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Dies irae

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
10/23/2010 -  
Serge Rachmaninov : L’Ile des morts op. 29 – Rhapsodie sur un thème de Paganini op. 43 – Symphonie n° 3 en la mineur op. 44
Andrei Korobeinikov (piano)
Philharmonia Orchestra, Vladimir Ashkenazy (direction)


A. Korobeinikov (© Jean-Marc Gourdon)


Trois concerts pour un festival Rachmaninov orchestré par Vladimir Ashkenazy, qui connaît mieux que quiconque, au pupitre ou au clavier, la musique du compositeur russe. Un beau programme, avec L’Ile des morts, les Deuxième et Troisième Symphonie, les Danses symphoniques, les Deuxième et Troisième Concerto, la Rhapsodie sur un thème de Paganini, avec Nikolaï Lugansky – il a remplacé Hélène Grimaud pour le premier concert – et le moins connu mais très prometteur Andrei Korobeinikov. Le deuxième concert proposait L’Ile des morts, la Rhapsodie sur un thème de Paganini et la Troisième Symphonie, trois œuvres où la citation du Dies irae confirme à quel point l’angoisse de la mort hantait Rachmaninov.


L’Ile des morts témoigne d’une belle recherche de couleurs et d’atmosphères, avec un début oppressant : Ashkenazy exalte le côté le plus désespérément sombre de la partition, à la faveur d’une lecture très narrative, où s’expriment aussi bien l’ondulation des vagues que les angoisses du Dies irae. On regrette seulement que l’orchestre n’atteigne pas l’équilibre qu’obtenait un Dohnányi, en particulier du côté de cordes trop discrètes et pas assez homogènes.


Remarqué à La Roque d’Anthéron en 2006, à vingt ans, Andrei Korobeinikov s’est également signalé par des disques consacrés à Scriabine et Beethoven. Il offre une Rhapsodie cascadante et fantasque, mais aussi distanciée, voire aride, comme le révèle le Dies irae de la septième variation, sans aucune complaisance ou grandiloquence dans l’émotion, notamment lorsque vient l’Andante de la onzième, se souvenant sans doute des interprétations du compositeur, si peu enclin aux épanchements excessifs ; le pianiste russe se situe très loin de la tradition d’un romantisme dévoyé – la sonorité elle-même, quelle que soit sa richesse, ne vise jamais à l’hédonisme. En bis, le célèbre Prélude en do dièse mineur, remarquable par sa hauteur de vue et le jeu de pédale.


L’orchestre trouve davantage ses marques dans la méconnue Troisième Symphonie, dont le chef exalte les contrastes et les ruptures de l’Allegro moderato initial, parfois assez audacieux, tout en trouvant le juste milieu avec un lyrisme typiquement russe, qu’il prend soin de ne pas faire dégouliner. L’Adagio dégage une immense nostalgie, avec un beau solo de violon puis un dialogue coloré des bois, avant un scherzo central nerveux et piquant, digne de Stravinsky ou de Prokofiev. L’Allegro final retrouve l’énergie du premier mouvement, entre liesse populaire et obsession du Dies irae, entre orgie dionysiaque et bouffées de mélancolie. Cette Troisième Symphonie, très caractéristique du dernier Rachmaninov comme la Rhapsodie, se situe vraiment à la lisière de deux univers, ancrée dans l’héritage du romantisme et plus ouverte qu’on ne le dit sur les conquêtes d’une nouveauté plus violente et plus percussive : un défi pour l’interprète, relevé par Ashkenazy qui, à l’opposé de la folie visionnaire d’un Svetlanov, parvient à donner de l’œuvre une vision unitaire, très maîtrisée, notamment dans le fugato du finale, bien arc-boutée sur son thème cyclique.



Didier van Moere

 

 

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