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06/20/2009
Georg Friedrich Händel : Alcina

Anja Harteros (Alcina), Vesselina Kasarova (Ruggiero), Veronica Cangemi (Morgana), John Mark Ainsley (Oronte), Sonia Prina (Bradamante), Deborah York (Oberto), Christopher Purves (Melisso), Bayerisches Staatsorchester, Ivor Bolton (direction)
Enregistré en concert au Prinzregententheater de Munich durant le festival de l’Opéra de Munich (juillet 2005) – 193’35
Coffret de trois disques Farao Classics S 108080 (distribué par Intégral) – Notice bilingue d’Ingrid Zellner (allemand et anglais) et traduction trilingue (allemand, anglais et italien) des textes chantés






Et de trois… Après Ariodante et Serse, voici le troisième enregistrement d’un opéra de Händel réalisé par Ivor Bolton à la tête du Bayerisches Staatsorchester. Déjà bien servi par le disque (on retiendra les versions respectivement dirigées par le regretté Richard Hickox chez EMI Classics, William Christie chez Erato et le tout récent Alan Curtis chez Archiv Produktion), cet opéra occupe une place particulière dans l’œuvre de Georg Friedrich Händel (1685-1759). Inspiré, comme bon nombre d’ouvrages de cette époque, de l’Orlando Furioso de l’Arioste, bâti sur un livret de Fanzaglia, Alcina fut créé en avril 1735 quelques mois seulement après la première, triomphale, d’Ariodante. Est-ce justement la comparaison avec son prédécesseur ou le fait que Mademoiselle Sallé, danseuse célèbre en son temps, spécialement venue de Paris avec sa troupe, ait été abondamment sifflée lors de la création qui a ainsi conduit à un succès en demi-teinte ? Pourtant, contrairement à certains autres opéras de Händel, les personnages sont psychologiquement fouillés et toute la magie possible (sorcellerie adroitement mêlée aux badinages et au divertissement), ici au sens propre du terme, y est instillée. Compte tenu de la richesse inhérente à l’opéra et de la prise réalisée sur le vif, la présente version bénéficie d’une évidente spontanéité et constitue une excellente gravure qui mérite indéniablement une écoute attentive.


Le premier acte laisse pourtant une impression mitigée. Ainsi entend-on quelques aigus acides, voire criards, de la part de Veronica Cangemi dans sa première aria « O s’apre al riso » qui, à l’instar de ses partenaires, éprouve un certaine difficulté à se mettre en place. Au contraire, dès le début, Sonia Prina est époustouflante dans son air « E gelosia », faisant preuve d’une extraordinaire agilité vocale même si elle est parfois au bord de la rupture. L’orchestre lui-même donne une interprétation relativement banale qui porte préjudice aux splendides arias de Ruggiero (« Di te mi rido, semplice stolto ») ou de Bradamante (« E gelosia » toujours).


Telle n’est pas, en revanche, l’impression qui ressort des deuxième et troisième actes. L’acte II est certainement le plus beau de l’opéra et, peut-être, une des plus belles réussites de toute l’œuvre lyrique de Händel. Une des premières arias qu’il nous est donné d’entendre est chantée par Christopher Purves (Melisso), « Pensa a chi geme » : sur un rythme de sicilienne, il livre ici un magnifique moment, caractérisé notamment par une voix d’une chaleur et d’une tenue exemplaires. L’aria « Vorrei vendicarmi » de Bradamante est également un des grands airs de ce début de deuxième acte, Sonia Prina faisant montre d’une agilité technique à couper le souffle. Dans cet acte où se forge un subtile jeu d’identités (de la part de Bradamante notamment), Händel multiplie avec une indéniable réussite les dialogues entre voix et instruments, recourant, comme souvent, aussi bien aux vents (le basson dans l’aria de Ruggiero « Mi lusinga il dolce affetto » ou les flûtes à bec, dans le douloureux « Mio bel tesoro » confié au même personnage) qu’aux cordes (écoutez la finesse du dialogue entre Veronica Cangemi, qui tient le rôle de Morgana, et le violon solo dans l’aria « Ama, sospiro » !). Mais, surtout, on retiendra l’extraordinaire aria d’Alcina, « Ah ! mio cor ! » : plus de douze minutes de musique à pleurer, chantée avec une fragilité vocale – peut-être en partie non voulue d’ailleurs, Anja Harteros ayant parfois quelques difficultés au niveau du souffle – étourdissante, qui vous laisse absolument abasourdi. Sans nul doute, ce passage justifie à lui seul l’achat du coffret !


Le troisième acte conclut en apothéose cette gravure. Veronica Cangemi livre encore une fois une très estimable prestation, déclamant un air dominé par la tristesse où elle tient à s’excuser auprès d’Oronte pour l’avoir blessé avant de lui montrer combien elle en est éperdument amoureuse (« Credete al mio dolore »). Là encore, le duo qu’elle entame avec le violoncelle participe pleinement du tragique de la scène. Sommet de l’acte, l’aria « Sta nell’Ircana pietrosa tana » de Ruggiero, chanté avec vivacité et entrain par Vesselina Kasarova (parfaite de bout en bout), accompagnée par deux cors virtuoses qui entraînent l’auditeur dans un tourbillon sonore sans équivalent ! Les applaudissements et cris d’enthousiasme qui accueillent sa prestation saluent avec raison un passage tout à fait admirable. Sous la direction énergique d’Ivor Bolton, le chœur final conclut quant à lui de la plus belle manière un disque qui mérite de figurer dans les références de l’œuvre et qui, pour le deux cent cinquantième anniversaire de la mort de Händel, constitue un digne hommage au génie de ce compositeur !


Sébastien Gauthier

 

 

 

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