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Magistral

Baden-Baden
Festspielhaus
02/03/2010 -  
Robert Schuman : Sonate Op. 14 – Fantaisie Op. 17
Frédéric Chopin : Scherzo N° 1 Op. 20 – 4 Mazurkas Op. 33 – Sonate N° 2 Op. 35

Maurizio Pollini (piano)


M. Pollini (© Andrea Kremper)


Concert Schumann-Chopin de circonstance, en cette année doublement commémorative, qui marquait également les débuts de Maurizio Pollini dans la salle du Festspielhaus de Baden-Baden, plutôt bien remplie pour l’occasion. Passée la surprise de retrouver un Pollini plus émacié, aux cheveux désormais blanchis, et franchies aussi quelques minutes un peu incertaines, le temps de prendre la mesure de l’acoustique de la salle et de trouver les bons équilibres, on retrouve vite l’appréciable impression de sécurité laissée en général par ce pianiste techniquement sûr.


Il est vrai qu’attaquer d’emblée avec la redoutable Sonate Op. 14, dite encore « Concert sans orchestre » n’a rien d’un parcours d’échauffement, la prolifération des lignes et la surcharge de travail imposée aux doigts pouvant vite se révéler épuisante. Pollini traverse l’œuvre et ses foucades tout droit, peut-être un peu trop d’ailleurs, n’aidant pas l’auditeur à retrouver ses repères dans certains moments d’exaltation romantique où l'oreille peut peiner à trouver un sens à toutes ces grappes de notes qui fuient vers l’avant. Le pianiste, lui, n’a pas l’air trop gêné, à l’exception d’un brutal trou de mémoire au milieu du Prestissimo possibile (sic), incident très professionnellement rattrapé.


Le problème, si l’on peut toutefois qualifier ainsi ce manque général de compliance à une exaltation romantique qui nous semble quand même l’une des dominantes du discours schumannien, se répète dans la Fantaisie Op. 17, avec cette fois l’atout d’un discours musical par essence plus organisé et construit, et peut-être aussi d’une plus grande familiarité de l’auditeur avec ce pilier du répertoire pianistique. Pollini retrouve mieux ici ses vieux réflexes de pianiste d’estrade, sculptant le discours avec son art coutumier du ni trop ni trop peu, qui fonctionne magnifiquement dans un Langsam getragen d’une tenue exemplaire.


Seconde partie Chopin, sans doute inévitable, où l’on retrouve le Pollini de toujours, doté de moyens physiques impressionnants. Les réserves de puissance sont inépuisables et ces œuvres pourtant inlassablement parcourues et reparcourues au cours d’une carrière désormais longue échappent en général à la sensation de routine qui pourrait menacer de s’immiscer ici ou là. Un incontournable 1er Scherzo ouvre le ban, avec ses accords initiaux bien enfoncés dans le clavier mais jamais brutaux. Des Mazurkas Op. 33 bien construites et aussi peu alanguies qu’on les attendait mènent ensuite à une Seconde Sonate impeccable, évidemment sans concession à un pathos facile dans la Marche funèbre, mais sans non plus l’audace du dépouillement extrême osé aujourd’hui au même endroit par un Pogorelich à son meilleur, ou naguère par un exemplaire Rachmaninov. Presto final vertigineux, qui avance davantage comme une mécanique implacablement remontée que comme un tourbillon de folie.


Très belle série de bis chopiniens : Prélude N° 6, l’indispensable 12e Etude de l’Opus 10 et enfin un généreux 3e Scherzo, où la maîtrise des déplacements de mains affichée par le pianiste remporterait encore aujourd’hui tous les suffrages dans un concours international.



Laurent Barthel

 

 

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