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Musique en famille Forcalquier Cloître des Cordeliers 07/31/2014 - Jörg Widmann : Nachtstück [1]
Antonio Vivaldi : Concertos pour violon «Le quattro stagioni», opus 8 n° 1 à n° 4: «La primavera», RV 269, «L’estate», RV 315, «L’autunno», RV 293, et «L’inverno», RV 297 [2]
Olivier Messiaen : Quatuor pour la fin du Temps [3] Jörg Widmann [1, 3] (clarinette), Sergey Malov [2], Pierre-Olivier Queyras [2], Antje Weithaas [2, 3] (violon), Tabea Zimmermann [2] (alto), Jean-Guihen Queyras [1, 2, 3] (violoncelle), Laurène Durantel [2] (contrebasse), Chani Lesaulnier [2] (clavecin), Florent Boffard [1, 3] (piano)
Vingt-sixième édition pour les Rencontres musicales de Haute-Provence, qui, toujours animées par la famille Queyras au grand complet et leurs amis, et soutenues par une administratrice salariée et – comme dans tous les festivals – par une fidèle équipe de bénévoles (tout au long de l’année au conseil d’administration et en juillet avec une solide équipe logistique), poursuivent sur leur lancée. Précédés de l’inamovible «journée continue de musique de chambre» à entrée libre, le 27 juillet en la cathédrale de Forcalquier, six concerts sont programmés du 28 juillet au 2 août: les trois premiers au prieuré de Salagon (XIIe), à Mane, les trois derniers au pied de Forcalquier, en plein air, au cloître des Cordeliers (XIIIe-XVe), avec des répétitions publiques gratuites. Et, comme chaque année, gravitent autour du festival un «master jeunes talents» pour «jeunes musiciens confirmés» ainsi qu’un stage pour jeunes musiciens de tous niveaux organisé en partenariat avec l’école intercommunale de musique et de danse du pays de Forcalquier-Montagne de Lure, dont les bénéficiaires offrent respectivement quatre et deux concerts gratuits.
Comme chaque année aussi, un compositeur est à l’affiche durant toute la manifestation, en l’occurrence Jörg Widmann (né en 1973), qui mène en outre une belle carrière de clarinettiste. C’est donc associé à Jean-Guihen Queyras et Florent Boffard qu’il débute par son propre Nocturne (1998) le premier des trois concerts aux Cordeliers. Venu en nombre, le public paraît quelque peu décontenancé, malgré l’habituel et rassurant propos liminaire de Jean-François Queyras et alors que le crépuscule s’installe sur la ville. Il n’en réserve pas moins un accueil plus que poli à cette page de près de dix minutes qui, si elle renvoie clairement au romantisme allemand par son titre et par son effectif instrumental, en est stylistiquement très éloignée, car ce sont plutôt ici les pianissimi, émaillés de brefs éclats, des musiques de nuit de Bartók et l’économie d’écriture de Webern.
A. Weithaas, J. Widmann, J.-G. Queyras, F. Boffard
Encore Les Quatre Saisons (1725) de Vivaldi? Et d’abord, les entend-on si souvent que cela dans le circuit traditionnel des concerts et festivals? Pas de quoi faire la fine bouche, par conséquent, d’autant qu’à sept seulement – violon solo, quintette à cordes et clavecin – tous les risques sont permis. De fait, les artistes abordent le texte sans routine ni états d’âme musicologiques, recherchant volontiers des atmosphères particulièrement originales, comme dans le deuxième mouvement de L’Automne ou les deux premiers mouvements de L’Hiver. Se partageant les quatre concertos, les trois solistes se différencient nettement: dans L’Eté, Pierre-Olivier Queyras reste assez sage et classique, dans L’Hiver, Sergey Malov déploie le charisme et la fougue d’un Nemanja Radulovic, tandis que dans les deux autres concertos, Antje Weithaas, toujours sur le qui-vive, joue sur la fantaisie et les contrastes, tout en faisant preuve d’un abattage impressionnant.
Deux jours après l’Emperi, le Quatuor pour la fin du Temps (1941) de Messiaen résonne de nouveau sous les cieux provençaux. D’un point de vue instrumental, la réussite est globalement équivalente, avec mention particulière à Jean-Guihen Queyras dans la «Louange à l’Eternité de Jésus», mais l’équipe de musiciens – celle réunie pour la pièce de Widmann, augmentée d’Antje Weithaas – s’attache davantage à faire ressortir la modernité de l’œuvre, plus abrupte, plus tranchante, plus paroxystique, même si l’humour conserve ses droits («Intermède»). Les auditeurs ont manifestement adhéré, observant un très long silence après que les ultimes échos de la «Louange à l’Immortalité de Jésus» se sont évanouis dans la nuit. Mais la question se pose comme à Salon-de-Provence: faut-il troubler par des applaudissements des moments aussi précieux?
Le site des Rencontres musicales de Haute-Provence
Le site de Jörg Widmann
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Le site de Tabea Zimmermann
Simon Corley
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