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Au frais dans la Salle Pasteur Montpellier Le Corum (Salle Pasteur) 07/23/2014 - et 24* juillet 2014 23 juillet
Felix Mendelssohn: Romances sans paroles, opus 67 n° 2 et n° 3, opus 53 n° 2, opus 102 n° 5 et opus 67 n° 4
Charles Koechlin: Les Heures persanes, opus 65 : «A l’ombre près de la fontaine de marbre» et «Clair de lune sur les terrasses»
Federico Mompou: Suburbis: «El carrer, al guitarrista i el vell cavall» – Canción y danza n° 6 – Préludes n° 6 à n° 9
Edvard Grieg: Pièces lyriques opus 47 n° 4, opus 54 n° 3, opus 68 n° 4, opus 54 n° 6 et opus 65 n°6
Claude Debussy: Ballade – Estampes: «La Soirée dans Grenade» – Préludes (Second Livre): «La Terrasse des audiences du clair de lune» et «Feux d’artifice» Philippe Cassard (piano)
24 juillet
Wolfgang Amadeus Mozart: Rondo pour piano, K. 511
Joseph Haydn: Sonate pour piano n° 50, Hob. XVI: 37
Robert Schumann: Davidsbündlertänze, opus 6
Till Fellner (piano)
P. Cassard (© Jean-Baptiste Millot)
Le festival de Radio France et Montpellier Languedoc-Roussillon programme de la musique de chambre tous les jours à 18 heures dans la salle Pasteur du Corum, agréablement climatisée. Cette série de concerts à entrée libre, comme celle de 12 heures 30 dédiée aux jeunes solistes (voir ici), bénéficie d’un succès qui pose quand même question puisqu’une file gigantesque se forme à l’entrée de la salle largement plus d’une demi-heure avant le concert. Comme les portes n’ouvrent qu’à 17 heures 30, les spectateurs occupent déjà la plupart des places 20 à 25 minutes avant le commencement. Par conséquent, les festivaliers, soulagés de disposer enfin d’un fauteuil, patientent de nouveau en parcourant le journal, en lisant un livre ou encore en bavardant. Afin d’éviter cette situation quelque peu absurde, et de perdre du temps à attendre dans la file puis dans la salle, ne serait-il opportun de distribuer des billets indiquant un numéro de place 24 ou 48 heures avant le concert, d’autant que la salle Pasteur ne comporte pas de siège à visibilité réduite ou nulle – même les places situées latéralement présentent suffisamment de confort ?
Néanmoins, entendre deux jours de suite deux pianistes aussi importants et dissemblables l’un de l’autre que Philippe Cassard et Till Fellner sans débourser le moindre centime d’euro constitue une véritable aubaine qui vaut bien la peine de prendre son mal en patience. Le premier a conçu un programme qui semble disparate sur le papier, anthologie de brèves pièces de Mendelssohn, Koechlin, Mompou, Grieg et Debussy, mais, en pédagogue réputé, il expose au public la raison de ce choix ainsi que l’articulation, finalement logique, des pages entre elles, le compositeur catalan, point de départ du projet, figurant au centre du récital. Le pianiste annonce qu’il jouera les œuvres dans un ordre différent de celui indiqué dans le programme et qu’il remplace «A travers les rues» des Heures persanes de Koechlin par la Ballade de Debussy.
Peu importe, finalement, puisqu’un récital aussi original et généreux s’écoute d’une traite, yeux fermés, en appréciant l’agencement naturel des pièces, de sorte que la savante succession de celles-ci provoque l’étrange impression qu’elles ont été composées sur un court laps de temps et par le même compositeur. Philippe Cassard, qui développe une sonorité moelleuse, colorée, évocatrice, parvient à faire oublier la mécanique de l’instrument grâce à l’abstraction, la profondeur et la spiritualité de ses interprétations. Après avoir joué pendant près d’une heure et demie, le musicien trouve encore les ressources nécessaires pour offrir, en bis, une Valse de Chopin.
T. Fellner (© Benjamin Ealovega)
Un style tout à fait différent : celui de Till Fellner. Même si le programme a lui aussi subi une modification, puisque la Cinquantième Sonate (1779) de Haydn remplace les quatre Préludes et Fugues du Second Livre du Clavier bien tempéré de Bach, le pianiste débute sobrement sa prestation sans un mot, au contraire de Philippe Cassard la veille. Le programme rappelle la filiation spirituelle que le pianiste entretient avec Alfred Brendel. Dans le Rondo en la mineur (1787) de Mozart, l’interprète opte pour des tempi un peu plus lents qu’à l’accoutumée mais l’option se justifie en regard du ton pesant, voire affecté, de cette œuvre dont il veille à ne pas restituer l’atmosphère de façon trop univoque. La Sonate de Haydn parait ensuite parfaitement équilibrée et proportionnée, ciselée, limpide et lumineuse.
Till Fellner délivre ensuite des Danses des compagnons de David (1837) de Schumann une conception unifiée tout en restituant la bipolarité de cette œuvre qui balance entre la passion et la poésie, la fougue et la tendresse. Le pianiste témoigne d’une approche pénétrante de cette partition de longue haleine. L’interprétation affiche un résultat formel et expressif incontestable, la sonorité revêt de vives séductions. Le récital, plus court que celui de la veille, mais d’une tenue tout aussi exemplaire, s’achève avec «Au lac de Wallenstadt», extrait des Années de pèlerinage, de Liszt. Till Fellner et Philippe Cassard nous emmènent décidément très loin.
Le site de Philippe Cassard
Le site de Till Fellner
Sébastien Foucart
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