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Clôture russe

Annecy
Eglise Sainte Bernadette
08/30/2012 -  et 31* août 2012
Richard Wagner : Lohengrin: Prélude à l’acte I
Serge Prokofiev : Concerto pour piano n° 1, opus 10 – Concerto pour violon n° 2, opus 63 – Alexandre Nevski, opus 78
Igor Stravinski : Pétrouchka
Nikolaï Rimski-Korsakov : La Grande Pâque russe, opus 36 – La Légende de la cité invisible de Kitège: Extraits symphoniques

Ketevan Kemoklidze (mezzo), Sayaka Shoji (violon), Denis Matsuev (piano)
Coro dell’Accademia Nazionale di Santa Cecilia, Orchestre philharmonique de Saint-Pétersbourg, Yuri Temirkanov (direction)




Pour clore sa troisième édition, l’Annecy Classic Festival recevait rien moins que l’Orchestre philharmonique de Saint-Pétersbourg, en résidence ici depuis l’origine, avec l’excellent Yuri Temirkanov, son directeur musical depuis 1988. Tout naturellement, c’est un programme 100% russe qu’ils ont proposé au public savoyard, si l’on omet une pièce de Wagner, en hommage au maître de Bayreuth, ville avec laquelle Annecy est jumelée depuis 45 ans. C’est ainsi que le premier concert débute par le Prélude de l’acte I de Lohengrin. Dès les premières mesures, l’élève de Mravinski se plonge littéralement dans la musique. Avec sa gestuelle à la fois précise et suggestive, il entraîne ses musiciens qui le suivent comme un seul homme. En résulte une lecture nuancée, mais surtout hautement émotionnelle, qui sait créer immédiatement l’atmosphère mystique de ce passage, magnifié par la performance magistrale de l’orchestre.


A tout seigneur, tout honneur, le pianiste russe Denis Matsuev, directeur artistique, avec Pascal Escande, de la manifestation annecienne, donne le Premier Concerto de Prokofiev. D’emblée, le jeune virtuose russe impressionne par la vigueur et la force de son interprétation (à en faire trembler son Yamaha!), mais il sait également jouer plus en douceur les longues phrases du mouvement lent. Acclamé par le public, il livre en bis l’étourdissante paraphrase du «Largo al factotum» du Barbier de Séville de Rossini par Grigory Ginzburg. Etourdissant, l’adjectif vaut aussi pour le jeu de la violoniste japonaise Sayaka Shoji qui, dans le Second Concerto de Prokofiev, enthousiasme. Elle aborde cette partition avec quiétude et retenue, les deux premiers mouvements, techniquement impeccables, sont empreints d’une lumière solaire et rayonnante. Quant au dernier mouvement, il vibrionne sous ses doigts déjà chevronnés, qui se jouent de son tempo frénétique.


Pour finir la soirée, Temirkanov dirige Pétrouchka, dont les rythmes et les couleurs n’ont bien évidemment aucun secret pour lui. Sa direction accentue le côté rugueux et anguleux de la partition de Stravinski, sa légèreté également dans les sources populaires, sans omettre de nous raconter une histoire: on entend bien un ballet, avec des personnages formidablement symbolisés par les instrumentistes de la phalange pétersbourgeoise. L’ovation qui fuse après les derniers accords incite ainsi Temirkanov à faire se lever d’abord le trompettiste, le flûtiste, puis le pianiste, avant tout le reste de l’orchestre.


Le lendemain soir, nous retrouvions avec bonheur le même orchestre, mais malheureusement dans le même lieu: l’église Sainte Bernadette. Sise en face du merveilleux lac, l’on ne pourra pas employer le même adjectif pour définir la qualité acoustique de ce lieu de culte, et les magnifiques artistes invités par le festival mériteraient vraiment un autre écrin. Le problème a été soulevé, et peut-être l’avenir réservera-t-il une bonne surprise...


Le concert débute avec deux œuvres de Rimski-Korsakov, et d’abord la flamboyante Grande Pâque russe.
Comme la veille, Temirkanov impressionne par une battue extraordinairement sobre, et par son contrôle absolu des plans sonores, si bien qu’on ne peut que ressentir une certaine jouissance à le voir déchaîner de si violentes trombes orchestrales par des mouvements de mains aussi légers. Le chef russe confère à cette œuvre chamarrée, qui pourrait si facilement tomber dans l’exotisme de bazar, une incisivité à couper le souffle, tout en livrant une splendide série d’images musicales. Le même bonheur nous étreint lors de l’exécution de deux extraits symphoniques tirés de l’opéra le plus célèbre de Rimski-Korsakov, La Légende de la cité invisible de Kitège. Car comment résister à la somptuosité cristalline de ces pages symphoniques, parmi les plus ensorcelantes du compositeur russe, que Temirkanov délivre dans une version quasi chambriste?


Clou de la soirée et final grandiose de ces onze jours de festival, la magnifique cantate de Prokofiev Alexander Nevski. Dès les premiers accords, nous retrouvons la force tellurique et la dimension dramatique qui siéent à cette œuvre grandiose, frénétiquement tragique. La célèbre «Bataille sur la glace» est bien sûr un très grand moment de puissance orchestrale, des images du film d’Eisenstein revenant alors immanquablement en tête. L’orchestre russe est rejoint par le formidable chœur romain de l’Académie Sainte Cécile, remarquable par son homogénéité et son phrasé, qui s’amalgame magistralement à un orchestre chauffé à blanc. Quant à la mezzo-soprano géorgienne Ketewan Kemoklidze, qui arrive sur scène en portant toute la douleur du monde sur ses épaules, elle bouleverse dans son air «Sur le champ des morts», avec ce timbre chaud et de ces couleurs typiquement slaves. L’épopée reprend ensuite ses droits avec l’«Entrée triomphale d’Alexandre Nevski dans Pskov», qui soulève l’enthousiasme d’un public définitivement conquis et conclut somptueusement le dernier concert du festival.


Le bilan de cette clôture de l’Annecy Classic Festival est donc brillant. Et ce «petit» festival, seulement par le nombre de ses années, s’impose d’ores et déjà comme l’un des plus importants en France.


Le site de l’Annecy Classic Festival



Emmanuel Andrieu

 

 

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