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Le retour

Zurich
Opernhaus
06/23/2013 -  et 28* juin, 2, 6, 10, 14 juillet 2013
Vincenzo Bellini : La straniera
Edita Gruberova (Alaide), Veronica Simeoni (Isoletta), Dario Schmunck (Conte Arturo di Ravenstel), Franco Vassallo (Barone Valdeburgo), Benjamin Bernheim (Osburgo), Pavel Daniluk (Il Signore di Montolino), Reinhard Mayr (Il priore degli Spedalieri)
Chor der Oper Zürich, Jürg Hämmerli (préparation), Philharmonia Zürich, Fabio Luisi (direction musicale)
Christof Loy (mise en scène), Annette Kurz (décors), Ursula Renzenbrink (costumes), Franck Evin (lumières), Kathrin Brunner, Thomas Jonigk (dramaturgie)


E. Gruberova (© Monika Rittershaus)


Elle avait juré qu’elle ne remettrait plus jamais les pieds sur les planches de l’Opernhaus tant qu’Alexander Pereira en serait le directeur et elle a (presque) tenu sa promesse. De 1978 à 2002, Edita Gruberova a été l’un des piliers de l’institution lyrique zurichoise, avant qu’éclate un différend avec celui qui entre-temps est devenu responsable du Festival de Salzbourg. Dix ans durant, Alexander Pereira a tout tenté pour faire fléchir la diva, qui est finalement revenue sur sa décision alors même qu’il était encore en poste à Zurich, acceptant, l’année dernière, de remplacer au pied levé Jonas Kaufmann dans un récital. Et cet été, la soprano slovaque se produira dans la ville de Mozart, signe que la hache de guerre est bel et bien enterrée. Pour son retour scénique à Zurich, l’artiste a eu le privilège de pouvoir choisir ce qu’elle souhaitait chanter, et son choix s’est porté sur la très rare Straniera de Bellini.


Disons-le d’emblée, la performance de la diva laisse une impression plutôt mitigée. Il est impossible en effet de faire l’impasse sur les libertés prises avec les règles du belcanto, sur le chant tellement maniéré, sur les notes qui vacillent ou encore sur les problèmes d’intonation (elle chante constamment trop bas). Et pourtant, malgré son âge (67 ans), la chanteuse a démontré qu’elle pouvait encore absolument tout faire avec sa voix, éblouissant par sa virtuosité sans faille, sa musicalité, ses « pianissimi » éthérés, l’assurance de ses aigus, la longueur du souffle et la parfaite incarnation de la mélancolie et de la langueur qui caractérisent le rôle-titre. Comme par le passé, le public lui a fait un triomphe au terme de la représentation.


Le plus important cependant est qu’il faut savoir gré à Edita Gruberova d’avoir offert au public zurichois la possibilité d’entendre une partition si rare. Deuxième ouvrage de Bellini, créé à la Scala de Milan en 1829, après Il pirata en 1827, La straniera fut un véritable triomphe. L’opéra s'inspire du roman L’Etrangère du Vicomte d'Arlincourt et se déroule en Bretagne vers l'an 1200. L’intrigue est assez complexe, pour ne pas dire rocambolesque. Agnese a épousé le roi de France sans savoir que celui-ci était déjà marié. Exilée sous le nom d’Alaide, l’héroïne se lamente tous les soirs aux abords d’un lac. Les villageois de l’endroit, ignorant qui est cette étrangère, la prennent pour une sorcière. Le Comte Arturo, fiancé de la fille d’un seigneur, s’éprend de la mystérieuse femme. Le prieur annonce alors la mort de la première épouse du roi, ce qui fait d’Alaide/Agnese la nouvelle reine de France. Désespéré, Arturo se suicide sous ses yeux. C’est pour Alaide l'occasion de se lancer dans une « cabalette » particulièrement inspirée et bouleversante. Si le livret de Felice Romani est des plus rudimentaires, la musique de Bellini séduit par la beauté et la richesse des mélodies. On comprend pourquoi Renata Scotto, Montserrat Caballé ou encore Renée Fleming, pour ne citer qu’elles, se sont laissé séduire. Curieusement, Maria Callas n’a jamais abordé le rôle. La légende dit qu’elle emporta la partition pour l’étudier au cours d’une croisière. Or elle rencontra Onassis sur le bateau et laissa l’opéra au fond de sa valise...


La distribution réunie à Zurich autour d’Edita Gruberova est solide et homogène. Il faut relever avant tout la belle performance de Franco Vassallo, Baron Valdeburgo distingué et ardent. L’Isoletta de Veronica Simeoni est une révélation, avec sa voix ample et chaude, à la projection remarquable. Remplaçant au pied levé Gregory Kunde, le ténor Dario Schmunck s’en tire avec les honneurs. Parmi les rôles secondaires, on retient surtout le Prieur de Reinhard Mayr, à la noble prestance. Dans la fosse, Fabio Luisi est un accompagnateur attentif et sensible, sachant mettre en valeur un orchestre totalement au service des voix. Après ses excès au Grand Théâtre de Genève, on craignait le pire pour la mise en scène de Christof Loy. Il n’en est rien, fort heureusement, l’Allemand livrant pour une fois une production très sage, sans aucune provocation, où les nombreux nœuds qui parsèment le plateau, censés évoquer les bateaux de Bretagne, servent aussi à se pendre. La direction d’acteurs est particulièrement réussie, chaque personnage étant finement caractérisé. La straniera mérite assurément d’être (re)découverte.



Claudio Poloni

 

 

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