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Nouvelle tentative

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
09/13/2013 -  et 14 (Luzern), 24 (Linz) septembre 2013
Anton Bruckner : Symphonie n° 8 en ut mineur (édition Nowak)
Wiener Philharmoniker, Lorin Maazel (direction)


L. Maazel (© Andrew Garn)


C’est la rentrée pour tout le monde! Et à ce petit jeu, le Théâtre des Champs-Elysées a offert une sorte de réponse «du berger à la bergère» à la Salle Pleyel qui a inauguré sa saison voici dix jours en accueillant les Berliner Philharmoniker pour deux concerts (voir ici et ici): l’avenue Montaigne ouvrait en effet ce soir ses portes (et sa saison) au grand concurrent qu’est l’Orchestre philharmonique de Vienne et qui, cette année, reviendra une seconde fois sous la direction de l’italien Riccardo Chailly, le 19 janvier 2014. Profitons d’ailleurs de ce concert pour saluer les vingt ans de fidèle collaboration entre le théâtre et les Wiener puisque, dans le cadre de l’Eurocycle débuté par la prestigieuse phalange voilà maintenant vingt ans, Paris aura été, chaque année, une étape obligée de l’orchestre. Combien de grands moments depuis cette saison 1993-1994 où les trois concerts inauguraux avaient été respectivement dirigés par Seiji Ozawa, Riccardo Muti et Zubin Mehta!


Au mois de mars dernier, l’étape parisienne des Viennois, qui effectuaient une tournée les ayant conduit de Vienne à Essen en passant par Bruxelles et Luxembourg, avait été annulée en raison de la neige qui avait bloqué le train devant emmener l’orchestre depuis la capitale belge... Lourde déconvenue pour le public qui devait alors entendre la monumentale Huitième Symphonie (1887-1890) d’Anton Bruckner (1824-1896) sous la baguette de Zubin Mehta. Mais, ô surprise, voici que, dans le cadre d’une nouvelle et brève tournée européenne, ils reviennent pour le même programme, cette fois-ci sous la baguette de Lorin Maazel.


Une certaine appréhension nous gagne donc, leur précédente visite parisienne avec le chef américain, en 2010, s’étant révélée catastrophique en raison d’un orchestre en petite forme et d’une direction alliant continuellement lourdeur et mauvais goût. Pour autant, souvenons-nous également que Maazel, quelque temps plus tard , avait donné cette Huitième de Bruckner avec les Müncher Philharmoniker et que le résultat avait s’était alors révélé plus que convaincant. La récente parution d’une intégrale brucknérienne à la tête de l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise témoigne par ailleurs de ses réelles affinités avec le maître de Saint-Florian, notamment dans une Cinquième et, justement, une Huitième du plus haut niveau.


Ayant choisi comme dans tous ses enregistrements l’édition critique établie par Nowak en 1955 sur la base de la version de 1890 (de préférence à l’édition Nowak de 1890 également, mais qui combine les manuscrits de 1887 et de 1890), Lorin Maazel nous aura livré ce soir une vision extrêmement contrastée de cette symphonie. Dans un silence particulièrement impressionnant, l’Orchestre philharmonique de Vienne a une fois encore prouvé qu’il était une phalange incomparable. Le hautbois de Martin Gabriel, la clarinette de Matthias Schorn, les neuf cors (dont quatre jouaient également les fameux Wagner-Tuben), les timbales d’Anton Mittermayr (le voir jouer étant d’ailleurs un plaisir à lui tout seul, celui-ci étant d’ailleurs rejoint par un autre timbalier pour la fin du dernier mouvement) furent grands, mais que dire des cordes? Même si les violons, sous la houlette du Konzertmeister Rainer Honeck, et qui comptaient quatre femmes dans leurs rangs, furent très bons, ce sont surtout les pupitres d’altos (où apparaît une seule jeune femme brune) et de violoncelles qui furent impressionnants par leur cohésion mais surtout leurs timbres automnaux, tout en lumières mordorées, comme au début du crépusculaire Adagio.


Le résultat fut pourtant en-deçà de ce que l’on pouvait espérer car, bien que bénéficiant d’un outil de premier ordre (où l’on entendit néanmoins quelques imperfections), Maazel retrouvait à l’occasion de ce concert quelques-uns de ses travers: la grandiloquence inutile, les contrastes artificiels de tempi, la lourdeur de certaines phrases. Les tempi extrêmement retenus (la symphonie atteignant l’heure et demie quand d’autres la jouent en dix minutes de moins) ne se doublent pas de cette tension et de ce souffle si particuliers à l’œuvre du compositeur autrichien. Si l’on reprend l’exemple de l’Adagio, Maazel ne l’aborde pas avec la sérénité que l’on pourrait souhaiter, de même qu’à la fin du premier mouvement, si empli de désolation lorsque la clarinette meurt avec l’ensemble des cordes. Dans cette fabuleuse page qu’est le troisième mouvement, la conclusion (après une explosion par trop tonitruante et spectaculaire des cuivres, renforcés par l’éclat des cymbales et du triangle) doit en principe voir arriver des vagues de cordes au legato puissant: ici, la vague est sèche, les rouleaux précipités et le frisson léger. De même, dans la coda conclusive, le mystère, assez proche de celui qui conclut également la Quatrième, fait largement défaut et la grande nef qui devrait se dessiner ne prend guère de hauteur.


Maazel demeure un technicien hors pair, sa baguette alternant battue nonchalante et précision la plus extrême: visuellement, on ne peut qu’être subjugué par sa gestique, d’une beauté incroyable, les Wiener Philharmoniker – qu’il dirige régulièrement depuis 1962 – répondant à la moindre de ses inflexions. Mais la magie n’a pas totalement opéré, ce qui est d’autant plus étonnant que ces partenaires se connaissent très bien, ayant donné à Fribourg, le 12 septembre dernier, leur cinq centième concert ensemble. Pour autant, et l’ovation finale l’a montré, la prestation de ce soir aura été une belle réussite: sachons apprécier le moment présent...


Le site de Lorin Maazel
Le site de l’Orchestre philharmonique de Vienne



Sébastien Gauthier

 

 

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