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Berlin, troisième! Paris Salle Pleyel 03/15/2010 - et 9 (Innsbruck), 10, 11 (Wien), 18 (Bruxelles) mars 2010 Ludwig van Beethoven : Concerto pour violon, opus 61
Igor Stravinski : L’Oiseau de feu
Leonidas Kavakos (violon)
Deutsches Symphonie-Orchester Berlin, Ingo Metzmacher (direction)
L. Kavakos (© Yannis Bournias)
Pleyel accueille en à peine plus d’un mois le troisième orchestre de la capitale allemande en tournée avec son directeur musical: après la Staatskapelle et Daniel Barenboim (voir ici, ici et ici), après les Philharmoniker et Simon Rattle (voir ici et ici), voici l’Orchestre symphonique allemand (DSO) de Berlin et Ingo Metzmacher – encore tout récemment à la tête de l’Orchestre de Paris pour un très beau War Requiem (voir ici). Le tableau de la vie musicale berlinoise est ainsi presque complet, d’autant que s’il y manque notamment l’Orchestre symphonique de la Radio de Berlin, son «directeur artistique à vie», Marek Janowski, donne en ce moment même deux programmes avec l’Orchestre de Paris (voir ici).
Très non troppo dès une introduction orchestrale à la fois épaisse et anguleuse, l’Allegro initial du Concerto (1806) de Beethoven dure près de 25 minutes et le soliste ne se conforme pas davantage à la mode des interprétations «historiquement informées»: désincarné, presque indifférent et anémique, Leonidas Kavakos, dont la technique et l’intonation paraissent moins sûres qu’à l’accoutumée, ne se met pas en avant et ne tire pas parti de la lenteur pour insuffler un supplément de lyrisme. Cette lecture étrangement peu amène, mais cohérente jusque dans une cadence (de Kreisler) plus heurtée que virtuose, se prolonge dans le deuxième mouvement, qui ne tient plus ici de la romance ou de la prière, ni même de la méditation: tout aussi extrême, plus Largo que Larghetto, il déroute par ses phrasés et ses nuances dynamiques, mais l’on y retrouve les qualités du violoniste grec, aux aigus d’une pureté exceptionnelle. Semblant plus libéré dans le Finale, où il se joint à l’orchestre dans les tutti, il continue néanmoins de s’écarter résolument des sentiers battus: avec un archet suscitant rageusement soubresauts et à-coups, il ouvre des abîmes inattendus, tel ce long silence au milieu de la cadence, dans cette partition généralement tenue pour une rare parenthèse radieuse dans l’œuvre du compositeur. Evitant soigneusement tout vibrato, il prend congé avec l’Andante de la Deuxième sonate de Bach, particulièrement décanté.
Si le directeur artistique de la formation héritière de l’Orchestre de la RIAS (celui de Fricsay dans les années 1950) n’avait pas toujours convaincu en juin dernier (voir ici), il avait en revanche fait forte impression en mars 2004 avec l’Orchestre national dans L’Oiseau de feu (1910) de Stravinski (voir ici). A la tête de son DSO, Metzmacher confirme ses affinités avec ce ballet, dont il fait ressortir tout le raffinement sonore, encore tributaire de Rimski ou de Scriabine: servi par une formation d’une qualité instrumentale remarquablement homogène, le travail sur les couleurs et sur les textures, comme la délicatesse des trémolos des cordes dans la transition vers le Finale, n’empêche pas la narration de progresser de façon très évocatrice, presque descriptive – l’Oiseau volète avec éclat, les princesses tournent avec suavité, les monstres rampent avec des cris effrayants.
Bis aussi réjouissant qu’inattendu, la Marche militaire en si bémol (1917) de Korngold, guère belliqueuse malgré l’époque de sa composition, sonne plutôt, en cette Cacanie finissante, comme un souvenir de Schubert et Johann Strauss.
Le site de l’Orchestre symphonique allemand de Berlin
Le site d’Ingo Metzmacher
Simon Corley
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