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Débuts fracassants

München
Philharmonie im Gasteig
06/30/2011 -  et 1er juillet 2011
Maurice Ravel : La Valse
Ludwig van Beethoven : Concerto pour violon, opus 61
Félix Mendelssohn : Meerestille und glückliche Fahrt, opus 27
Claude Debussy : La Mer

Frank-Peter Zimmermann (violon)
Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Yannick Nézet-Séguin (direction)


La Philharmonie du Gasteig
(© Gasteig München GmbH/Matthias Schönhofer)



Même les métropoles musicales les plus actives peuvent connaître des problèmes de salle de concert, et Munich, avec ses trois phalanges orchestrales de prestige, constitue actuellement un bon exemple de ce type d’inconfort chronique. Le complexe moderne du Gasteig inclut un auditorium de belle apparence, tout de bois vêtu, mais qui souffre de dimensions trop importantes et d’une répartition curieuse des sièges, groupés en blocs séparés par des voies de dégagement qui gaspillent de l’espace et éloignent d’autant plus de l’orchestre les places les plus haut situées. Le volume semble énorme, les volées d’escaliers se dispersent dans toutes les directions et le son, conséquence malheureusement logique, semble un peu ténu, en dépit des grands réflecteurs transparents qui ont été disposés a posteriori au-dessus du plateau. Depuis son ouverture cette grande Philharmonie reste le lieu d’élection des Münchner Philharmoniker de Christian Thielemann, auquel succèdera prochainement Lorin Maazel. En revanche l’Orchestre de la Radio Bavaroise et son chef titulaire Mariss Jansons n’y sont que tolérés et doivent partager leurs apparitions entre cette salle trop grande et la vénérable Herkulessaal aménagée dans l’une des ailes de l’ancienne résidence des rois de Bavière, devenue aujourd’hui trop exigüe et inconfortable. Ce problème donne lieu à des débats politiques et journalistiques sans fin à Munich, apparemment d’une totale inefficacité puisque l’une des meilleures phalanges orchestrales mondiales (car c’est bien de cela qu’il s’agit) continue à vivre sans domicile fixe.


Pour ce concert d’abonnement, qui coïncide avec le début du Festival d’opéra au Nationaltheater, ce n’est pas Mariss Jansons qui est la baguette mais Yannick Nézet-Séguin, jeune chef canadien qui débute actuellement un peu partout à la tête de nos orchestres de renommée internationale en imposant à chaque fois son mélange concentré très personnel d’énergie et de nervosité. Et l’entrée en matière du concert, avec La Valse de Ravel, semble étudiée pour saluer ce début avec un coefficient de déflagration maximal. Mais c’est sans compter avec l’acoustique bonnasse du Gasteig, qui ramène vite les proportions à des dimensions plus sages, en dépit de la puissance naturelle de l’orchestre et de l’agitation de la petite silhouette qui dirige. On apprécie en tout cas un beau sens de l’avancée, La Valse ne s’alanguissant jamais trop sur ses vertiges viennois. Le chef parvient à bien concilier une myriade de détails avec des tempi vifs, et le tourbillon final devient brutalement très impressionnant.


Dans le Concerto pour violon de Beethoven, Frank Peter Zimmermann, qui connaît l’œuvre comme sa poche, prend implicitement les commandes. La sonorité est magnifique, les phrasés sont amples à souhait et aucun défaut manifeste n’est à relever, si ce n’est une sensation épisodique de longueur voire de relatif ennui, peut-être moins imputable au soliste qu’à une contradiction entre deux conceptions du temps musical : celle du soliste (de grandes arches et un beau sens de la progression) et celle du chef (beaucoup de détails, ponctuations soulignées, nuances heurtées...), avec à la clé une certaine dispersion.


Même résultat kaléidoscopique pour La Mer de Debussy, dont Yannick-Nézet Seguin nous livre une version très ébouriffée à laquelle manque une progression plus affirmée. En particulier Jeux de vagues semble passer totalement au-dessus d’un public peu familier de l’œuvre, par manque de déterminisme et de lisibilité. L’occasion reste cependant magnifique pour admirer les timbres d’un orchestre d’exception et la qualité de ses premiers pupitres, dont une flûte qui sonne parfaitement idiomatique. Et pour cause puisqu’il s’agit... d’un titulaire français (Philippe Boucly).


Juste avant Debussy, la principale originalité du programme est de regrouper les oeuvres par thème (en l’occurrence pour cette seconde partie l’ambiance marine) plutôt que par style et époque. Donc place après l'entracte à Mer calme et heureux voyage, ouverture que l’on aurait imaginée davantage à sa place au commencement du concert. Mendelssohn a su écrire là une ouverture remarquablement subtile, aux très fines colorations instrumentales, à défaut d’un impressionnisme musical qui n’est évidemment pas encore au rendez-vous. Yannick Nézet-Seguin en restitue bien le mystère et la forme en arche, même si peu des subtilités de timbre incroyables que l’on peut réveiller ici (le vétéran Hans Zender reste un spécialiste incontestable du genre) sont effectivement perceptibles.


A défaut d’une maturité qu’il serait vain d’exiger d’emblée, Yannick Nézet-Séguin effectue ainsi à Munich des débuts réussis, en tout cas vigoureusement acclamés. On peut en augurer qu’il y sera régulièrement réinvité.



Laurent Barthel

 

 

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