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Verbier chambriste

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Verbier
07/25/2014 -  et 26*, 27* juillet 2014
25 juillet (Salle des Combins)
Gustav Mahler: Quatuor pour piano et cordes en la mineur – Kindertotenlieder (arrangement Renate Stark-Voit, Thomas Stark et Thomas Hampson)
Antonín Dvorák: Cigánské melodie, opus 55 (arrangement Sylvie Bodorova)
Felix Mendelssohn: Octuor à cordes en mi bémol majeur, opus 20

Vesselina Kasarova (mezzo-soprano)
Sarah Rumer (flûte), Alexandre Emard, Ivonne Perez (hautbois), Angelo Montanaro, Petr Vasek (clarinette), Gabriel Bergeron-Langlois, Céleste-Marie Roy (basson), Jean-Pierre Berry, Charles Pierron (cor), Anna Koim (harpe), Ray Chen, Kirill Troussov, Nancy Wu, Dami Kim (violon), Lawrence Power, Ellen Nisbeth, Vicki Powell (alto), Adrian Brendel, Marie-Elisabeth Hecker, István Várdai (violoncelle), Leigh Mesh (contrebasse), Martin Helmchen (piano), Mathieu Herzog (direction)


26 juillet (Eglise)
Johannes Brahms: Sonate n° 2 en fa majeur, opus 99
Igor Stravinski: Suite italienne (arrangement Gregor Piatigorsky)
Piotr Ilyitch Tchaïkovski: Nocturne en ut dièse mineur, opus 19 n° 4 – Pezzo capriccioso en si mineur, opus 62

Mstislav Rostropovitch: Humoresque, opus 5
István Várdai (violoncelle) Julien Quentin (piano)


27 juillet (Eglise)
Joseph Haydn: Sonate pour piano n° en si bémol majeur, Hob.XVI:41
John Field: Andante inédit en mi bémol majeur
Claude Debussy: Images (Première Série)
Marc-André Hamelin: Variations sur un thème de Paganini
Franz Liszt: Harmonies poétiques et religieuses: «Bénédiction de Dieu dans la solitude», S. 173/3 – Venezia e Napoli, S. 162
Marc-André Hamelin (piano)


27 juillet (Eglise)
Johann Sebastian Bach : Suite n° 3, BWV 1009
Henri Dutilleux : Trois Strophes sur le nom de Sacher
Zoltán Kodály : Sonate, opus 8

Miklós Perényi (violoncelle)


V. Kasarova (© Suzanne Schwiertz)


L’exercice qui consiste à réunir des interprètes d’horizons très variés pour des séances de musique de chambre uniques, au programme singulier, reste l’originalité du festival de Verbier, qui, par ailleurs, sacrifie assez aux lois du genre «festival international». Nommées «Rencontres inédites», ces séances remontent aux origines, en 1994, et, comme le rappelait l’an dernier la plaquette du festival dans sa partie consacrée au vingtième anniversaire de cette manifestation, «elles permettent à des artistes n’ayant presque jamais joué ensemble de s’essayer à des programmes originaux de musique de chambre».


Cette année le programme de la deuxième de ces rencontres, organisé autour de la personnalité du baryton Thomas Hampson, semblait très attrayant. La défection de celui-ci, son remplacement par le mezzo-soprano Vesselina Kasarova et l’ajout d’un chef en la personne de Mathieu Herzog, l’altiste (sur le départ) du Quatuor Ebène, a quelque peu changé la donne. Disons-le sans détour, l’ensemble souffrait de ce qui est parfois le travers de Verbier, un manque de préparation certain. Réunir tant d’individualités en un orchestre, fût-il de chambre, relève de la gageure et demande plus de travail préalable.


Les deux œuvres vocales programmées, les Kindertotenlieder de Mahler pas plus que les Mélodies tziganes de Dvorák, ne trouvaient en la personne de la mezzo bulgare une bonne interprète. Le problème était moins vocal – Kasarova a moins de puissance et de timbre que dans ses mémorables années munichoises – que dans un maniérisme de l’interprétation insupportable, faisant un sort à chaque mot et y ajoutant des contorsions physiques irregardables. Le bref Quatuor avec piano de Mahler qui préludait mais surtout le grand Octuor de Mendelssohn qui concluait sauvaient honorablement la mise.



M.-A. Hamelin (© Nicolas Brodard)


Le pianiste canadien Marc-André Hamelin, qui fait une belle carrière en Amérique du nord, n’est pas un habitué des scènes françaises, mais on a pu l’entendre à La Roque d’Anthéron, aux Jacobins de Toulouse et à Paris, où Jeanine Roze l’invite parfois. C’est dire avec quelle curiosité on abordait ce récital donné dans une église bien pleine. Curiosité non déçue d’abord par l’originalité d’un programme mêlant à de grands piliers du XIXe siècle Haydn et Debussy et même une œuvre du pianiste lui-même (en fait des variations sur un thème de Paganini un peu jazzy et empruntant beaucoup aux structures déjà exploitées par Brahms, Liszt et Rachmaninov). Les Images de Debussy éteint certainement le point fort de ce récital, avec une sonorité magnifique et une très belle perception de l’univers debussyste. Plus hermétique, la «Bénédiction de Dieu dans la solitude» de Liszt s’effaçait devant Venezia et Napoli, somptueux de sonorité, d’une virtuosité impeccable et magnifiquement construit.



J. Quentin, I. Várdai (© Aline Paley)


Les hasards de la programmation permettaient d’entendre à 24 heures d’intervalle deux violoncellistes aux deux extrêmes de leurs carrières respectives, tous deux originaires de Hongrie. Le jeune István Várdai, 28 ans, très bien accompagné par le pianiste français Julien Quentin, montrait en un récital toute l’étendue de son jeune talent. Très à l’aise dans l’univers mélodique et les magnifiques phrasés de la Seconde Sonate de Brahms, il faisait montre d’un contrôle absolu de l’instrument dans la Suite italienne de Stravinski (un arrangement de plus du Pulcinella inspiré par Pergolèse) et étalait toute sa virtuosité, sans ostentation, dans l’Humoresque (en fait une diabolique étude) de Rostropovitch.



M. Perényi (© Aline Paley)


Le lendemain c’est un grand maître, Miklós Perényi, invité pour des classes de maître à l’académie du festival, qui donnait un récital de violoncelle seul, abstraction et austérité totales, devant un public mêlant jeunes étudiants médusés et une poignée d’amateurs très motivés. Et de l’excellence on passait soudain au suprême... Certes le maître joue un instrument de qualité et d’ancienneté supérieurs par sa sonorité, certes l’expérience et la maturité donnent au jeu une qualité incomparable, mais il reste toujours le mystère derrière un si grand talent capable de délivrer en une heure à un auditoire tétanisé un message aussi complet fait d’une Suite de Bach, d’une œuvre contemporaine de Dutilleux, qui explore toutes les possibilités de l’instrument, avec quelle science, et d’une œuvre qui réunit dans la plus grande évidence tradition et modernité comme la Sonate opus 8 de Kodály. Bravo et merci!



Olivier Brunel

 

 

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