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Allais au café

Paris
La Péniche Opéra
02/01/2012 -  et 28 janvier (Besançon), 2*, 3, 4, 5, 6, 7, 9, 11, 12, 13, 14, 18, 19 février (Paris), 1er mars (Le Pont-de-Claix) 2012
Nicolas Ducloux : Café Allais (création)

Edwige Bourdy (soprano), Gilles Bugeaud, Pierre Méchanick (barytons)
Nicolas Ducloux (piano)
Pierre Méchanick (mise en scène), Elisabeth de Sauverzac (costumes), Thibaut Fack (scénographie, lumière)




Alors que se prolongent les représentations de «Rita, elle est pas belle la vie?», association d’un opéra comique de Donizetti et d’un «demi-opéra» de Vincent Bouchot, La Péniche Opéra continue de s’intéresser à l’univers des troquets, en proposant parallèlement un «opéra fumiste, Café Allais: une création musicale autour de l’humoriste, concitoyen honfleurais de Satie, conçue par Nicolas Ducloux, pianiste et chef de chant de la compagnie «Les Brigands». Il en retrouve l’un des piliers, dont l’entrain et la prestance ont bien manqué à leur récente Botte secrète, le baryton Gilles Bugeaud. Celui-ci est par ailleurs le fondateur, avec le chanteur et metteur en scène Pierre Méchanick, de la Compagnie générale lyrique de France, qui produit le présent spectacle, dont La Péniche Opéra, coproductrice avec le Théâtre de Besançon, a déjà accueilli la saison passée le «Petit traité de rentrozologie urbaine (ou l’art de rentrer chez soi)».


La soprano Edwige Bourdy, une autre habituée, entre autres, du quai de la Loire, complète ce quatuor qui, puisant parmi les nombreux textes d’Alphonse Allais, et y ajoutant quelques compléments écrits par Bugeaud et Méchanik, offre près d’une heure et demie de pur délire verbal et musical, qui débute en fanfare par... quinze minutes d’entracte et se conclut sur... un nu intégral. On renoue ici avec la verve et la causticité des différents épisodes inspirés des Shadoks et présentés au cours des précédentes saisons par La Péniche Opéra: un feu d’artifice tout azimut! «Café Allais» ou bien «Qu’a fait Allais?», même si, bien sûr, «quand on s’appelle Allais, la moitié du chemin est faite», il faut toujours avoir l’esprit et l’oreille aux aguets: récits loufoque, saynètes parodiques, considérations pseudo-scientifiques se succèdent en effet dans un coq-à-l’âne permanent.


Mais l’absurde se fait parfois visionnaire: après un quatuor vocal a cappella qui chante un poème de Déroulède au patriotisme incendiaire, vient une lettre d’Allais au boutefeu nationaliste, dont l’ironie féroce fait froid dans le dos (et pas seulement parce que le chauffage s’est arrêté), annonçant les horreurs de la guerre bactériologique. Autre anticipation poussée au-delà de ses limites: l’art moderne, et ces monochromes blanc, noir et rouge que le peintre décrit avec une désopilante précision figurative.


Alternant avec de nombreux moments purement parlés, la partition de Ducloux (pour piano, boîte à meuh et percussions non répertoriées) remplit son office: une sorte de Gebrauchsmusik (musique fonctionnelle) comme l’entendait Hindemith, se livrant volontiers au pastiche ou à des embardées burlesques, le quart de queue Yamaha ayant toutefois tendance à couvrir un peu trop les chanteurs. L’inventivité de la scénographie et le défilé de costumes Belle Epoque réalisés par une autre fidèle des Brigands, Elisabeth de Sauverzac, parachèvent le succès de cette soirée qui satisfait intelligemment les zygomatiques.


Le site de la Compagnie générale lyrique de France



Simon Corley

 

 

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