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Simplement bouleversant

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
06/04/1998 -  
Richard Strauss : Don Juan
Maurice Ravel : Concerto pour piano et orchestre en sol majeur
Jean Sibelius : Symphonie n° 2
Martha Argerich (piano), Orchestre National de France, Charles Dutoit (direction)

La présence de Martha Argerich envahit une salle et fait d’un concert une expérience bouleversante. Lorsque le tabouret l’agace, lorsqu’elle traverse la scène comme errant, agitant ses cheveux, lorsqu’elle boude et se débat sous les bravos, elle émeut. Elle se jettera sur le piano, ne retrouvant la sérénité qu’une fois la première note jouée, pour un rappel qu’elle paraît s’arracher, comme heureuse de son audace. Martha Argerich est sur scène comme déambulant seule en un lieu familier, perdue et inquiète.

Sa musique s’empare de tout. Elle fait disparaître jusqu’aux réponses parfois un peu dures que lui adressent les vents, elle plonge dans un halo d’obscurité magique tout ce qui l’entoure. Martha Argerich écrit un temps hypnotique, évident et étranger au monde, cercle qui l’enveloppe et fascine. La plus discrète de ses notes paraît toujours tendre la main, d’autant plus attirante qu’elle échappe. Les sonorités qu’elle invoque sont tour a tour caressantes ou piquantes, franches ou énigmatiques, toujours très sensuelles. La pianiste prend le temps d’écouter le désir des notes d’aller les unes vers les autres, elle fait entendre ce désir et accompagne les notes dans leur chemin. Martha Argerich semble alors se contenter de suivre une musique qui va seule, qui se crée en se jouant, perpétuellement inventive, ludique, tragique et légère, dans les passages de pure poésie comme dans les moments virtuoses de la partition. C’est superbe.

Le charme dont la pianiste emplit la salle la précède et la suit. Le poème symphonique de Strauss et la Seconde symphonie de Sibelius, restes bancals d’un programme où Martha Argerich devait initialement jouer le Second Concerto de Liszt, s’en trouvent nimbés d’une inexplicable poésie - celle de l’attente et du souvenir ?

Martha Argerich fait partie de ces très rares interprètes qui apportent au concert quelque chose de plus que la virtuosité, que l’originalité, que la musicalité, quelque chose d’énigmatique qui paraît les dépasser. La pianiste émeut par sa seule présence, son jeu envoûte, le charme agit bien au-delà du cadre de l’exécution, il se disperse dans la vie. Certains secrets ne sauraient être davantage dévoilés.



Gaëlle Plasseraud

 

 

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