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07/10/2011
Johann Sebastian Bach : Variations Goldberg, BWV 988

Nicholas Angelich (piano)
Enregistré au Curtis Auditorium de l’école de musique de Cork (23-26 février 2011) – 79’58
Virgin Classics 50999 0706642 9 – Notice de présentation en français, anglais et allemand





Ramin Bahrami (piano)
Enregistré dans la salle de musique de La Chaux-de-Fonds (février 2002) – 80’33
Decca 476 282 0 (distribué par Universal) – Notice de présentation en français, anglais, allemand et italien





Yaara Tal, Andreas Groethuysen (pianos)
Enregistré dans l’Erholungshaus der BAYER AG, Leverkusen (6-8 avril 2009) – 76’06
Sony 88697526962 – Notice de présentation en anglais et allemand





Les Variations Goldberg (1740) de Jean Sébastien Bach (1685-1750) sont une matière discographique inépuisable, dont on compterait plus de quatre cents versions en CD. On pouvait donc attendre beaucoup de Nicholas Angelich (né en 1970) tant le pianiste franco-américain s’est illustré par la profondeur et l’originalité de son approche du grand répertoire (lire par exemple ici). Ses Goldberg nous plongent malheureusement dans une profonde perplexité, qui vire vite à l’ennui. Aucun frisson ne saisit l’auditeur à l’écoute de ce qui apparaît davantage comme un déchiffrage de luxe que comme une «aventure incroyable, une Odyssée» (pour reprendre les termes de l’interprète). Face à un océan d’immobilité, on croit toujours que l’élan va surgir au détour du chemin et donner du sens au cheminement. Mais les semblants d’animation retombent malheureusement aussi rapidement qu’ils surgissent, pour s’enfoncer dans la déclamation inerte (Variations VII, X, XV) ou anonyme (Variations XI, XIX). L’exécutant étant un très grand interprète, il ne se départit nullement de ses qualités de pianiste – à commencer par la lisibilité évidente du propos, l’approche assurément pianistique de la partition (aucune tentation d’imiter le clavecin), la rigueur du poignet et sa souplesse aussi (Variation XXIII), la délicatesse du toucher enfin (Variations XVIII, XXV). Rien dans la notice (par ailleurs fort bien rédigée) ne permettant de renseigner sur les intentions du Nicholas Angelich, on est autorisé à se demander pourquoi il a souhaité graver ce disque, édité avec soin par Virgin.


Bach au piano est peut-être, au fond, une affaire de spécialistes – comme en attestent par exemple les réussites de Glenn Gould ou, plus près de nous, de Murray Perahia. Ainsi, la reparution chez Decca des Goldberg de l’Iranien Ramin Bahrami (né en 1976) – un album dédié à la mémoire de Rosalyn Tureck – sonne comme une évidente réussite, de la part d’un interprète qu’on peut déjà tenir pour un spécialiste de ce répertoire (une dizaine de disques Bach à son actif). En regard de l’apathie d’Angelich, l’album est une cure de jouvence. C’est d’autant plus intéressant à souligner que l’enregistrement dépasse les quatre-vingt minutes mais apparaît à la fois plus mobile et plus habité. Bahrami travaille les dynamiques davantage que le velours du son. En résulte un Bach sec et trop carré par moments, précipité voire brouillon aussi (une Variation XIV flirtant avec l’excentricité immature), mais inondé de fantaisie rythmique (avec de décapantes Variations VII, X, XXIII) et de bonheur juvénile. Un bonheur si intense que l’interprète retarde plus que de raison le sol final. Il ne s’agit certainement pas de la version définitive des Goldberg par Ramin Bahrami – alors âgé de vingt-deux ans et qui remettra probablement la partition sur le métier – mais d’un vent frais qui souffle sans prétention aucune sur une œuvre intarissable.


C’est également ce qu’offre Sony en proposant un enregistrement des Goldberg dans la (rarissime) version pour deux pianos arrangée par Joseph Rheinberger (1839-1901) et révisée par Max Reger (1873-1916), dont Susanne Popp considère à juste titre qu’elle est romantique et moderne à la fois (dans une intéressante notice, malheureusement non traduite en français, évoquant «Rheinberger’s romanticisation and Reger’s psychologisation»). Les arrangeurs ont manié avec la prudence la plus grande (et probablement le respect le plus fort) l’ajout de voix multiples et le recentrage des équilibres harmoniques – n’attentant notamment pas à l’intégrité de l’Aria. Le résultat est parfois très troublant, et l’on pourra être irrité par cette perturbation des habitudes et des attentes – ces contrechants presque sacrilèges. Un minimum d’ouverture d’esprit permettra toutefois d’entendre dans ces Goldberg réorchestrées de fascinantes rêveries: une Variation XI où les voix semblent se démultiplier à l’infini, une Variation XII qui n’a jamais semblé plus proche du choral... Certaines pièces osent même de grisantes ornementations en forme d’improvisation digressive (les Variations VIII, XIV, XVIII, XXII notamment). Sans offrir le piano le plus brillant ni le plus virtuose, le duo formé par l’Israélienne Yaara Tal (née en 1955) et l’Allemand Andreas Groethuysen (né en 1956) livre une interprétation précieuse et d’une musicalité certaine.


Le site de Ramin Bahrami
Le site du duo Tal Groethuysen


Gilles d’Heyres

 

 

 

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