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Conte oriental

Paris
Opéra Comique
06/18/2012 -  et 20, 22*, 24, 26, 28 juin 2012
Georges Bizet : Les Pêcheurs de perles
Sonya Yoncheva (Léïla), Dmitry Korchak (Nadir), André Heyboer (Zurga), Nicolas Testé (Nourabad)
Chœur Accentus, Orchestre Philharmonique de Radio France, Leo Hussain (direction)
Yoshi Oida (mise en scène)


A. Heyboer (© Pierre Grosbois)


Dans Les Pêcheurs de perles, le jeune Bizet, lauréat du Prix de Rome, reprenait un sujet connu : la prêtresse coupable, qu’avaient incarnée Julia la vestale et Norma la druidesse. Mais, vingt ans avant Lakmé, il sacrifiait aussi à l’exotisme dont l’époque était friande. C’est bien là, justement, qu’on attend aujourd’hui les metteurs en scène. Le Japonais Yoshi Oida trouve la parade, à travers un orientalisme dépouillé à l’extrême. Toile abstraite en guise de décor, où pourraient se deviner les vagues de l’océan irrité. Scène en plan incliné où roulent des corps rejetés par la houle. Quelques pirogues suspendues, des nasses, peu d’accessoires sur un espace nu. Ces Pêcheurs hors du temps tiennent un peu du conte, avec ces mouvements chorégraphiques très lents, quasi ritualisés, mais omniprésents et vite monotones, tandis que le chœur ne joue pas. Voici un Orient nocturne, lunaire, subtilement gris et bleu à travers les lumières de Fabrice Kerbour. Barbes et turbans, eux, nous renvoient à la puissance des interdits : Zurga, chef absolu de la tribu, devient du coup le héros de l’œuvre, paraissant dès le lever du rideau, aussi tragiquement seul qu’à la fin. La direction d’acteurs, malheureusement, ne donne guère de poids au concept : elle est juste mais minimale, discrète, convenue, inexistante à force d’économie.

Tout le contraire de la direction de Leo Hussain, qui a choisi opportunément la version originale de 1863. Cette lecture très théâtrale, aux contrastes marqués, exaltant rythmes et couleurs, anticipe sur Carmen. Pas trop de saturation pour autant, grâce à une adaptation bien pensée à l’acoustique de Favart. Et la poésie, quitte à adopter des tempos larges, ne perd pas ses droits, comme à l’arrivée de Léïla au premier acte. Une Léïla qui domine le plateau à travers Sonya Yoncheva, alors que le chant, au début, trahit une certaine timidité, voire quelque raideur. Mais le deuxième acte révèle les couleurs de la voix, l’homogénéité de la tessiture d’un vrai soprano lyrique là où l’on distribue souvent des voix menues, un vrai tempérament aussi, une intimité avec le style français enfin – on note avec plaisir la qualité de l’articulation.

On retrouve cette qualité chez le Nadir de Dmitry Korchak, moins séduisant néanmoins, pas assez élégiaque, malgré une technique éprouvée, notamment pour la voix mixte : on regrette seulement un timbre sans grand charme, des aigus durs. André Heyboer et Nicolas Testé, eux, représentent dignement l’école française. Le premier rappelle, par l’aisance dans la déclamation, l’assurance dans l’aigu, la franchise de la ligne, les grands barytons du passé, un Jean Bortayre ou un Robert Massard ; il lui faudra néanmoins assouplir le galbe des phrases, diversifier les couleurs et les nuances, pour atteindre à la noblesse d’un Ernest Blanc. Le second, très en voix, a, en Nourabad, si souvent sacrifié, toute la dignité du prêtre. Le chœur Accentus, en revanche, chante trop droit la musique de Bizet.



Didier van Moere

 

 

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