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Voyage de Michel sur le Rhin

Paris
Cité de la musique
09/25/2010 -  et 24 septembre 2010 (Brugge)
Richard Wagner : Parsifal: Prélude (acte I), «Amfortas! Die Wunde!» (acte II) et «Nur eine Waffe taugt» (acte III) – Lohengrin: Prélude (acte III) et «In fernem Land» (acte III) – Götterdämmerung: «Voyage de Siegfried sur le Rhin» – Die Walküre: «Winterstürme» (acte I)
Alexandre Scriabine : Poème de l’extase, opus 54

Richard Decker (ténor)
Brussels Philharmonic – het Vlaams Radio Orkest, Michel Tabachnik (direction)


M. Tabachnik (© Fred Toulet)


Comme dans les autres salles parisiennes, c’est la rentrée à la Cité de la Musique, dont la nouvelle saison – consacrée aux utopies – est riche en promesses: réminiscences de la période soviétique (une prestigieuse soirée Prokofiev avec Guennadi Rojdestvenski le 13 octobre, des programmes Chostakovitch prometteurs avec Elisabeth Leonskaïa le 5 janvier, le Quatuor Borodine les 8 et 9 janvier), exploits pianistiques hors-normes (Jean-Frédéric Neuburger osant la Sonate de Barraqué le 14 janvier, Paavali Jumppanen associant Stockhausen, Cage et Boulez le 30 avril)... Une saison au cours de laquelle – faut-il y voir un effet de la réforme des retraites? – Alfred Brendel fera une double apparition (au piano et comme récitant le 15 janvier, pour une master class de quatuors à cordes le lendemain).


Dans le cadre de la thématique 2010-2011, le présent concert propose une double exploration du messianisme scriabinien et des prophéties wagnériennes, réunissant deux compositeurs cherchant «à toucher au cœur de l’humain et du divin, à transformer profondément leur public, (…) [à] construire un Tout musicomystique qui, chez l’un, trouva son parachèvement avec Parsifal et, chez l’autre, devait aboutir au Mystère , ce projet grandiose que la mort empêcha Scriabine de mener à bien», comme l’explique le texte de la notice.


Pour la première de leurs trois étapes parisiennes cette saison – ils reviendront à la Cité de la Musique dès le 11 mars pour une association Franz Liszt/Luigi Nono qui s’annonce détonante –, Michel Tabachnik et son orchestre bruxellois (formation de la Radio flamande fondée en 1935 mais rebaptisée, il y a deux ans, Brussels Philharmonic – het Vlaams Radio Orkest) ont offert à La Villette une prestation professionnelle quoique peu émouvante. C’est l’impression qui domine, en tout cas, à l’issue d’une brève seconde partie, où le mystère et l’opium scriabiniens font défaut au Poème de l’extase (1907). L’œuvre est bien en place, son plan ressort de façon particulièrement lisible, mais le résultat laisse froid, davantage sonore qu’extatique, sans les vapeurs de soufre que le souvenir encore vivace des interprétations d’Evgueni Svetlanov a laissé dans Paris. Quant à la formation belge, elle démontre toutes ses qualités collectives (cuivres et cordes) comme individuelles (premier violon, trompette), réussissant de sauvages fortissimos (qui agresseront moins dans la future Philharmonie qu’ils ne le font dans la Salle des concerts), sonnant de manière plus épanouie qu’en première partie (où l’on relevait une mise en place délicate au début, ainsi qu’une sonorité homogène mais sans beauté particulière).


Singulière première partie, où Michel Tabachnik compose un patchwork wagnérien collant à la thématique de la prophétie. Faut-il crier au sabotage comme le fait un spectateur à la fin de l’extrait symphonique du premier acte du Crépuscule des Dieux (1874), arrangé pour l’occasion – de manière notamment à s’enchaîner directement avec le morceau de Parsifal (1882) le précédant? On louera, pour notre part, l’intelligent enchevêtrement des passages de Lohengrin (1848) et de Parsifal (que la thématique rapproche naturellement) pour mieux exprimer son incompréhension face au choix de conclure sur le rebattu «Winterstürme» de La Walkyrie (1856), qui tombe vraiment comme un cheveu sur la soupe. C’est probablement dans le Prélude de Parsifal que – malgré des décalages au sein des cordes et une sonorité presque anonyme du fond d’orchestre – la prestation instrumentale convainc le plus, sachant allier la transparence des lignes à des tempos qui ne s’alanguissent pas et se concilient avec une lecture analytique de la partition.


Remplaçant Torsten Kerl, annoncé souffrant, le ténor américain Richard Decker se tire avec les honneurs des périlleux extraits qui lui incombent, débutant avec un «Récit du Graal» qu’il est plus aisé d’aborder une fois la voix de Lohengrin chauffée, concluant sur le «Winterstürme» qui se glisse fort mal dans une voix manquant de moelleux et de charme pour Siegmund (et se raidissant vite), s’épanouissant plutôt dans le rôle de Parsifal, qui s’accorde bien avec son registre stylistique et vocal (redonnant même le fragment du deuxième acte en bis). Mais, davantage que dans ces extraits en smoking, c’est sur scène qu’il faudra juger cette voix vaillante, solide et très homogène, entachée par moments d’une intonation trop haute et d’une tendance à sacrifier la justesse au bénéfice de la vocifération. On sent pourtant, derrière cette carrure trop abrupte, poindre le heldentenor – qui ne saurait être un monolithe sans douceur ni fêlure.


Le site de Richard Decker
Le site de Michel Tabachnik
Le site du Brussels Philharmonic



Gilles d’Heyres

 

 

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