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04/02/2009
Gustav Mahler : Symphonie n° 2 «Résurrection»
Marius Constant : Vingt-quatre préludes

Berthe Monmart (soprano), Oralia Dominguez (mezzo), Chœur de la RTF, René Alix (direction), Orchestre national de la RTF, Leonard Bernstein (direction)
Enregistré en public à Paris (13 novembre 1958) – 97’53
Album de deux disques Radio France FRF002 (distribué par Harmonia mundi)






Entre 1948 – il n’avait alors pas encore trente ans – et 1981, Leonard Bernstein a dirigé à plusieurs reprises l’Orchestre national («de la RTF» puis «de France»), même si ce fut à la tête de l’Orchestre de Paris qu’il se produisit pour la dernière fois dans la capitale en juillet 1987. Mahler était, on le sait, l’un de ses musiciens de prédilection, auquel il s’identifiait volontiers, mais il ne l’a dirigé qu’à deux reprises à Paris: en mai 1981, avec l’Orchestre de Paris, dans la Septième symphonie, et vingt-trois ans plus tôt, le jeudi 13 novembre 1958, avec le National, la Deuxième symphonie «Résurrection» (1894). Pour apprécier, un demi-siècle plus tard, un tel document à sa juste mesure, plutôt que de tenter de l’évaluer à l’aune d’une abondante discographie ou même simplement d’une longue lignée d’enregistrements publics, de Klemperer à Gergiev, il faut avant tout se replacer dans le contexte de l’époque.


Ainsi que le rappelle excellemment Christian Wasselin dans sa notice introductive (en français et en anglais), la France commence alors tout juste à découvrir Mahler, et ce non sans scepticisme et malentendus. Le compositeur avait lui-même dirigé la première audition française de sa Deuxième symphonie avec l’Orchestre Colonne en 1910: à cette occasion, certains de ses confrères – et non des moindres (Debussy, Dukas, Pierné) – avaient ostensiblement quitté le Théâtre du Châtelet durant le deuxième mouvement, mus par un patriotisme esthétique assez douteux, si l’on en croit les propos alors prêtés à Debussy («Ouvrons l’œil (et fermons l’oreille)... Le goût français n’admettra jamais ces géants pneumatiques à d’autre honneur que de servir de réclame à Bibendum»). L’œuvre attendit le 20 février 1958, soit quelques mois seulement avant la venue de Bernstein, pour être rejouée à Paris: c’était d’ailleurs déjà au Théâtre des Champs-Elysées et avec le National, mais cette fois-là sous la baguette de Schuricht.


Dès lors, c’est comme si Bernstein, foi mahlérienne chevillée au corps, se donnait «quatre-vingt-trois minutes pour convaincre» un public au mieux curieux et impatient, au pire méfiant et hostile. D’où l’impression de revivre des temps héroïques, de retrouver ici cette musique comme au premier jour, spectaculaire et inouïe, enthousiasmante et neuve, d’autant que celui qui venait de devenir le patron du Philharmonique du New York n’a pas son pareil pour s’épancher, déclencher des apocalypses, dramatiser sans cesse le discours: bref, cette démesure berliozienne qu’évoquaient en 1910 quelques-uns des rares commentateurs parisiens point trop défavorables.


Cette publication est d’autant mieux venue qu’elle est complétée par les Vingt-quatre préludes de Marius Constant (1925-2004), qui furent créés au cours du même concert – autres temps, autres mœurs, qui ne craignaient pas des programmes aussi longs et exigeants. Car la partition, gravée au milieu des années 1960 pour Deutsche Grammophon en complément du Premier concerto pour violon de Serge Nigg par Charles Bruck et le Philharmonique de la RTF, n’a pas, sauf erreur, eu les honneurs du disque depuis lors. De fait, Constant est resté excessivement dans l’ombre, notamment de ceux nés la même année que lui (pour s’en tenir à la France, Boucourechliev et Boulez). Signées d’un musicien de trente-trois ans, ces vingt-quatre miniatures, durant chacune de six à soixante secondes (pour un total de moins de quatorze minutes) et structurées en trois parties («Eléments», «Mutations», «Composantes»), témoignent pourtant d’une remarquable maîtrise de l’orchestre ainsi que d’une forte dimension expressive. Sans certes rivaliser avec le radicalisme alors de mise à Darmstadt ou Donaueschingen, ces puissants unissons, ces soli intensément lyriques, ces ostinati vindicatifs traduisent en effet un souci de renouvellement du langage et de recherche qui ne se complaît nullement dans les modèles passés.


Simon Corley

 

 

 

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