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01/24/2011
Anton Bruckner : Symphonie n° 8 en do mineur (édition Nowak)
Orchestre de la Suisse romande, Marek Janowski (direction)
Enregistré au Victoria Hall, Genève (avril, juin et juillet 2010) – 79’47
SACD Pentatone Classics 5186 371 (distribué par Codaex) – Notice (en anglais, allemand et français) d’Alexandre Barrelet et Franz Steiger





Grand brucknérien dans l’âme, Marek Janowski enregistre ici la Huitième Symphonie, qui est à la fois la plus longue et la plus emblématique du compositeur autrichien. N’est-ce pas également la symphonie d’Anton Bruckner (1824-1896) qui soit la plus chère aux yeux du chef? En effet, c’est avec ce monument qu’il quitta l’Orchestre philharmonique de Radio France en janvier 2000 après quinze ans passés à sa tête, concert triomphal qui reste gravé dans la mémoire de ceux qui ont eu la chance d’y assister. Il a d’ailleurs eu l’occasion de la diriger depuis à Paris, à la tête de l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, sans négliger pour autant les autres symphonies de ce compositeur. Après une Neuvième symphonie mitigée et, en revanche, de magnifiques versions des Cinquième et Sixième, voici donc un nouvel opus qui prend naturellement sa place dans l’intégrale que Marek Janowski est en train d’enregistrer avec son Orchestre de la Suisse romande chez PentaTone.


Première question, inévitable chez Bruckner: quelle édition choisir? Si la version Haas de 1939 (qui mélange les versions de la symphonie datant de 1887 et de 1890) est la plus couramment utilisée (Blomstedt, Karajan, Haitink, Thielemann, Wand...), la version Nowak de 1955 (qui reprend la version totalement révisée de 1890 et qui ne doit pas être confondue avec l’autre version Nowak de 1972 qui, elle, consiste en la version originale de 1887!) connaît également de nombreux adeptes dont, excusez du peu, Jochum, Celibidache, Böhm et Giulini. Autant dire que les grands spécialistes de Bruckner hésitent, certains (Jochum ou Thielemann par exemple pour prendre des chefs issus de générations différentes) adoptant même l’une ou l’autre version selon leur humeur. Pour sa part, Marek Janowski a toujours eu recours à la version révisée de 1890, adoptant ainsi une parfaite continuité dans ses choix puisque, comme l’illustre parfaitement une discographie brucknérienne exhaustive, le chef allemand a toujours eu recours aux éditions critiques établies par le musicologue Leopold Nowak (1904-1991) tant dans ses précédents enregistrements que lors de ses concerts.


A parcourir les noms des chefs et des orchestres qui ont interprété la version Nowak de 1890, on se dit que la concurrence à laquelle se frotte Marek Janowski est rude. Et le fait est que, même si sa version est absolument superbe, elle demeure légèrement en deçà de quelques références qui, plus que jamais, demeurent bien établies.


Superbe, en premier lieu, en raison d’un orchestre qui s’avère être d’une valeur tout à fait comparable à celle des grandes phalanges que sont par exemple Amsterdam ou Vienne. Superbe en second lieu grâce à Marek Janowski, qui mérite parfaitement ses lauriers de chef brucknérien accompli. Dès l’entrée en scène des cordes, on admire le magnifique travail réalisé afin d’obtenir une plénitude sonore d’un niveau exceptionnel, une puissante cohésion, magnifiée par une direction qui veille à chaque instant à conduire les phrases jusqu’à leur dernière note pour éviter toute rupture. Saluons d’autant plus cette implication que l’enregistrement s’est effectué sur une longue durée, élément propre à casser l’investissement et la conception qu’un chef et son orchestre peuvent se faire d’une œuvre pareille. De même, le premier mouvement nous donne à entendre des vents fabuleux (ce cor solo! ce hautbois! cette clarinette qui meurt à la fin de l’Allegro moderato!) qui témoignent, répétons-le, d’un orchestre chauffé à blanc. Si l’on peut regretter une légère précipitation à la fin du premier mouvement, on est, en revanche, emporté par le Scherzo qui, là encore, met en valeur un magnifique pupitre de cors. La réussite gagne encore un cran avec ce qui est peut-être la plus belle page jamais composée par Bruckner, son Adagio: long ici de plus de vingt-six minutes (quand Klemperer dépasse tout juste les vingt-deux minutes et que Celibidache ose les trente-cinq), il séduit de bout en bout. Janowski respire pleinement cette musique qui se déroule avec un naturel confondant, le volume des violoncelles suscitant notamment une admiration constante, la fin du mouvement s’éteignant dans un apaisement idéal. Sans pour autant être en deçà de l’interprétation générale, avouons que le Finale s’avère un peu moins convaincant que les trois premiers mouvements. La faute peut-être à une vision moins implacable, moins violente, moins dramatique que ce qu’ont pu retranscrire certains autres chefs (on pense à Giulini); la faute également à une battue parfois pesante, qui décortique la partition de façon trop appliquée au détriment de l’évidence qui avait été si bien illustrée précédemment.


Mais, quand bien même certaines réserves pourraient être émises, saluons encore une fois cette magnifique version qui, même si elle ne dépasse pas Carlo Maria Giulini (avec Vienne – (DG) ou Eugen Jochum (avec Dresde – EMI – plutôt qu’avec Berlin – DG), se situe à l’évidence au sommet.


Sébastien Gauthier

 

 

 

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