brièvement l’élève de Creston et il connaît et sait faire valoir les qualités de ce symphoniste de renom, mélodiste éloquent dont la musique peut paraître assez conservatrice de prime abord alors qu’elle est en permanence pimentée par un sens rythmique développé et par une invention harmonique sûre. Cordes, vents et cuivres ici mettent en valeur avec conviction une écriture finement nuancée qui les porte aux limites de leurs possibilités dynamiques et expressives. Les violons pianissimo sont exquis.


On ne peut que saluer l’initiative de Naxos qui réunit, lors de cette nouvelle réédition, trois pièces, complémentaires, en somme, portées par un même élan et admirablement défendues par Gerard Schwarz et les musiciens du Symphonique de Seattle.


Le site de l’Orchestre symphonique de Seattle


Christine Labroche

 

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com