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08/11/2008
Wolfgang Amadeus Mozart : Cosi fan tutte, K. 588 [1]
Charles Gounod : Mireille (version reconstituée par Henri Büsser) [2]
Alessandro Stradella : Cosi amor mi fai languir [3]
Antonio Caldara : Come raggio di sol [3]
Ludwig van Beethoven : In questa tomba oscura, WoO 133 [3]
Robert Schumann : Der arme Peter, opus 53 n° 3 [3]
Franz Schubert : Erlkönig, D. 328 [3]
Modeste Moussorgski : Trepak (extrait des «Chants et danses de la mort»– La Boue – Les Vents d’orage – Chanson de Méphistophélès – Le Séminariste [3]
Francis Poulenc : Concerto pour piano [4]
Olivier Messiaen : Turangalîla-Symphonie [5]
« Les nouvelles musicales » (voix de Daniel-Lesur, Georges Auric, Maurice Brillant, Arthur Honegger, Marcel Landowski et Dorel Handman)

Teresa Stich-Randall (Fiordiligi), Nan Merriman (Dorabella), Rita Streich (Despina), Nicolaï Gedda (Ferrando, Vincent, Andrelous), Rolando Panerai (Guglielmo) , Marcello Cortis (Don Alfonso, Ambroise), Janette Vivalda (Mireille), Christiane Gayraud (Taven), Michel Dens (Ourrias), Madeleine Ignal (Vincenette), André Vessières (Ramon), Christiane Jacquin (Clémence), Robert Tropin (Le Passeur), Boris Christoff [3] (basse), Francis Poulenc [4], Yvonne Loriod [5] (piano), Ginette Martenot [5] (ondes Martenot)
Chœurs du Conservatoire de Paris [1, 2], Elisabeth Brasseur [2] (chef de chœur), Orchestre de la Société des concerts du Conservatoire [1, 2], Orchestre national de la Radiodiffusion française [4, 5], Hans Rosbaud (piano [3], continuo et direction [1]), André Cluytens [2], Charles Münch [4], Roger Désormière [5] (direction)
Enregistré en public à Aix-en-Provence (26 juillet 1955 [1], juillet 1955 [3], 24 juillet 1950 [4], 25 juillet 1950 [5]) et aux Baux-de-Provence (24 juillet 1954 [2]) – 406’22
Coffret de six disques INA Mémoire vive IMV078 (distribué par Abeille)





Tandis que le Festival d’Aix-en-Provence vient de fêter ses soixante ans, ce coffret nous ramène aux premières heures de sa légende. On le doit à l’Institut national de l’audiovisuel (INA) et à sa toujours passionnante collection «Mémoire vive», les débuts du festival étant concomitant de ceux des diffusions en direct à la radio: de fait, outre les techniques encore relativement rudimentaires de l’époque et l’inévitable mistral, quelques coupures, que le livret n’omet pas de signaler à l’auditeur, illustrent l’ancienneté et la précarité de ces témoignages.


Mais ils n’en demeurent pas moins précieux, montrant que dès ses premières années, le festival fondé par la comtesse Pastré et Gabriel Dussurget allait bien au-delà de l’image presque exclusivement mozartienne à laquelle il a rapidement été réduit. Cela étant, un Cosi fan tutte (1790) – pas celui de l’inauguration en 1948, pas non plus celui de 1957 déjà publié voici quelques années, mais celui de 1955 – rappelle l’importance de ces spectacles immortalisés par les décors de Cassandre. Même si la langue originale est conservée, il faut se refaire à certains usages en vigueur en ces temps-là (coupure de deux airs de Ferrando et d’un air de Dorabella au second acte, récitatifs accompagnés au piano), mais l’énergie de Hans Rosbaud, qui tient le continuo, compense un orchestre assez laid et pas toujours bien en place tandis que les voix, typiques des affiches aixoises (Stich-Randall, Gedda, Panerai, ...), convainquent par le style et par l’esprit davantage que par leurs qualités propres.


Autre hommage obligé, celui qui est rendu à la couleur locale, avec Mireille (1864) de Gounod capté in situ (le Val d’Enfer) sous la direction de Cluytens: au même moment, une distribution identique était réunie en studio pour une version (EMI) privée des heurs et malheurs du direct (commentateur poursuivant ses explications alors que la musique a repris, public applaudissant au moindre prétexte, ...), mais avec la même saveur d’un chant typé sinon désuet.


Le nom de Rosbaud s’est d’emblée attaché à la renommée du festival: hormis le Cosi précédemment évoqué, on le retrouve ici comme accompagnateur d’un récital de Boris Christoff (1955). Le programme est sombre, alternant arias italiennes et mélodies de Moussorgski, mais le Bulgare frappe par une clarté de timbre qui n’est pas toujours l’apanage des voix de basse, s’attachant en outre à différencier les personnages dans Le Roi des aulnes (1815) de Schubert.


Rosbaud devait graver dès décembre 1951 à Baden-Baden la Turangalîla-Symphonie (1948) de Messiaen, mais c’est ici Désormière qui dès juillet 1950, quelques mois après la création de l’œuvre par Bernstein à Boston, en donne à Aix la première européenne, avec, bien évidemment, Yvonne Loriod et Ginette Martenot. Une interprétation «historique», sans nul doute la plus rapide à ce jour (moins de soixante-cinq minutes): les musiciens sont à la peine, les cordes grincent, les ondes Martenot couinent, mais au prix de tempi parfois vraiment trop précipités (Chant d’amour 1, Jardin du sommeil d’amour) et d’extravagants capharnaüms sonores, une véhémence et une énergie formidables confèrent toute sa jeunesse à cette partition devenue depuis lors un classique du XXe siècle.


Dès l’entracte, au micro de la Radiodiffusion française, les premières impressions concordent d’ailleurs pour expliquer à l’auditeur qu’il assiste à un moment important: le disque se conclut sur ces «Nouvelles musicales», où Daniel-Lesur rapporte un mot de Mauriac («Je n’aime pas qu’on mette les cloches dans des tubes») et anime une «tribune musicale» où les louanges le disputent, à fleurets mouchetés, aux propos plus ambigus. Auric parle ainsi d’une «clarté extraordinaire», «très directe, très simple et sans aucune complication», «d’une très grande beauté», mais déplore que Messiaen, par sa manière de recourir à la percussion, ait consenti des «concessions à la légende qui l’entoure». Partageant la même réserve, Honegger, quant à lui, se déclare «sous le choc» face à ce qu’il juge «incontestablement l’œuvre d’un très grand musicien», trouvant une «simplicité au fond de l’œuvre quelle que soit la complexité de la mise en œuvre» et la trouvant «faite pour recueillir une adhésion générale», tandis que Landowski y voit «une force qui va».


La veille (24 juillet 1950) était proposée une autre première européenne d’un compositeur français suivant de peu une création américaine, celle du Concerto pour piano (1949) de Poulenc sous la baguette de Münch: un moment passionnant, même si l’on peut regretter que le piano paraisse trop en avant de l’orchestre, et à l’issue duquel on perçoit distinctement quelques huées...


Un coffret qui se révèle donc attachant pour la nostalgie qui en émane, comme d’une madeleine proustienne ou d’une photo jaunie.


Simon Corley

 

 

 

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