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L’envol de L’Aiglon

Lausanne
Opéra
04/21/2013 -  et 24, 26, 28* avril 2013
Jacques Ibert et Arthur Honegger : L’Aiglon
Carine Séchaye (Duc de Reichstadt), Marc Barrard (Séraphin Flambeau), Franco Pomponi (Prince de Metternich), Benoît Capt (Maréchal Marmont), André Gass (Frédéric de Gentz), Christophe Berry (Attaché militaire), Sacha Michon (Prokesch-Osten), Carole Meyer (Thérèse de Lorget), Marie Karall (Duchesse de Parme), Céline Soudain (Comtesse Camerata), Antoinette Dennefeld (Fanny Elssler)
Chœur de l’Opéra de Lausanne, Véronique Carrot (chef de chœur), Orchestre de Chambre de Lausanne, Jean-Yves Ossonce (direction musicale)
Patrice Caurier, Moshe Leiser (mise en scène), Renée Auphan (reprise de la mise en scène), Christian Fenouillat (décors), Agostino Cavalca (costumes), Christophe Forey (lumières)


(© Marc Vanappelghem)


Quel ouvrage singulier que L’Aiglon, qui doit être la seule partition lyrique écrite par deux compositeurs ! En 1936, le directeur de l’Opéra de Monte-Carlo souhaite tirer un opéra du drame historique éponyme d’Edmond Rostand et confie l’écriture du livret à Henri Caïn. Le choix du compositeur se révèle plus délicat, deux noms étant pressentis isolément, Jacques Ibert et Arthur Honegger. Les deux musiciens décident finalement d’écrire l’œuvre ensemble. « Le secret de notre collaboration ? Il n’y en a pas. La main droite, la main gauche. La division du travail était très honnête. L’un écrivait les dièses, l’autre les bémols ! » Voilà ce qu’auraient déclaré les deux amis. Plus sérieusement, leur choix a été dicté par leur tempérament respectif : à Ibert les actes I et V tout en finesse et en retenue, à Honegger les actes II et IV très dramatiques et le III en commun. Si aujourd’hui, il faut bien le reconnaître, les trois premiers actes peuvent sembler un brin convenus et désuets, les deux derniers sont d’une tout autre trempe : quel souffle épique et dramatique dans le quatrième (le protagoniste, en fuite à Wagram, revit dans une hallucination la bataille mythique entourée d’une armée de spectres), et quelle émotion dans le cinquième, où le héros, malade, vit ses dernières heures, bercé de chansons populaires françaises.


L’Aiglon retrace le destin du fils de Napoléon. Proclamé roi de Rome à sa naissance en 1811, Napoléon II « règne » quelques jours en 1815 ; mais si son père abdique en sa faveur, les Alliés préfèrent Louis XVIII. A Vienne, le jeune héritier encombrant devient le duc de Reichstadt et vit cloîtré au Palais de Schönbrunn, auprès de son grand-père maternel François II, empereur d’Autriche, sous la surveillance du chancelier Metternich. En 1831, lorsque les révolutions européennes laissent espérer un monde nouveau, certains font miroiter au jeune homme de vaines illusions de pouvoir : il a alors 20 ans, l'âge de toutes les illusions et de toutes les manipulations. Humilié par Metternich, il meurt de tuberculose en 1832.


Le spectacle présenté à Lausanne est une reprise d’une production créée à Marseille en 2004 par Patrice Caurier et Moshe Leiser. Les deux metteurs en scène n’ayant pu se rendre en Suisse (ils préparent actuellement Norma à Salzbourg avec Cecilia Bartoli), le directeur de l’Opéra de Lausanne, Eric Vigié, a confié les rênes de la production à Renée Auphan, qui était directrice de l’Opéra de Marseille lorsque cet Aiglon est né dans la cité phocéenne et, auparavant, directrice de l’Opéra de Lausanne. Les décors sombres et austères de Christian Fenouillat rendent admirablement le sentiment d’oppression et d’étouffement ressenti par le duc de Reichstadt dans sa prison dorée de Schönbrunn. Les magnifiques costumes d’époque d’Agostino Cavalca sont un régal pour les yeux. Fidèle à la mise en scène originelle, Renée Auphan a particulièrement soigné la direction d’acteurs. Le spectacle est porté de bout en bout par Carine Séchaye dans le rôle-titre, formidable de présence et d’engagement jusque dans sa fragilité, traduisant à merveille tant les illusions que la lucidité du protagoniste. Franco Pomponi incarne un Metternich terrifiant et démoniaque, dont les confrontations avec le duc deviennent de plus en plus dures au fil du spectacle. Il convient également de relever l’excellente prestation de Marc Barrard en Séraphin Flambeau grognard mais au cœur généreux, et de Benoît Capt en Maréchal Marmont à la noble prestance. A la tête d’un Orchestre de Chambre de Lausanne en grande forme, Jean-Yves Ossonce a offert une lecture subtile et nuancée de la partition. Un spectacle incontournable ! Deux bonnes nouvelles : ces représentations lausannoises devraient faire l’objet d’un disque. Et tous ceux qui n’ont pas vu L’Aiglon peuvent se rattraper à Tours du 17 au 21 mai.



Claudio Poloni

 

 

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