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La Monnaie se surpasse

Bruxelles
Bozar, Salle Henry Le Bœuf
11/02/2013 -  et 3 novembre 2013
Benjamin Britten: War Requiem, opus 66
Sabina Svilak (soprano), Mark Padmore (ténor), Dietrich Henschel (baryton)
La Maîtrise de la Monnaie, Denis Menier (direction), Vlaams radio koor, Vocal Ensemble Reflection, Chœurs de la Monnaie, Martino Faggiani (chef des chœurs), Orchestre symphonique de la Monnaie, Ludovic Morlot (direction)


L. Morlot (© Sussie Ahlburg)


La Monnaie maintient son habitude de programmer un requiem aux alentours de la Toussaint. Choix évident pour célébrer le centenaire Britten, le War Requiem (1961-1962) nécessite des moyens considérables. La scène de la Salle Henry Le Bœuf parait insuffisamment spacieuse pour accueillir l’orchestre au grand complet et les chœurs, renforcés par ceux de la Radio flamande et le Vocal Ensemble Reflection. Les enfants de la Maîtrise restent quant à eux en dehors de la salle pour produire de beaux effets de proximité et d’éloignement.


Modérément convaincant jusqu’à présent dans la fosse (voir ici et ici), Ludovic Morlot révèle enfin ce dont il est capable : livrer une interprétation inspirée du début à la fin, pourvue d’une vision et élaborée dans les détails. Les musiciens, qui manifestent beaucoup de plaisir à jouer ensemble, restituent le pouvoir d’émotion de ce chef-d’œuvre impressionnant sans que la tension ne s’infléchisse. L’exécution se signale par une formidable cohésion entre les pupitres qui, tous très investis, expriment toute la révolte et la douceur que cette musique recèle. L’orchestre développe une sonorité décantée et d’une grande plénitude grâce à la ductilité des cordes, à la finesse des bois, à l’éclat des cuivres et à la force des percussions. Les interventions solistes, très au point, se mêlent aux voix avec naturel. Réservant de puissants contrastes, la maîtrise de la dynamique s’avère exemplaire tandis que le chef trouve un point d’équilibre quasiment parfait entre les instrumentistes et les chanteurs.


La Monnaie souhait réunir un trio de solistes de nationalités différentes, comme l’a imaginé Britten, en l’occurrence une Russe (Galina Vichnevskaya, qui a dû céder sa place à Heather Harper pour la création, de même que ce soir, Sabina Svilak remplace finalement Olga Guryakova), un Anglais (Peter Pears hier, Mark Padmore aujourd’hui) et un Allemand (Dietrich Fischer-Dieskau en 1962, Dietrich Henschel ici). Cette belle idée ne se concrétise donc pas tout à fait mais peu importe : la voix opulente, bien projetée, presque trop crémeuse, de la soprano slovène ne suscite guère plus de regrets. Le ténor réalise des merveilles grâce à la richesse de son timbre, d’une grande clarté, à la fermeté de la ligne vocale, impeccablement tenue, ainsi qu’à la dignité dont il témoigne dans une interprétation émouvante et profondément incarnée – pour le War Requiem, c’est l’homme qu’il fallait. Le duo qu’il forme avec Dietrich Henschel, diseur subtil et disposant d’un timbre de rêve sur toute l’étendue de la tessiture, évolue sur des sommets.


Les choristes se couvrent de gloire : impeccablement homogènes, d’une présence souveraine, ils accumulent les qualités, en premier lieu, chez les enfants, une pureté angélique et, chez les aînés, des phrasés peaufinés, une dynamique très soigneusement restituée, une implication spirituelle et dramatique constante. La Monnaie peut s’enorgueillir de disposer un chef de chœur au-dessus du lot en la personne de Martino Faggiani. Ce concert, un des plus beaux de cette année, s’achève sur un silence de recueillement que n’aurait pas renié un Claudio Abbado, avant que n’éclatent les applaudissements d’un public subjugué. Un regret toutefois : l’absence de surtitrage. Traduire le texte de Wilfred Owen, que le programme de salle ne reproduit même pas, aurait permis aux spectateurs qui ne maîtrisent pas, ou peu, l’anglais de s’en s’imprégner.


Le prochain concert de l’orchestre et de Ludovic Morlot se tiendra à la Monnaie le 19 décembre : au programme, la Symphonie de Webern, le Second Concerto pour violoncelle de Haydn, avec Gautier Capuçon, et Pulcinella de Stravinski. Pourvu que les musiciens et leur chef permanent continuent à se surpasser de la sorte, et pas uniquement sur la scène de la Salle Henry Le Bœuf.



Sébastien Foucart

 

 

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