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11/27/2009
Charles Koechlin : Œuvres pour piano, vol. 2
Michael Korstick (piano)
Enregistré à Stuttgart (2008) – 67’
Hänssler Classic 93.246 (distribué par Intégral)





Dans Les Heures persanes Charles Koechlin se confronte à un exotisme lointain, du moins pour son époque. Celui du journal de voyage Vers Ispahan de Pierre Loti, publié en 1904, celui aussi des Nouvelles asiatiques de Gobineau, ou tout simplement du recueil des Mille et une nuits. Un Orient où Koechlin n’a du reste jamais mis les pieds, son expérience in loco des musiques extra-européennes restant limitée à des séjours en Afrique du Nord. Plutôt que d’une quelconque musique descriptive en forme de carnet de voyage, il s’agit donc plutôt dans ces Heures persanes d’une évocation onirique, d’une tentative de capter un sentiment oriental diffus, une notion du temps différente, une prolifération de lignes parfois évocatrices des entrelacs de l’art islamique… bref un projet qui traque l’indicible et anticipe (1919) sur le travail d’un Messiaen, voire la gestion dispendieuse du temps d’un Morton Feldman.

Contrairement au caractère relativement varié que l’on constate d’habitude dans l’œuvre de Koechlin, Les Heures persanes sont d’emblée étonnantes par la similitude apparente des pièces, dont le langage harmonique déstructuré et l’éventail dynamique, essentiellement limité à des nuances piano, semble même relativement monotone. A cet égard les titres font des promesses de diversité qu’ils ne tiennent pas, tant une audition peu attentive de Matin frais, par exemple, ne retrouve pas de nette différence de climat avec Roses au soleil de midi. Ce recueil nécessite donc prioritairement qu’on lui accorde du temps, une dimension d’écoute différente. Et aussi, pour le pianiste, certainement, l’écriture y requiert un contrôle digital implacable tant certains agrégats, voire la dispersion extrême des accords sur le clavier, doivent être gérés de sang froid, sans que ces contingences techniques altèrent une qualité d’ambiance très particulière.


Terrain rarement fréquenté, et en définitive seulement par des pianistes motivés, dûment passionnés par ce monde énigmatique : Herbert Henck et Kathrin Stott naguère, tous deux brillants, avec une petite préférence à donner au confort sonore ménagé par la seconde citée. Aujourd’hui Michael Korstick, déjà auteur l’an dernier d'un premier volume d’une intégrale Koechlin qui s’annonce précieuse, vient s’ajouter à la liste sans y marquer par une individualité particulière. Son exécution attentive paraît techniquement parfaite et laisse la musique se répandre sans heurt apparent, avec des sonorités claires qui ne succombent jamais à la tentation d’un impressionnisme musical qui n’a pas lieu d’être (même si les Heures persanes datent de 1919 et si les évocations de la nuit et du clair de lune y surabondent, on n’y trouve plus grand chose de debussyste).


Ne reste donc qu’à l’écouter, en sachant que l’on peut aussi rester à la porte d’un univers aussi secret. A ce titre la découverte des Heures Persanes dans leur version orchestrée quelques années plus tard par Koechlin (dirigées par Leif Segerstam, Naxos) peut s’avérer plus facile, la connaissance des deux versions restant également recommandée.


Laurent Barthel

 

 

 

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