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Temple du musical Paris Théâtre du Châtelet 10/02/2010 - et 3, 5, 6, 7, 8, 9*, 10, 12, 13, 15, 16, 17, 18, 19 octobre Jerome Kern & Oscar Hammerstein II : Show Boat David Chevers (Steve), Glenn Swart (Pete), Miranda Tini (Queenie), James Lithgow (Windy), Malcolm Terrey (Captain Andy), Diane Wilson (Parthy), Nosiseko Mbundu (Child), Angela Kerrison (Julie), Dominique Paccaut (Ellie), Byron-Lee Olivato (Frank), Blake Fischer (Gaylord Ravenal), Graham Clarke (Sheriff Vallon/Max), Janelle Visagie/Mandie de Villiers-Schutte*(Magnolia), Otto Maidi*/Paul Madibeng (Joe), Marvin Kernelle (Rubberface), Alexander Tops (Backwoodsman), Christopher Dudgeon (Jeb), Bukelwa Velem (La Belle Fatima), Surika Green (Miss France), Carynn Wolff (Miss USA/Landlady), Nosiseko Mbundu, Thembela Foloti (Hoochie-Coochie Girls), Anthony Downing (Jake), Tshepo Mohomane (Charlie), David Chevers (First Barker), Revano Singh (Second Barker), Christopher Dudgeon (Third Barker), Marie Midcalf (Kim)
Cape Town opera Voice of the Nation Ensemble, Orchestre Pasdeloup, Albert Horne (direction)
Janice Honeyman (mise en scène)
(© Malin Arnesson)
La vie précaire des comédiens itinérants, les aléas des couples, les duretés de la ségrégation interdisant les mariages mixtes : tout ne prête pas à rire dans Show Boat. On y danse, certes, mais un parfum de mélancolie flotte souvent sur les sourires. On y voit aussi le monde changer, entre 1880 et 1927 : le temps s’écoule comme coule le fleuve, ce Mississippi que parcourt le Bateau-Théâtre. On passe du blues au ragtime, de Natchez à Chicago, des lendemains de la guerre de Sécession à la veille de la grande crise. Jerome Kern (musique) et Oscar Hammerstein II (livret et lyrics) ont signé un chef-d’œuvre, dont certaines chansons sont entrées dan le répertoire, à commencer par « Ol’ Man River ».
Jean-Luc Choplin a, une fois de plus, réussi son coup et bien commencé sa saison, faisant décidément du Châtelet un temple du musical - Missisipi (sic) y a d’ailleurs été donné dès 1929, deux ans après sa création new-yorkaise. La production de l’Opéra de Cape Town renvoie à une tradition plus qu’elle ne s’appuie sur un concept. Mais la mise en scène de Janice Honeyman, avec une direction d’acteurs pertinente et de bon goût, ne force jamais le trait et s’en tient à une lecture où se reconnaissent des types autant que des caractères – notamment dans la peinture des serviteurs noirs, presque sortis tout droit d’Autant en emporte le vent – c’est presque la nostalgie d’un monde qui s’exprime ici, d’une certaine image du musical.
Vocalement, l’ensemble se tient – pas besoin, d’ailleurs, de voix exceptionnelles. Le Gaylord de Blake Fischer fait valoir une jolie voix de ténor, assez souple dans l’aigu, pas très bien assorti à la Magnolia trop acide de Mandie de Villiers-Schutte. A celle-ci on préfère de très loin la charmante Julie d’Angela Kerrison, au timbre rond et coloré. Belle basse également d’Otto Maidi, aux graves profonds, très émouvant dans « Ol’ Man River ». Chacun, surtout, joue le jeu et croit à ce qu’il fait. Albert Horne dirige un Orchestre Pasdeloup beaucoup plus engagé que le condescendant Philharmonique de Radio France dans A Little Night Music : sa direction, précise, souplement rythmée, jamais appuyée ou bruyante, rend bien justice à un chef-d’œuvre dont on réécoutera avec délices la version de John McGlinn (EMI).
C’est coloré, c’est vivant, ça fait du bien.
Didier van Moere
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