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Fabuleuse réussite d’un Orphée inattendu

Lyon
Opéra National de Lyon
11/28/1997 -  et 29, 30 novembre, 19, 20, 21, 23, 26, 27, 28, 30, 31 décembre 1997
Jacques Offenbach : Orphée aux Enfers
Natalie Dessay/Stéphanie Morales* (Eurydice), Jean-Paul Fouchécourt/Eric Huchet* (Pluton/Aristée), Laurent Naouri/Laurent Alvaro* (Jupiter), Yann Beuron/Marc Duguay* (Orphée), Steven Cole (John Styx), Etienne Lescroart (Mercure), Virginie Pochon (Diane), Martine Olmeda/Pomone Epoméo* (L’Opinion publique), Maryline Fallot (Vénus), Cassandre Berthon/Marie-Belle Sandis* (Cupidon), Lydie Pruvot (Junon), Alketa Cela (Minerve), Ballet de Genève
Orchestre de l’Opéra national de Lyon / Orchestre de chambre de Grenoble, Chœur de l’Opéra de Lyon, Marc Minkowski (direction)
Laurent Pelly (mise en scène), Chantal Thomas (décors), Michel Dussarat (costumes), Dominique Boivin (chorégraphie)

Si l’Opéra national de Lyon donne cette année deux Orphée, de Monteverdi et Gluck (respectivement du 12 au 20 janvier, et du 1er au 12 février), on peut s’enflammer ces temps-ci pour celui d’Offenbach (1819-1880). Car c’est bien d’un spectacle tout feu tout flamme dont il s’agit. Ouvrage à succès (228 représentations de 1859 à 1862), c’est aussi l’un des plus importants du créateur de l’opérette française au temps du Second Empire. Escamotages, fantasmagories, danses, pantomimes, farces, déguisements, métamorphoses et simulacres sont aux rendez-vous, jusqu’au bal final qui fait terminer en triomphe l’opéra-comique, sur le thème du can-can que tout le monde connaît. La version ici présentée se base sur deux sources : elle intègre à l’opéra-bouffe en deux actes de 1858 des éléments de l’opéra-féerie en quatre actes de 1874. L’arrangement retenu par Marc Minkowski est - comme souvent - totalement convaincant : le théâtre est toujours présent dans sa version la plus chaleureuse et la plus vivante que l’on connaisse, on ne peut qu’adorer Offenbach en sortant de cet Orphée. Cela tient tout d’abord aux performances théâtrales des chanteurs aidés par une mise en scène débordant d’inventivité et d’intelligence. Le trio Eurydice - Pluton - Jupiter est parfait. Chacun a d’ailleurs subi quelque transformation décisive : Eurydice est une infidèle délurée et heureuse, Pluton sera quelque temps ‘son’ berger -machiavélique, et Jupiter se transformera en mouche pour séduire Eurydice.


La version standard est bien sûr inversée, parfois poussée par une allégorie : l’"Opinion publique". Eurydice n’est qu’un objet perdu qu’Orphée est contraint de retrouver, poussé par l’Opinion publique. Tout est parodie, retournement et détournements du mythe original, assez simple pour que tout le monde comprenne, assez polymorphe pour y adjoindre de multiples trappes et accessoires, ou même des histoires parallèles (on apprend par un autre chemin, que c’est Jupiter qui a changé Actéon en cerf, le jeune berger étant objet de trop d’intérêt de la part de Diane). Jupiter lance une pointe de foudre sur le derrière d’Orphée... qui se retourne. Eurydice, que se disputaient Pluton et Jupiter devient une bacchante et reste avec les Dieux. Exit Orphée. C’est bien plutôt une Eurydice, qu’un Orphée aux Enfers. Mais quelle Eurydice !


La grande lisibilité du canevas et la danse, parfaitement signifiante, donnaient une grande liberté de jeu aux chanteurs. L’adéquation parfaite de l’énergie théâtrale à la dynamique musicale (avec des enchaînements parfaits entre voix parlée et chant) permettait de retrouver le génie particulier de cette époque : joie, plaisir et gaieté. En effet, Natalie Dessay s’en donnait à cœur joie et son jeu spontané, malgré une grande maîtrise, s’allie à une voix épousant les moindres changement d’humeur de cette particulière et truculente Eurydice. Elle était secondée par de non moins brillants partenaires : Jean-Paul Fouchécourt faisait fureur dans le rôle de Pluton maître des Enfers bouffons, et Laurent Naouri bourdonnait efficacement en ‘Jupin’-mouche. Tout cela aiguillonné par la merveilleuse économie d’un orchestre léger par ses effectifs et donc, très lisible.


Ce débridement sympathique était également possible en vertu de la salle conviviale de l’Opéra de Lyon. La grande finesse de cette musique, souvent ravalée à tort au rang d’apéritif musical, est ainsi démontrée.



Frédéric Gabriel

 

 

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