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Du saloon au jardin japonais

Paris
Opéra Bastille
02/14/2014 -  et 17, 21, 24, 27 février, 1er, 4, 7, 12 mars 2014
Giacomo Puccini : Madama Butterfly

Svetla Vassileva (Cio-Cio San), Cornelia Oncioiu (Suzuki), Teodor Ilincai (F.B. Pinkerton), Gabriele Viviani (Sharpless), Carlo Bosi (Goro), Florian Sempey (Principe Yamadori), Marianne Crebassa (Kate Pinkerton), Scott Wilde (Lo Zio Bonzo), Chae Wook Lim (Yakuside), Lucio Prete (Il Commissario Imperiale), Yves Cochois (L’Ufficiale del Registro), Carole Colineau (La Madre di Cio-Cio San), Virginia Leva-Poncet (La Zia), Pranvera Lehnert (La Cugina)
Chœur et Orchestre de l’Orchestre national de l’Opéra de Paris, Daniele Callegari (direction musicale)
Robert Wilson (mise en scène et décors)


Représentations de 2011 (© Opéra national de Paris/Elisa Haberer)


On le pressentait et l’on avait raison : la reprise de Madame Butterfly l’emporte sur la première à l’Opéra de La Fille du Far West (voir ici). Non que l’on n’ait pas de motif de se plaindre. Svetla Vassileva rate totalement son entrée, puis son premier acte : timbre sans rondeur, médium grêle, vibrato expansif. Le vibrato se stabilise ensuite, mais il faut faire avec le reste – beaucoup de notes lui manquent toujours, pour ne rien dire des couleurs, les aigus de « Un bel di vedremo » menacent de lui échapper. Cela dit, l’interprète émeut par la justesse et la sincérité de la composition. Au troisième acte, on rend même les armes devant la geisha trahie qui a enfin trouvé ses marques – certes, il était temps. Le jeune Teodor Ilincai laisse aussi à désirer en Pinkerton : médium modeste également, aigus claironnés, composition basique. Le meilleur est le Sharpless très classe de Gabriele Viviani, par la voix, le style, la caractérisation. Et l’on tient un ensemble, tant les rôles secondaires sont bien distribués : Suzuki émouvante de Cornelia Oncioiu, Yamadori superbe de Florian Sempey, Goro venimeux de Carlo Bosi, Bonze impressionnant de Scott Wilde.


Cela dit, la soirée laisse d’abord un souvenir grâce à la mise en scène de Bob Wilson et à la direction d’orchestre de Daniele Callegari. La beauté des lumières est confondante, plus encore que lors de la reprise de 2011, des lumières toujours aussi signifiantes, métaphores de l’action et, surtout, des états d’âme de l’héroïne. Vingt ans après, la production ne fascine pas moins, ne serait-ce que par sa froideur voulue, son hiératisme, antithèse assumée de l’effusion puccinienne, qui nous rappelle que le bonheur de la petite geisha n’est qu’une illusion. Par le renversement de la perspective aussi : Wilson abandonne le point de vue de l’exotisme traditionnel pour inscrire le drame, selon son habitude, dans une esthétique épurée, d’une abstraction quasi quintessenciée, d’où est banni tout pittoresque. A Daniele Callegari on ne reprochera guère qu’un certain manque de sensualité dans le duo d’amour du premier acte. Mais on sent bien qu’il y prend, de son côté, le contrepied d’une fâcheuse tradition : voici Puccini rendu à ses raffinements coloristes, à ses chatoiements impressionnistes, à la clarté de ses lignes. Un vrai chef de théâtre, qui ne cesse d’avancer, construit le drame et diversifie les atmosphères, gradue l’émotion jusqu’au dénouement, où Cio-Cio San ressemble à un papillon crucifié.



Didier van Moere

 

 

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