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Lille
Opéra
03/07/2011 -  et 9, 11, 13*, 15 mars 2011
Michaël Levinas : Je, tu, il – La Métamorphose (création)
Fabrice di Falco (Gregor), Magali Léger (La sœur), Anne Mason (La mère), André Heyboer (Le père), Simon Bailey (Le fondé de pouvoir, Un locataire), Julie Pasturaud (La femme de peine), Laurent Laberdesque, Arnaud Guillou (Locataires)
Ensemble ICTUS, Georges-Elie Octors (direction), Benoît Meudic, Sylvain Cadars (informatique musicale de l’IRCAM)
Stanislas Nordey (mise en scène), Emmanuel Clolus (scénographie), Stéphanie Daniel (lumières), Raoul Fernandez (costumes), Elizabeth Delesalle (maquillages, coiffures)


(© Frédéric Iovino)


Ouvert à la musique contemporaine, l’Opéra de Lille accueille la création du quatrième opéra de Michaël Levinas. La Métamorphose succède aux Nègres que l’Opéra national de Lyon et le Grand Théâtre de Genève ont produit en 2004. Après Jean Genet, le choix du livret s’est porté sur la nouvelle éponyme de Franz Kafka dont le texte a été adapté en français conjointement par le compositeur, Emmanuel Moses et Benoît Meudic. Précédé, en guise de prologue, par Je, tu, il (texte, cette fois, de Valère Novarina), l’ouvrage relève de la catégorie de l’opéra de chambre : neuf chanteurs, pas de chœur et un orchestre de quinze musiciens comportant, notamment, une riche palette de percussions, des claviers midi ainsi qu’une guitare électrique. Issu du courant spectral, Michaël Levinas recourt sans surprise à l’informatique, réglée par l’IRCAM.


Concentrée sur une heure et demi d’un seul tenant, cette Métamorphose témoigne des préoccupations du compositeur sur l’espace, le timbre, l’acoustique, l’illusion sonore, la voix, le rapport au texte, les références au passé (en l’occurrence, le madrigal), pour ne citer que quelques domaines de recherche relevés dans l’un des deux programmes de salle édités pour l’occasion. Le reproche provient de l’emploi abusif, c’est-à-dire presque permanent, de la technologie informatique destinée à amplifier et modifier le son ainsi qu’à produire des effets de multiplication, notamment sur la voix. Celle de haute-contre de l’interprète de Gregor (Fabrice di Falco, qui a joué dans Les Nègres) subit ainsi un traitement pour le moins bizarre, notamment à la fin lorsqu’il produit au moyen de l’électro-acoustique des bruitages semblant provenir d’un film d’épouvante. A moins que cela soit voulu – le goût de la distanciation avoué par le compositeur ? –, la musique échoue à émouvoir, malgré la plainte de Gregor, et invite moins à réfléchir sur la nouvelle de Kafka qu’à s’interroger sur les rapports entre son et texte dans le théâtre d’aujourd’hui. Sur ce point, il paraît difficile de pousser plus loin l’expérimentation.


Cet objet singulier trouve un écho dans la mise en scène, tout aussi statique, de Stanislas Nordey qui avait déjà conçu celle des Nègres. Le spectacle traduit fidèlement la thématique de l’exclusion, sur laquelle repose l’ouvrage de l’écrivain tchèque, tout en refusant la représentation. Il s’agit donc, pour reprendre les termes de la note d’intention, de suggérer, d’esquisser. Gregor ne ressemble donc pas à un insecte repoussant, comme dans La Mouche représenté au Théâtre du Châtelet l’année dernière, mais bel et bien à un jeune homme faussement dénudé et posé sur un piédestal à proximité d’un cancrelat pachydermique qui apparaît progressivement grâce aux éclairages de Stéphanie Daniel. La monstruosité réside donc dans le comportement humain, comme le prouve une distribution manifestement acquise à la cause de Levinas. Appendice en fin de compte accessoire, le prologue relève du théâtre de foire hystérique mais, trop long, finit par exaspérer. Personnifiant les pronoms personnels « je », « tu » et « il », Magali Léger (qui incarne aussi une sœur de Gregor belle et hiératique), Anne Mason et Julie Pasturaud rivalisent d’humour ironique et grotesque dans d’extravagantes robes d’un rose bonbon écœurant. Georges-Elie Octors met toute sa science au service de cette composition en réalisant avec les musiciens d’ICTUS (en résidence) un travail scrupuleux, pour autant que l’électro-acoustique permette d’en juger. Baromètre fiable, le public réserve à cette création un accueil étonnamment chaleureux et ne manifeste aucune intention belliqueuse à l’encontre du compositeur lorsqu’il vient saluer.


Le site de Michaël Levinas


Le spectacle en intégralité :






Sébastien Foucart

 

 

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