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Ballet rock’n’roll

Paris
Opéra Bastille
03/18/2010 -  et 20, 23, 27, 29, 31 mars, 1er*, 4, 6, 7, 9, 11 avril 2010
Bruno Mantovani : Siddharta (création)

Nicolas Le Riche/Jérémie Bélingard*/Stéphane Bullion (Siddharta), Aurélie Dupont/Clairemarie Osta*/Alice Renavand (L’Eveil), Stéphane Bullion/Marc Moreau*/Aurélien Houette (Ananda), Wilfried Romoli (Le Roi), Muriel Zusperreguy*/Charlotte Ranson (Sujata), Alice Renavand*/Christelle Granier (Yasodhara), Séverine Westermann/Christelle Granier/Amélie Lamoureux*/Daphné Gestin* (Les deux tentatrices), Ballet de l’Opéra national de Paris
Orchestre de l’Opéra national de Paris, Susanna Mälkki (direction)
Angelin Preljocaj (chorégraphie), Claude Lévêque (scénographie), Eric Reinhardt (dramaturgie), Olivier Bériot (costumes), Dominique Bruguière (lumières)


A. Dupont, N. Le Riche (© Anne Deniau/Opéra national de Paris)


Bruno Mantovani (né en 1974) vient de mettre la dernière main à Akhmatova, sur un livret de Christophe Gristi: cet opéra en trois actes sur la poétesse russe sera présenté le 28 mars prochain sous la direction de Pascal Rophé et dans une mise en scène de Nicolas Joel. Avant même cette création de grande ampleur (deux heures), Bastille accueille dès cette saison la première d’une autre œuvre importante du compositeur français, à peine moins longue, mais écrite cette fois-ci pour le ballet.


Il s’agit en l’espèce de la concrétisation d’une collaboration envisagée de longue date avec Angelin Preljocaj. Au détour d’un entretien reproduit dans le programme de salle, Mantovani avoue que «son penchant naturel ne [l’]aurait pas conduit à composer» sur le thème que lui a proposé le chorégraphe: l’itinéraire de Siddharta Gautama, ce fils de roi qui s’engage dans une vie ascétique avant de fonder le bouddhisme. Mais plutôt qu’à cette ultime étape, le dramaturge Eric Reinhardt s’est intéressé au parcours initiatique du prince, avant qu’il ne soit devenu Bouddha – l’apprentissage de la méditation, qui le libère du samsara pour le conduire au nirvana – et en détachant cette narration de son contexte historique (vers le VIe siècle avant notre ère).


Statisme contemplatif ou exubérance à la Bollywood? Ni l’un, ni l’autre, Preljocaj ayant exprimé sa volonté... d’un «ballet rock’n’roll». Voilà sans doute pourquoi les «forces de Mâra, dieu de la mort, de l’illusion et de la tentation» auxquelles l’Humanité est confrontée «depuis l’aube des temps» portent des combinaisons noires de motards, casque intégral compris, et qu’elles sont défaites in fine par une escouade tout de blanc vêtue, les autres costumes conçus par Olivier Bériot étant toutefois plus conventionnels. Afin de tenter d’éviter le piège dans lequel certains spécialistes de la danse n’ont pas manqué de tomber en s’exprimant sur la partition, on ne se prononcera pas ici sur les aspects proprement chorégraphiques du spectacle, soutenu par une scénographie de Claude Lévêque: immense pendule oscillant tel un encensoir, hautes colonnes noires, châssis de wagon grandeur nature se balançant sur toute la largeur du plateau, maison éclairée de l’intérieur et tournant sur elle-même dans les airs, ... Très épurés, ces quelques éléments offrent, sous les lumières de Dominique Bruguière, de ces images somptueusement glacées auxquelles Bob Wilson nous a habitués.


Peu ou pas de couleur locale: en cela, la musique s’accorde avec la chorégraphie, les décors et les costumes. Selon Mantovani, «sa forme esthétique est autonome par rapport à la danse», tandis que Preljocaj estime qu’elle «porte en elle un besoin d’incarnation». Voilà sans doute pourquoi il n’est pas certain que le compositeur ait souhaité cette sorte de corrélation un peu naïve qui s’établit entre la fosse et la scène, telle cette façon d’assigner un instrument à un personnage – typiquement, la guitare électrique, qui semble vouée à annoncer chaque apparition du rôle-titre.


Cela étant, sous la baguette experte de Susanna Mälkki, directrice musicale de l’Ensemble intercontemporain depuis 2005, l’Orchestre de l’Opéra défend de façon très convaincante ces près de 100 minutes de musique sans interruption. Car ce qui frappe à nouveau chez Mantovani, c’est, malgré un catalogue déjà abondant, sa capacité à se renouveler: chez lui, contrairement à certains de ses confrères, tout ne sort pas d’un même moule, si abouti soit-il. Les premières pages, déluge sonore dominé par les percussions, saisissent l’auditeur – il ne fait pas de doute que le compositeur les retiendra lorsqu’il tirera des extraits symphoniques de ce ballet, ainsi qu’il en a exprimé l’intention. Mais au-delà de cette impression liminaire, on découvre que chacun des seize tableaux structurant le livret est clairement caractérisé, avec son tempo, son rythme, ses couleurs, son climat.


Volontiers incantatoire, entêtante, l’écriture tend à opposer des blocs (longues tenues des cordes, babil des vents, scansion des percussions), tout en laissant parfois percer des mélodies, comme dans ce passage confié aux violoncelles et cors. L’effectif est fourni, mais de formation traditionnelle (bois par trois, le reste à l’avenant), si l’on excepte les apports «exotiques» de la guitare électrique de Didier Aschour et du saxophone de Vincent David. Il est assez rarement utilisé dans sa totalité, d’autant que de nombreux soli s’en détachent, à commencer par la flûte de Frédéric Chatoux – elle joue un rôle en tant que tel dans l’histoire de Siddharta, qui s’essaie lui-même à pratiquer l’instrument – mais on remarque également le violon, le cor anglais, la harpe (avec la flûte) ou les percussions.


Le site d’Angelin Preljocaj
Le site de Claude Lévêque



Simon Corley

 

 

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