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Caresses orchestrales

Paris
Salle Pleyel
06/18/2011 -  et 14, 16 juin 2011 (London)
Wolfgang Amadeus Mozart : Concerto pour piano n° 27, K. 595
Anton Bruckner : Symphonie n° 4 “Romantique”

Maria João Pires (piano)
London Symphony Orchestra, Bernard Haitink (direction)


M.-J. Pires (© Felix Broede/DG)


Sur le papier, le concert donné par l’Orchestre Symphonique de Londres à Pleyel ne pouvait – malgré la défection de Murray Perahia (pour raisons de santé) – que faire rêver: l’une des formations symphoniques les plus polyvalentes, dirigée par une légende de la baguette dans un répertoire (Bruckner) où elle fait depuis longtemps autorité, accueillant l’une des plus distinguées mozartiennes dans le testamentaire K. 595. Le public est d’ailleurs venu en nombre applaudir cette affiche, réservant un accueil plus particulièrement chaleureux à Maria João Pires, remplaçante de luxe et pianiste adulée depuis longtemps dans la capitale. Habituée à se produire avec la formation londonienne (voir ici ou ici), la pianiste portugaise n’a pas beaucoup de mal à trouver l’osmose avec les instrumentistes, passés les premiers moments d’accoutumance acoustique. Comme on pouvait s’y attendre, elle équilibre à merveille la tristesse et la joie contenues dans le Concerto en si bémol (1791) de Mozart, à la tonalité si ambiguë, aux contrastes incessants – à la fois ironique et pudique. La magie des accords délicatement posés sur le clavier au début du Larghetto tient à peu de choses: on en voudrait presque à Bernard Haitink de respecter les nuances forte, au risque de rompre le charme de l’infiniment petit. Dans l’Allegro terminal en revanche, l’équilibre touche au sublime à la fin de la cadence, où les trilles du piano sont comme vénérées par le pianissimo irréel de l’orchestre, rejoignant la soliste comme sur la pointe des pieds. Seul goût amer de cette première partie, Maria João Pires prend congé sans accorder de bis. Petite consolation néanmoins: la même équipe donnera, dans la même salle, les Vingtième et Vingt-troisième Concertos (ainsi que la Septième Symphoniede Bruckner), les 17 et 18 juin 2012.


Pour reprendre l’image de notre collègue John Rhodes, «hearing and watching Bernard Haitink conduct a Bruckner symphony must now be like having been able to watch Rembrandt paint a portrait to be hung in the Rijksmuseum». C’est peu dire, en effet, que le vétéran Haitink (quatre-vingt-deux ans en mars dernier) fait autorité dans Bruckner, un compositeur dont il a laissé une intégrale de référence des symphonies dès les années 1960 (Concertgebouw/Philips) et quelques témoignages discographiques plus récents (voir ici ou ici). On peut certes se demander si «un grand mahlérien peut (…) être un grand brucknérien» (lire ici) et regretter, du coup, un geste peu exubérant «toujours plus artisan que démiurge » qui gomme les aspérités et les tensions. Ainsi Haitink offre-t-il de la Symphonie «Romantique» (1874/1888) une vision apollinienne, faite de lumière et d’équilibre. A l’exception – notable dans une telle partition – du cor solo, l’Orchestre symphonique de Londres impressionne par sa tenue et sa souplesse. La polyvalence des cordes doit plus spécialement être relevée, dans l’exercice de funambule des pizzicatos de l’Andante, quasi allegretto comme dans la caresse des pianissimos, la puissance des tutti du Scherzo ou la méthodique organisation du crescendo final du Bewegt, doch nicht zu schnell. Mais on ressort de ce concert davantage impressionné par la concentration du chef – auquel spectateurs et instrumentistes rendent un hommage unanime – et la clarté de son projet d’architecte de l’orchestre qu’ému par ce Bruckner peut-être trop impeccable.



Gilles d’Heyres

 

 

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