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Longue vie!

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Horrues (Eglise Saint-Martin)
06/15/2012 -  et le 16 juin 2012
Claude Debussy : Images oubliées
Franz Liszt : Du berceau jusqu’à la tombe
Frédéric Chopin : Deux Nocturnes, opus 27
Robert Schumann : Fantaisie, opus 17 – Sonate pour piano n°1, opus 11 (*)
Franz Schubert : Sonate pour piano n°23, D. 960 (*)

Nicolas Stavy, Adam Laloum (*) (piano)


N. Stavy(© Flore)


Depuis 1993, l’Eté musical d’Horrues poursuit son chemin malgré la conjoncture économique qui le contraint depuis trois ans à réduire le nombre de concerts, sans pour autant sacrifier la qualité. Cinq l’année dernière, six aujourd’hui : la vingtième édition (du 15 au 28 juin) est encourageante en ce sens qu’elle comporte une soirée supplémentaire dans l’église Saint-Géry de Braine-Le-Comte qui n’avait plus accueilli ce festival depuis 2008. Jusqu’à maintenant, cent onze musiciens, formations et orchestres – et non des moindres – se sont produits durant ce festival particulièrement attachant. Même s’il ne bénéficie pas du succès publique qu’il mérite, comme le suggère l’affluence modeste ces deux premiers soirs, l’Eté musical d’Horrues nous manquerait cruellement si, par malheur, il venait à disparaître. Compte tenu de l’effort budgétaire que cela représente, il convient de noter sur son agenda la date du 28 juin pour applaudir François-Frédéric Guy dans les Premier et Cinquième Concertos de Beethoven avec l’Orchestre philharmonique royal de Liège qu’il dirigera lui-même du piano.


Lors de sa traditionnelle introduction, Anne-Marie Potvin n’évoque pas cette fois-ci les difficultés que le festival rencontre depuis quelques années, peut-être par pudeur ou parce que cela va un peu mieux, mais cette édition-anniversaire revêt évidemment une signification particulière. Une conclusion s’impose suite à la présentation du programme : séduits par l’atmosphère de l’église Saint-Martin, les musiciens restent fidèles à Horrues comme Nicolas Stavy en 2008 et en 2009, qui salue le public après que la fondatrice et directrice artistique a rappelé, comme à son habitude, les quelques modalités d’usage – coupes de champagne en vente lors de la pause, félicitations aux artistes dans la taverne voisine plutôt que dans l’église qu’il faut fermer tout de suite après le concert.


Sa prestation débute par les Images oubliées (1894) de Debussy dont la troisième, « Quelques aspects de "Nous n’irons plus au bois" parce qu’il fait un temps épouvantable », trouve une amusante correspondance avec la météo effectivement maussade que la région connaît actuellement. Avec sobriété et éloquence, le pianiste trouve le ton juste dans chacune de ces pages disparates. La première Image, par exemple, porte comme indication « Lent, doux et mélancolique » et c’est exactement de la sorte que Nicolas Stavy l’interprète, en essayant de s’abstraire du pépiement intempestif d’un oiseau qui s’est réfugié dans l’édifice. Idéalement réverbérée, l’acoustique apporte une appréciable plus-value à la sonorité, élaborée et chatoyante.


Le sens des contrastes constitue une autre vertu cardinale de ce musicien comme l’illustre son interprétation de Du berceau jusqu’à la tombe (1881) que Liszt composa d’abord pour le piano avant de l’orchestrer : premier volet introspectif, deuxième extraverti, troisième mélancolique. Avant de rejoindre son instrument, le musicien a attiré l’attention sur la proximité chronologique – une dizaine d’années seulement – entre cette œuvre et les Images oubliées. Rapprocher ainsi les deux compositeurs permet de s’apercevoir à quel point Liszt, à la fin de sa vie, expérimenta les effets sonores comme, un peu plus tard, l’auteur de La Mer. Non annoncés dans le programme de salle (en papier glacé), les Nocturnes opus 27 (1835) de Chopin ravissent à chaque instant. De la sensibilité sans mièvrerie, de la distinction sans prétention : n’est-ce pas ainsi que cette musique doit être jouée ? Presque exactement contemporaine, la Fantaisie (1836) de Schumann révèle un Nicolas Stavy maître de ses moyens : grâce à son souci de la forme et à son imagination, il restitue les sentiments opposés et les lignes directrices d’une œuvre qui peut paraître incohérente et opaque si elle est confiée à des doigts moins expérimentés. Du Chopin en guise de bis, notamment un Nocturne en do dièse mineur opus posthume que le pianiste a choisi à l’intention d’Anne-Marie Potvin, qui semble apprécier tout particulièrement, et dans lequel son toucher plein de tact fait décidément merveille.



A. Laloum(© Carole Bellaiche)


Premier prix et prix du public au Concours Clara Haskil de 2009, Adam Laloum opte le lendemain pour deux grandes sonates. A peine assis, comme s’il ne pouvait plus attendre, ce jeune homme de vingt-cinq ans empoigne la Première Sonate (1835) de Schumann. Aucune hésitation dans ce jeu rigoureusement pensé comme le suggère une gestion optimale des tempi et de la dynamique. Ces pianissimi impalpables mais toujours nets, ces forte éclatants mais aucunement bruyants, ces graves profonds mais jamais enfouis ne peuvent appartenir qu’à un pianiste de grande classe qui habite chaque recoin de la partition dont il domine l’architecture et les idées avec clairvoyance. La sonorité, magnifique, évoque souvent celle d’un orchestre par sa richesse et ses oppositions. Malgré son attention portée aux détails, ce fin musicien ne perd pas de vue la continuité du discours qu’il prononce sans s’essouffler et sans dissiper l’attention.


Au contraire de certains dont il est préférable de taire le nom, Adam Laloum n’a pas besoin de se singulariser (et de faire des grimaces) pour se distinguer : la musique et son inestimable talent lui suffisent. Son interprétation humble et spontanée de la Vingt-troisième Sonate de Schubert (1828) n’apporte aucun démenti à cette affirmation : elle révèle une compréhension profonde de l’univers de ce compositeur et dispense de pures moments de poésie et de grâce, notamment dans l’Andante sostenuto. Le jeune homme, qui salue de façon touchante en joignant les mains, restitue le lyrisme et les sentiments de cette œuvre-fleuve tandis que son toucher à la fois rond et affirmé constitue un autre motif de satisfaction. Et rien ne vient briser le climat en clair-obscur qu’il parvient à instaurer, pas même le bruit de la lourde pluie qui s’abat soudainement sur l’église.


Beaucoup d’habitués pour la suite. Le lendemain après-midi, Jean-Luc Votano, Arnaud Thorette et Julien Gernay prennent la relève dans un programme Reinecke (Trio opus 264), Beethoven (Sonate «Le Printemps»), Verdi (transcription de Rigoletto) et Schumann (Märchenerzählungen). Le week-end prochain, les 23 et 24 juin, Albrecht Breuninger interprètera, le samedi, les Variations pour violon K. 374b de Mozart, la Première Sonate de Prokofiev, la Chaconne de Bach et la Sonate de Franck aux côtés d’Irène Berger tandis que le Quatuor Alfama entouré d’Eléonore Darmon et Julien Libeer se produira, le dimanche, dans le Premier Quatuor d’Arriaga, le Langsamer Satz de Webern et le Concert de Chausson.


Le site de l’Eté musical d’Horrues
Le site de Nicolas Stavy



Sébastien Foucart

 

 

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