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Historique

Geneva
Victoria Hall
04/25/2012 -  
Gustav Mahler: Ich ging mit Lust (orchestration Luciano Berio) – Ging heut’ morgen übers Feld – Blicke mir nich in die Lieder – Erinnerung (orchestration Berio) – Um Mitternacht – Ich bin der Welt abhanden gekommen
Dimitri Chostakovitch: Symphonie n° 7 «Leningrad», opus 60

Thomas Hampson (baryton)
Orchestre de la Suisse romande, Vasily Petrenko (direction)


V. Petrenko (© Mark McNulty)


Voici une soirée à marquer d’une pierre blanche, mieux d’un tas de pierres blanches. Il faudrait mentionner bien évidemment la suprême distinction de Thomas Hampson, l’autorité de Vasily Petrenko, la beauté de ces lieders de Mahler et la qualité de l’orchestration de Luciano Berio et enfin le souffle de la Symphonie «Leningrad» de Chostakovitch. Mais il me faut commencer et insister sur un événement qui est une première dans cette salle et représente une étape absolument majeure pour l’orchestre.


ConcertoNet a eu à plusieurs reprises à regretter la faible qualité de l’acoustique de Victoria Hall. Cette salle historique fait partie du patrimoine de la ville de Genève. Elle est cependant assez étroite et le son de l’orchestre est souvent confus en particulier lorsque les œuvres jouées demandent des effectifs importants. Pour attaquer ce problème, les musiciens ont travaillé avec Kahleacoustics, une société qui a mis en place un système de rideaux latéraux qui ont simplement métamorphosé le son de la salle.


Le régisseur général de l’OSR, Guillaume Bachellier, qui a travaillé avec les équipes techniques et les musiciens a expliqué que les répétitions se déroulent maintenant dans une salle coupée en deux par un rideau de répétition qui permet de se rapprocher des conditions de concert lorsque la salle est pleine. Pour les concerts mêmes, l’orchestre a maintenant la possibilité d’installer deux rideaux de velours : une paire derrière les fauteuils d’orgue au fond de la scène qui rend l’acoustique de la salle plus homogène et une autre le long de la première galerie qui a le double avantage de réduire les effets de saturation de la salle et également de protéger les musiciens soumis à des sons particulièrement intenses.


Le choix d’utiliser ces configurations est avant tout dicté avant tout par des considérations musicales et artistiques. Ainsi, pour citer Guillaume Bachellier : «Mahler a été joué avec les rideaux latéraux de fond de scène uniquement» tandis que «Chostakovitch a été joué également avec ces rideaux auxquels ont été ajoutés ceux de la première galerie». Derrière chaque bon orchestre se trouve une bonne salle : Vienne, Amsterdam, Boston... Les ensembles qui depuis des années se produisent dans ces salles ont développé des équilibres et des réflexes communs qui leur permettent de trouver des couleurs et travailler les équilibres. C’est une condition sine qua none pour qu’au-delà de la qualité des individus, un style propre puisse être créé et développé.


De ce point de vue, ce concert était une révélation. Avoir un artiste du calibre de Thomas Hampson est enthousiasmant pour les musiciens mais une telle qualité de l’accompagnement qu’ils ont réalisé n’aurait pas pu être possible dans les conditions d’auparavant. Cette fois-ci, bois et cordes sont infiniment mieux équilibrés avec des phrasés plus homogènes, signe évident que ceux-ci ont une meilleure conscience les uns des autres. La palette de nuances de l’orchestre est plus détaillée et en particulier, il y a une réelle distinction entre les piano et le mezzo forte. Mahler demande beaucoup à ses chanteurs dans ses lieder de jeunesse, en particulier, la largeur de la tessiture du Ich ging mit Lust est très large, obligeant Hampson à forcer des notes de sa voix de tête mais dès que le registre est plus naturellement celui qui est le sien, le baryton américain n’a pas d’égal. Son autorité et sa retenue font merveille dans les deux Rückert-Lieder dont il faut également souligner la beauté du phrasé du cor anglais Sylvain Lombard. Très applaudi par un public très attentif, les musiciens bissent Ging heut’ morgen übers Feld.


C’est un ensemble imposant qui revient en seconde partie sur scène, à titre d’exemple, le nombre de contrebasses passe de quatre à huit, pour s’attaquer à cette œuvre particulièrement exigeante qu’est la Septième Symphonie «Leningrad». Si l’OSR peut se vanter d’être un orchestre «français», il a démontré une affinité certaine avec Chostakovitch que ce soit sous la direction de Marek Janowski ou de Neeme Järvi. Vasily Petrenko, actuel directeur musical du Royal Liverpool Orchestra ainsi que futur chef de l’Orchestre philharmonique d’Oslo n’est pas pour rien l’élève de Jansons et de Salonen. A l’opposé de certains chefs qui exacerbent le caractère dramatique des symphonies de Chostakovitch, il sait qu’il a devant lui une œuvre parmi les plus longues du compositeur russe et qu’il va falloir la construire avec patience, sans tout donner dès les premières mesures. L’Allegretto implacable se développe avec rigueur, le Moderato n’offre que quelques brefs moments de répit, l’Adagio est mahlérien à souhait et l’Allegro non troppo final est un exemple où le triomphalisme qui se dégage dans les dernières pages n’est que le reflet de l’attente et de la résistance du peuple russe et non d’un héros à la Strauss. Galvanisé par l’autorité du chef russe, l’orchestre très concentré fait merveille et on se surprend de découvrir des cordes plus solides et colorées que d’habitude.


Thomas Hampson ouvrira la saison prochaine de l’OSR avec Le Chant de la Terre: on ne peut que s’en réjouir et espérer qu’il devienne un habitué de ces lieux. Il faut également se dépêcher de reprendre date avec Petrenko avant que son agenda ne soit rempli. Mais il faut surtout féliciter les équipes qui ont travaillé sur l’acoustique de cette salle. Ne vous y trompez pas, c’est une nouvelle ère qui commence pour cet orchestre et ce concert est de ce point de vue historique.



Antoine Leboyer

 

 

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