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Premier opéra anglais

Angers
Grand Théâtre
01/06/2013 -  et 8, 9 (Angers), 14, 15, 17, 18, 20 (Nantes) janvier 2013
John Blow : Begin the Song, Ode on St-Cecilia’s Day – Venus and Adonis

Céline Scheen (Vénus), Marc Mauillon (Adonis), Romain Delalande (Cupidon)
Chœur des Musiciens du Paradis, Alain Buet (chef de chœur), La Maîtrise de Caen, Olivier Opdebeeck (chef de chœur), Les Musiciens du Paradis, Bertrand Cuiller (direction)
Louise Moaty (mise en scène), Adeline Caron (scénographie), Alain Blanchot (costumes), Christophe Naillet (lumières), Françoise Denieau (chorégraphie)


C. Scheen, M. Mauillon (© Philippe Delval)


Après avoir visité toutes les villes coproductrices du spectacle – Caen, Lille, Luxembourg et Paris (Opéra comique) –, c’est donc à Angers (puis Nantes) que cette production pleine de grâce de Vénus et Adonis de John Blow, signée par Louise Moaty, finit sa course. Premier opéra anglais digne de ce nom, ce «masque» en trois actes avec prologue (tiré des Métamorphoses d’Ovide) est un divertissement composé en 1683 à l’intention du roi Charles II (une de ses anciennes maîtresses ainsi qu’une de ses filles y interprétaient d’ailleurs les rôles de Vénus et de Cupidon). L’œuvre s’inspire du modèle de la tragédie française tel que l’a conçu Lully, auquel il emprunte également l’incontournable prologue allégorique. Après deux actes dédiés aux amours sensuelles des deux héros, le troisième se fait tragique avec la mort d’Adonis, mortellement blessé par un sanglier au cours d’une chasse. L’ouvrage étant très court (à peine une heure), Louise Moaty l’a fait précéder d’une pièce instrumentale d’une grande qualité musicale, composée à la même période par le compositeur, l’Ode à Sainte Cécile «Begin the song».


Ancienne assistante de Benjamin Lazar – elle a notamment collaboré avec le talentueux metteur en scène français sur les fameuses productions du Bourgeois Gentilhomme et de Cadmus et Hermione –, Louise Moaty reprend les idées phares de son mentor: éclairages à la bougie, costumes d’époque, restitution linguistique, gestique baroque lors des intermèdes dansés. La scénographie imaginée par Adeline Caron rend hommage aux «vanités» picturales chères au XVIIe siècle: le plateau est ainsi encombré de globes, cénotaphes, petits coffres en bois et autres instruments de musique, tandis que le fond de la scène est ceinturé par des arbustes, qui renvoient à l’aspect pastoral et bucolique de la fable d’Ovide. Par fidélité à une ancienne tradition iconographique, certaines scènes dévoilent la présence de chiens (attribut attaché à Adonis) et de colombes (liées au personnage de Venus). Saluons enfin les magnifiques éclairages chauds et tamisés de Christophe Naillet, qui jouent admirablement sur les clairs-obscurs.


La direction musicale de l’ouvrage est confiée à Bertrand Cuiller, à la tête des excellents Musiciens du Paradis, qui alterne avec le même bonheur sonorités badines ou tragiques. Il convient de louer le chef français, qui trouve le ton juste, avec une lecture qui parvient à s’incliner devant l’apparente simplicité de cette musique tout en faisant ressortir la richesse harmonique de cette magnifique partition.


Dans le rôle de Vénus, Céline Scheen offre un chant de très jolie qualité, avec un timbre rond et fruité, qui distille beaucoup d’émotion dans la poignante aria «Adonis, uncall’d». Scéniquement, la soprano belge donne beaucoup de relief à son personnage, tout particulièrement dans la scène finale où elle pleure avec véhémence et crédibilité la mort de son bel amant. Marc Mauillon s’avère un Adonis d’une formidable présence, en remarquable comédien qu’il est, tandis que sa voix, rompue au répertoire baroque, sait se faire caressante ou pleine d’éclat, comme dans le «Hark, hark!» au I. Quant au Cupidon du jeune soprano Romain Delalande, il accuse malheureusement de fâcheuses limites de timbre et d’intonation.


Mais les triomphateurs de la soirée sont indéniablement les garçons de la Maîtrise de Caen, qui apportent beaucoup de fraîcheur au spectacle, et plus encore les solistes du Chœur des Musiciens du Paradis, parfaitement préparés par le baryton Alain Buet, desquels on détachera le jeune ténor David Tricou, au timbre clair et lumineux. Tous ensemble, ils livrent une bouleversante déploration finale, «Mourn for thy servant», pleine de pathos, et d’une puissance expressive dont Purcell (qui fut son élève) se souviendra en composant le lamento conclusif de son opéra Didon et Enée, de seulement cinq ans postérieur.



Emmanuel Andrieu

 

 

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